mercredi 30 mars 2011

Bruxelles obtient de Pékin un début de protection de ses produits régionaux

Les Echos, no. 20898 - International, vendredi, 25 mars 2011, p. 7

Roquefort ou saumon d'Ecosse contre thé Long Jing et porcelaines chinoises : les deux partenaires commerciaux sont désormais prêts à reconnaître et à protéger certaines de leurs productions.

Comment interdire la vente sur le territoire chinois de vins produits localement mais étiquetés « Tokay » ou de fromages autoproclamés « comté » mais affinés à des milliers de kilomètres du Jura ? La question est épineuse, car ces appellations ne sont pas des marques et ne peuvent donc pas être protégées par les moyens habituels. Pour y répondre, l'Union européenne a lancé avec Pékin, en 2006, un dialogue qui vient d'aboutir.

Le commissaire à l'Agriculture, le Roumain Dacian Ciolos (PHOTO), en visite en Chine, a en effet annoncé hier que la Chine et l'Union européenne s'étaient mis d'accord sur une liste de vingt indications géographiques (dix chinoises et dix européennes) qui seraient désormais reconnues comme telles dans les échanges bilatéraux. Côté européen, on trouve par exemple le pruneau d'Agen, le roquefort, le comté, le saumon d'Ecosse ou encore le cheddar. La Chine, elle, va protéger son thé Long Jing, certains fruits et des porcelaines. Mais l'objectif est bien d'étoffer ces deux listes, pour dépasser la centaine d'indications géographiques reconnues.

Boom des produits plus raffinés

La bataille est loin d'être anecdotique. En 2010, les exportations agroalimentaires de l'Europe vers la Chine ont augmenté de 50 % pour s'établir à 3,3 milliards d'euros. « En Chine, c'est la demande de produits élaborés qui augmente de façon exponentielle », note Dacian Ciolos. Plus riches, les Chinois veulent des produits plus raffinés : la consommation de vins et de spiritueux s'envole. Et les fromages ou les viandes connaissent un début de succès.

La question est de savoir si le processus lancé par Bruxelles va assez vite. Les producteurs de Bordeaux en doutent. Ils font partie de la délégation qui accompagne le commissaire en Chine, mais ils souhaitent négocier directement avec les autorités chinoises, à l'image de ce qu'a fait le groupement pour le cognac. Comme l'explique Georges Haushalter, qui préside leur conseil interprofessionnel, « le boom des ventes de bordeaux en Chine est allé si vite que nous étions loin d'imaginer en 2006 à quel point il serait nécessaire, aujourd'hui, de nous protéger ». Combien de fausses bouteilles de Bordeaux sur le sol chinois ? Il n'en a pas la moindre idée mais exhibe volontiers des photos de « Médoc » et autres « Saint-Emilion » made in China.

Gabriel Grésillon

© 2011 Les Echos. Tous droits réservés.

0 commentaires: