Le vice-premier ministre chinois, Li Keqiang, a entamé hier une visite de trois jours en Espagne, pour manifester son soutien financier au pays. La Chine est déjà le plus important détenteur étranger de dette espagnole.
« Bienvenido Mr Li! » En parodiant le titre du grand classique du cinéaste Luis Berlanga (Bienvenue Mr Marshall, 1953), le journal économique Expansion illustrait, hier, les espoirs de l'Espagne. Ce n'est plus de Washington ni même de Bruxelles que Madrid attend son salut, mais d'un vice-premier ministre chinois, Li Keqiang, qui entamait hier une visite de trois jours en Espagne.
La veille de son arrivée, Li publiait une longue tribune dans le quotidien El Pais, dans laquelle il s'engageait à continuer d'acquérir la dette publique espagnole. Une excellente nouvelle pour Madrid, qui paie chaque mois des taux d'intérêt plus élevés pour se financer. En décembre 2010, les obligations à 10 ans ont trouvé preneur à 5,49 % et celles à 15 ans à 5,97 %. Des taux inédits depuis l'an 2000.
La Chine tire un double avantage de son investissement. D'une part, elle place ses excédents commerciaux à un taux rémunérateur, sans prendre de risques excessifs. L'Espagne et ses 4,1 millions de chômeurs sont certes très durement touchés par la crise, mais la dette publique plafonne à 57,7 % du PIB. D'autre part, Pékin, critiqué pour sa politique monétaire, fait valoir sa capacité à stabiliser l'économie européenne. Après avoir soutenu les dettes de la Grèce et du Portugal, les Chinois se montrent disposés à aider l'Espagne.
Reste à savoir quel sera l'impact de ces achats sur les marchés, alors que le Trésor espagnol doit émettre cette année 192 milliards d'euros. La Chine détient actuellement 43 milliards de dette espagnole, soit 10 % des titres en circulation, contre seulement 5 milliards il y a deux ans. On ignore tout des quantités de dette que la Chine serait prête à racheter : Li se montre très discret sur le sujet.
Importants contrats
Après ses conversations prévues hier avec la ministre de l'Économie, Elena Salgado, il doit rencontrer aujourd'hui le président du gouvernement, José Luis Rodriguez Zapatero, ainsi que le roi Juan Carlos; des entretiens où la presse n'est pas conviée.
Stratégique financièrement, la visite de Li sera également l'occasion de signer d'importants contrats. L'énergie, les transports, le tourisme ou encore l'industrie agroalimentaire sont les secteurs qui intéressent le plus Pékin. « Plusieurs milliards d'euros » sont en jeu, selon l'ambassade chinoise.
Quel sera le prix de la générosité chinoise? Le gouvernement espagnol croit savoir que la Chine recherche un allié en Europe. « Ce rapprochement économique est un geste positif. Mais il ne doit pas se faire aux détriments des droits de l'homme ou de l'environnement », estime Richard Youngs, directeur exécutif du cercle de réflexion FIDE. Il est vrai que la passion soudaine de Pékin pour Madrid a de quoi surprendre.
Pour le moment, la relation entre les deux pays est ténue : l'Espagne ne représente que 1 % des investissements directs à l'étranger de la Chine. Un dernier risque existe dans ce rapprochement. « Il ne suffit pas de vendre des jambons à la Chine pour sortir de la crise. Les réformes en cours doivent être poursuivies pour construire un nouveau modèle économique », avertit Richard Youngs. « Mr Li » est le bienvenu, mais il ne résoudra pas à lui seul les problèmes structurels de l'économie espagnole.
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