Les Echos, no. 20946 - Les Échos patrimoine, vendredi 3 juin 2011, p. 37
Plusieurs fois par an, des records de prix sont annoncés à Hong Kong dans l'art contemporain.
La chose est désormais habituelle : plusieurs fois par an sont annoncés des records de prix dans le marché de l'art asiatique. Le 22 mai dernier, la maison de vente chinoise Guardian a vendu pour l'équivalent de 40 millions d'euros une encre de Qi Baishi (1864-1957), un peintre moderne calligraphe représentant « Un aigle posé sur un pin ». Dimanche dernier lors des enchères consacrées à l'art contemporain asiatique de Christie's Hong Kong, pas moins de 12 records de prix pour des artistes chinois ont été enregistrés. « Désormais le marché des ventes aux enchères en Asie représente 23 % de la part mondiale dépassant ainsi New York et Londres, contre 14 % en 2009 », dit François Curiel, le patron de Christie's à Hong Kong.
Il faut compter avec l'Asie et... les artistes asiatiques. Dans cette course aux transactions, la Chine représente un eldorado pour les opérateurs et Hong Kong sa place avancée. L'ancienne colonie britannique bénéficie de réglementations plus libérales que celle de Chine continentale et, entre autres, la ville est un port franc. Elle subit une censure très modérée par rapport à Pékin et à Shanghai, et attire des visiteurs de tout le Sud-Est asiatique.
C'est aussi à Hong Kong que s'est tenue pour la onzième fois une foire d'art contemporain, du 26 au 29 mai. La manifestation organisée par des Britanniques a été rachetée il y a quelques jours à peine par les organisateurs de la foire la plus respectée au monde, la foire de Bâle (« Les Echos » du 15 avril) : 260 participants cette année contre 100 à peine en 2008. Avec des galeries leaders comme la « multinationale » Gagosian mais encore White Cube de Londres, la galerie de Damien Hirst-Perrotin de Paris - représentant de Murakami -ou Pace de New York, elle attire des poids lourds de l'art occidental.
Peu de collectionneurs en Chine
Mais, voilà, tous les galeristes chinois, comme Xin Dong Cheng de Pékin ou Katie de Tilly à Hong Kong, sont catégoriques : il existe très peu de collectionneurs en Chine. « Le marché n'est pas encore mature ici, remarque Xin Dong Cheng. Les records sont enregistrés pour des oeuvres "classiques". Rares sont les collectionneurs à acheter par goût et implication personnelle. » Les motivations principales des acheteurs d'art actuel en Chine tiennent au prestige social qu'apporte l'art contemporain mais encore à une démarche spéculative ou simplement d'investissement, alors que le gouvernement chinois tente de freiner la spéculation immobilière. Un professionnel raconte, par exemple, qu'un homme d'affaires d'origine chinoise qui a fait fortune dans le commerce du poulet lui a confié avoir acquis pour l'équivalent de 8 millions de dollars d'oeuvres d'art occidentales depuis le début de l'année. Jusqu'alors, il achetait plutôt de jeunes artistes chinois. Mais cela constitue une exception. Les Chinois qui achètent de l'art se tournent en priorité vers l'art chinois. L'une des grandes stars actuelles est le peintre Zeng Fanzhi (né en 1964), qui a représenté très tôt la société chinoise comme une comédie, affublant, entre autres, ses personnages de masques. En 2008 à Hong Kong, une de ses peintures du genre, datée de 1996, a été adjugée pour le prix record de 5,4 millions d'euros, soit 8,5 millions de dollars. A la foire de Hong Kong, la galerie Acquavella de New York proposait une de ses peintures datée de 2005 pour 5 millions de dollars. A l'heure actuelle, l'artiste est aussi au centre d'un vif désir de la part des opérateurs du marché de l'art occidental.
Promesses de nouveaux riches
La galerie Gagosian, qui possède depuis quelques mois une succursale à Hong Kong, pourrait signer un contrat d'exclusivité - hors Chine continentale -avec l'artiste. Le collectionneur, homme d'affaires et propriétaire de la maison de vente Christie's, François Pinault, ne cache pas son admiration pour le peintre qu'il qualifie de « Pollock du XXIe siècle ». C'est d'ailleurs sous l'égide de sa fondation qu'était organisée à Hong Kong dans le même lieu que la foire et que les ventes aux enchères d'art contemporain de Christie's, le Centre des conventions, une exposition consacrée aux nouvelles peintures de l'artiste, qui n'étaient pas à vendre. Parmi les visiteurs de la foire il y avait un contingent de nouvelles fortunes minières du Shan Xi, étrangers à toute culture artistique. L'une d'elles a même débarqué en proclamant : « Quelle est la plus importante oeuvre de la foire ? Je voudrais l'acheter. »
Reste à savoir si les nouveaux riches chinois tiennent leurs promesses... Car, globalement, les participants à la foire avaient très peu vendu durant cette édition 2011.
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