lundi 21 mars 2011

Avec K 11, Adrian Cheng veut marier shopping et art

Les Echos, no. 20894 - Compétences, lundi, 21 mars 2011, p. 15

Son grand-père avait fui le régime de Mao et créé Chow Tai Fook, devenu la première enseigne d'horlogerie-bijouterie en Chine avec plus de 1.000 magasins. Son père a élargi ses activités à l'immobilier, aux casinos, à l'hôtellerie de luxe à Londres et à Los Angeles. Comme d'autres héritiers de la troisième génération, Adrian Cheng aurait pu se contenter de dilapider une fortune estimée à plus de 5 milliards d'euros. Le diplômé de Harvard, passé chez Goldman Sachs et Credit Suisse, a préféré rejoindre la galaxie familiale. Après s'être fait les dents sur le repositionnement des grands magasins New World China, il invente K 11, nouveau concept de « shopping mall » faisant cohabiter galeries d'art, scènes de spectacle et boutiques.

Des artistes en résidence

On connaissait le mariage des genres, largement pratiqué par les marques de luxe qui sponsorisent les artistes et en tirent toutes sortes de bénéfices en termes d'image et de communication. K 11 (une référence « à la coexistence de la matière et du néant », dixit le groupe) est plus ambitieux. Se revendiquant lui-même artiste, le jeune homme (trente et un ans) fait le pari que les jeunes urbains chinois vont très vite passer du stade du luxe ostentatoire et « dur », à base de voitures de luxe et de grosses montres, à celui plus sophistiqué du luxe d'expérience privilégiant voyages, gastronomie ainsi que la contemplation d'oeuvres d'art ou la pratique de disciplines artistiques.

K 11 aura ainsi en résidence plusieurs artistes dont Adrian Cheng se chargera de vendre les oeuvres dans le cadre d'une fondation destinée à promouvoir les jeunes talents. Pour faire bonne mesure, il ajoute une touche d'écologie, puisque les « shopping malls » K 11 sont construits selon des normes et avec des matériaux plus respectueux de l'environnement. Ils se proposent aussi de faire renouer les habitants des mégalopoles chinoises avec la nature, par exemple en pratiquant le jardinage dans des microlopins installés en terrasses ou sur les toits des galeries marchandes.

« Notre démarche forme un tout », expliquait-il lors de son récent passage à Paris pendant la Fashion Week. Occasion pour lui de faire défiler de jeunes créateurs compatriotes et de repérer des marques françaises premium ou de luxe prêtes à tenter l'aventure du marché chinois en s'appuyant sur Luxba (Luxury by Adrian), sa propre société de distribution.

Le premier centre commercial K 11 a ouvert en 2009 à Honk Kong. Il compte 4 galeries d'art et une centaine de boutiques avec, disséminées dans les allées, une vingtaine de vitrines exposant des oeuvres ainsi que des scènes pour performances et spectacles vivants. L'idée pour les visiteurs, qu'ils soient touristes ou résidents, est d'alterner shopping et pauses « arty », sachant que les oeuvres sont elles aussi en vente. Après Hong Kong et Wuhan (dans le centre de la Chine), Shanghai aura son K 11 en 2012, encore plus vaste et plus luxueux. Au total, une dizaine d'ouvertures sont prévues dans les grandes villes de la façade orientale du pays, dont Pékin.

VALÉRIE LEBOUCQ

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