La Croix, no. 38989 - Monde, lundi 6 juin 2011
La Chine a annoncé qu'elle accédera aux demandes de la jeunesse mongole. Cette minorité proteste contre la surexploitation des ressources par les Han, l'ethnie majoritaire.
Suite aux manifestations qui ont secoué la semaine dernière la Mongolie intérieure, Pékin vient de lancer une réforme de l'industrie minière dans la région autonome chinoise. Selon l'agence Chine nouvelle, quatre compagnies minières sont déjà fermées définitivement tandis que 34 autres le sont temporairement. Une victoire provisoire pour la minorité ethnique mongole qui, à l'instar des minorités ouïgoures et tibétaines, réclame le respect de leurs droits et de leur culture par les Han, l'ethnie majoritaire en Chine.
D'une ampleur sans précédent, les manifestations ont commencé lundi 23 mai, quand plusieurs centaines de Mongols sont descendus dans les rues pour protester contre la mort d'un berger. La victime avait été écrasée par un véhicule conduit par un Han, alors qu'il tentait avec d'autres Mongols d'empêcher des camions de transporter du charbon.
Depuis quelques années, la Mongolie intérieure connaît de fortes tensions entre les Han et les Mongols. Avec son sol riche en charbon, la région représente aussi 95 % des ressources chinoises en terres rares - un groupe de métaux très recherchés. Sous l'impulsion de Pékin, les Han ont développé sur les sols de la Mongolie intérieure une importante activité minière, dont l'une des conséquences est de détruire les pâturages des bergers mongols.
« Non seulement l'exploitation de ces ressources naturelles ne profite pas aux Mongols mais en plus elle menace leur mode de vie traditionnel », souligne Didier Chaudet, spécialiste de l'Asie centrale. Pour cet enseignant à Sciences-Po Paris, les manifestations en Mongolie intérieure doivent être analysées à travers la grille de lecture qu'offrent les précédents tibétains et ouïgours, deux minorités ethniques qui ont mené un soulèvement populaire durement réprimé par la Chine en 2008 et 2009.
« Comme les Tibétains et les Ouïgours, les Mongols ont très peur de voir leur culture disparaître devant la marée humaine des Han. Car, malgré une illusion de multi ethnicité, ce sont les Han qui possèdent les manettes du pouvoir. Aux yeux des minorités, les Han se comportent avec eux comme des colonisateurs avec des colonisés », explique Didier Chaudet.
Pour ce spécialiste, les risques d'un embrasement de la Mongolie intérieure restent cependant minimes. Les Mongols ne sont que cinq millions contre ving-cinq millions de Han en Mongolie intérieure et presque un milliard à l'échelle de la Chine. « Vu le rapport de force, continuer les manifestations va être difficile, analyse-t-il. Mais on risque de voir se créer des groupuscules terroristes mongols, comme cela a été le cas avec les Ouïgours ». Ultranationaliste, le mouvement Dayar Mongol (Tout Mongol) basé en Mongolie indépendante, professe déjà un racisme antichinois.
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