mardi 25 janvier 2011

En présentant ses projets pour le G20, M. Sarkozy ménage la Chine et l'Amérique

Le Monde - International, mercredi, 26 janvier 2011, p. 6

Entre le yuan et le dollar, pas question de désigner un coupable. Lundi 24 janvier, Nicolas Sarkozy a pris bien garde de ne froisser ni la Chine ni les Etats-Unis en abordant la nécessité d'une réforme du système monétaire international, l'une des priorités de la présidence française du G20. Pékin, qui répugne à parler devises, a eu droit à tous les égards. " La Chine est une grande nation et je me garderai de lui faire des réflexions sur sa politique monétaire ", a assuré le chef de l'Etat français.

" Le rôle éminent du dollar "

M. Sarkozy refuse d'emboîter le pas aux Etats-Unis, qui s'affrontent régulièrement avec les autorités chinoises sur la question du taux de change du yuan, jugé par Washington sous-évalué. Le président français préfère noter que, pour contrer les pressions inflationnistes et tenter d'augmenter la demande intérieure, les autorités chinoises commencent )" à souhaiter une appréciation du yuan ".

Pékin se voit même soutenu dans ses efforts visant à internationaliser sa monnaie. Une façon plus subtile, plaide-t-on à l'Elysée, d'amener le gouvernement chinois à faire des concessions, voire tout simplement à accepter de prendre part au débat. Nicolas Sarkozy a d'ailleurs admis que l'organisation en Chine, fin mars, d'un séminaire sur les changes n'avait " pas été si facile à obtenir ".

Le président s'est aussi employé à rassurer les Etats-Unis. " La France ne souhaite pas remettre en cause le dollar, qui joue un rôle éminent et doit être une monnaie forte ", a-t-il proclamé dans son propos liminaire. Le billet vert, a-t-il souligné, représente " 85 % des transactions mondiales ". Et même si " monnaie prépondérante ne veut pas dire monnaie unique ", il n'est désormais plus du tout question d'un " nouveau Bretton Woods " pour refonder le système monétaire, comme évoqué début 2010 au grand dam de Washington.

Impuissant à trancher entre les intérêts économiques vitaux de la Chine et des Etats-Unis, M. Sarkozy veut donc aborder les déséquilibres monétaires sous l'angle de la prévention et de la concertation. Le Fonds monétaire international (FMI) est érigé en arbitre. Ses statuts devront " éventuellement " être modifiés pour pouvoir accomplir une vraie mission de surveillance des déséquilibres mondiaux et des flux de capitaux.

Soucieux de montrer son sens du collectif, Nicolas Sarkozy a confié à la chancelière allemande, Angela Merkel, et au président mexicain, Felipe Calderon, la direction d'un groupe de travail sur les changes. Un rapport devrait être rendu lors du sommet du G20 à Cannes, en novembre.

Pour moraliser la planète finance et trouver de nouvelles ressources pour le développement, le président français a aussi proposé l'instauration d'une taxe sur les transactions financières. Il a toutefois admis qu'un tel projet, malgré le soutien de l'Allemagne et du Japon, comptait de " grands ennemis ".

Marie de Vergès

© 2011 SA Le Monde. Tous droits réservés.

0 commentaires: