Avec 40 % des centrales nucléaires en construction dans le monde, la Chine est engagée dans un vaste programme d'équipement, qui doit doter le pays de près de 70 réacteurs d'ici à 2020, soit davantage que le Japon, contre 13 aujourd'hui. Si la catastrophe de la centrale de Fukushima n'a pas conduit à des débats ouverts sur les questions de sécurité du programme chinois - la presse semble avoir des consignes -, elle ne laisse pas non plus indifférent, dans un pays où les séismes sont nombreux, et où la population découvre les risques de l'énergie nucléaire.
Lors de la visite, dimanche 14 mars, dans un centre de recherche sur l'énergie nucléaire, Liu Tienan, chef du Bureau national de l'énergie, a ainsi encouragé à prendre en compte " les leçons de l'incident nucléaire japonais et faire en sorte que l'industrie nucléaire chinoise se développe en toute sûreté dans un esprit responsable ".
La trentaine de réacteurs en construction, pour la plupart similaires aux réacteurs français de seconde génération, sont situés dans des régions côtières. La morphologie du plateau continental chinois et des côtes, protégées par un arc d'îles, les expose moins à des tsunamis que l'archipel nippon. " Il n'y a pas eu de grandes catastrophes sur les côtes chinoises, mais on est toutefois dans une période sismique très active et il faut davantage envisager des désastres extrêmes ", estime le géologue Yang Yong, de Chengdu, qui préconise de prendre un compte plus sérieusement les risques liés à la proximité de l'océan, comme les typhons.
A terme, la plupart des provinces chinoises vont s'équiper en centrales. Le lourd passif chinois en matière d'incidents industriels incite à s'interroger sur les risques encourus. En 2009, la frénésie de construction des centrales nucléaires chinoises avait conduit Liu Ganjie, directeur de l'Administration nationale chinoise de sûreté nucléaire (NNSA), au sein du ministère de l'environnement, à s'alarmer de " l'expansion trop rapide du secteur, qui risque de menacer la qualité de la construction et la sûreté de l'opération des centrales ". La même année, le grand patron du nucléaire chinois, Kang Rixin, tombait pour corruption.
" On n'est pas en URSS "
Formé en France, Liu Ganjie a le rang de vice-ministre de l'environnement. " On n'est pas en URSS, la NNSA est, en Chine, une vraie autorité de sûreté, elle a un mandat très fort, alors qu'il n'y a pas d'autorité de supervision dans les secteurs industriels classiques, comme la pétrochimie. Liu Ganjie a très bien joué son rôle de frein ", signale un expert français du nucléaire à Pékin.
Ainsi, le chantier des réacteurs EPR de Taishan, construits par Areva, a été suspendu pendant trois mois après son inauguration, en 2010, pour des questions de conformité des procédures administratives. Trois ou quatre inspecteurs de la NNSA sont en permanence sur le site.
Brice Pedroletti
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