Les Echos, no. 20862 - Marchés, jeudi, 3 février 2011, p. 35
Un mystérieux fonds, basé en Australie mais probablement lié au China Investment Corp., a acquis en quelques mois 2,1 % d'Hitachi, 1,6 % de Sony ou encore 1,7 % de MUFG.
Les courtiers japonais suivent avec beaucoup d'intérêt depuis quelques mois les mouvements sur la place de Tokyo du mystérieux fonds baptisé « SSBT OD 05 Omnibus China Treaty Fund ». La structure officiellement basée à Sydney, en Australie, a brutalement accéléré l'an dernier ses achats de titres des plus grands groupes cotés du pays.
Selon le « Nikkei Veritas », qui a tenté de recenser la chronologie de ces investissements depuis 2008, le fonds détiendrait désormais pour plus de 1.800 milliards de yens (16 milliards d'euros) d'actions des plus importantes entreprises nippones et compterait parmi les principaux actionnaires des géants Sony, Toshiba, Takeda Pharmaceuticals ou encore Panasonic.
D'après les calculs du Nikkei Veritas, il contrôlerait, par exemple, 2,1 % d'Hitachi, 1,7 % de Nomura Holdings ou 1,7 % du groupe financier Mitsubishi UFJ Financial Group dont il a acquis 104,8 milliards de yens de titres.
Un investisseur discret et passif
Les grands groupes japonais ne se sont pour l'instant pas alertés de cette montée en puissance et ont tous noté que le fonds était resté un investisseur discret et passif. Pour les analystes, cette stratégie confirmerait le lien entre l'Omnibus China Treaty Fund et le fonds souverain chinois China Investment Corp. (CIC).
Refroidi par l'effondrement, avec la crise financière de 2008, de la valeur de ses spectaculaires investissements dans les géants de la finance américaine (Blackstone, Morgan Stanley...), le CIC a opté depuis fin 2009 pour une politique plus prudente et décidé de diversifier au maximum ses acquisitions. Conscient des réticences de certains gouvernements, il a également toujours affirmé qu'il se contenterait, malgré son budget de 300 milliards de dollars, de prendre des parts minoritaires dans des entreprises étrangères et qu'il resterait un « investisseur passif de long terme ». Suivant cette ligne, il a acheté, ces dernières années, 1,1 % du premier groupe mondial de spiritueux, Diageo, 17,2 % du groupe minier canadien Teck Ressources ou encore 14,9 % du hong-kongais Noble.
Si le CIC avait montré jusqu'en 2009 peu d'intérêt pour le marché boursier japonais, ses cadres et certains de ses conseillers, parmi lesquels Taizo Nishimuro, l'ancien PDG de Toshiba, avaient publiquement pointé au printemps 2010 la relative sous-évaluation des titres de la Bourse de Tokyo. C'est à cette époque que les investissements du mystérieux Omnibus China Treaty Fund avaient commencé à bondir. « Les entrées de fonds chinois au Japon vont continuer de s'accélérer et les investissements japonais en Chine devraient eux aussi augmenter. C'est naturel », commentait, il y a quelques jours, Taizo Nishimuro.
Yann Rousseau
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