Le différend avec Moscou sur les Kouriles intervient en pleine querelle maritime entre Tokyo et Pékin.
FRONTIÈRES Au nord, le Japon a dû subir lundi un énième camouflet sur les îles Kouriles, avec la visite du premier ministre russe Dmitri Medvedev. Au sud, les relations sino-japonaises traversent depuis le 7 septembre leur pire crise depuis 2006, après l'arraisonnement d'un chalutier chinois par les autorités nippones au large d'îlots de mer de Chine orientale, appelés Senkaku en japonais et Diaoyu en chinois, revendiqués par les deux pays rivaux. Inhabités, ces territoires situés dans une riche zone de pêche qui recèle potentiellement des hydrocarbures sont contrôlés de facto par le Japon.
Il y a un mois, l'empire du Milieu jubilait. Pékin avait obtenu la libération inconditionnelle du capitaine d'un chalutier chinois, arrêté après une collision au large des îles Senkaku, à la souveraineté revendiquée par les deux pays. Et hier, encore la presse chinoise s'est déchaînée contre le « nationalisme » du Japon, en faisant référence à la Seconde Guerre mondiale. Mais Tokyo a, en réalité, trouvé un peu de répit dans ce dossier. Le virulent conflit diplomatique a tourné, ces derniers jours, à son avantage grâce à son alliance avec les États-Unis.
Inflexible, Pékin, qui, lors de son bras de fer avec Tokyo, avait jeté en prison trois cadres nippons pour espionnage et ralenti ses exportations de terres rares, vitales pour quantité de produits industriels vers le Japon, s'est retourné. Cette intransigeance a servi d'avertissement pour les autres puissances de la région et en particulier, puisqu'ils demeurent les « arbitres » dans cette partie du monde, pour les États-Unis. « Cette fois, les Chinois ont franchi la ligne rouge », estime Robert Dujarric, chercheur à l'université Temple à Tokyo. « En Asie et à Washington, les colombes qui prônaient l'apaisement face à Pékin n'ont plus la main face aux faucons qui prônent la fermeté. »
Les rodomontades de Pékin en mer de Chine s'ajoutent à sa politique de yuan faible. La monnaie chinoise est sous-évaluée d'au moins 20 % face au dollar, selon les économistes, ce qui pénalise d'abord les États-Unis, le Japon et la Corée du Sud.
L'attitude de Pékin a paré de nouveaux éclats le partenariat nippo-américain en Asie. Washington était ulcéré par ses négociations interminables pour le redéploiement de ses bases dans l'archipel d'Okinawa (sud du Japon), bloquées par des intérêts locaux. Depuis l'arrivée d'un gouvernement d'alternance en septembre 2009, l'alliance nippo-américaine était remise en cause. Cela n'est plus le cas.
Arbitrage américain
Le Japon a désormais des alliés solides dans la région pour contenir la Chine. « Le récent sommet d'Asie de l'est d'Hanoï, avant le G20 à Séoul et l'Apec à Yokohama à la mi-novembre offre au Japon de nombreuses occasions de renforcer ses liens avec ses alliés. Mais il sait qu'il dépend entièrement de la Chine pour sa croissance, et sa marge de manoeuvre est limitée », estime le politologue Takao Toshikawa.
Hillary Clinton a proposé il y a quelques jours de jouer la médiatrice entre les deux voisins, toujours fâchés. Hier, Pékin a décliné.
Régis Arnaud
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