lundi 19 septembre 2011

En Asie, les déboires des États de la zone euro sont examinés à la loupe

La Tribune (France), no. 4810 - L'événement, lundi 19 septembre 2011, p. 3

Destination d'une large part des exportations asiatiques, en particulier chinoises, l'Europe inquiète l'Asie, notamment l'impuissance de ses dirigeants à résoudre la crise.

Que ce soit dans les panels, les tables-rondes officielles ou simplement dans les couloirs lors d'une conversation entre deux chefs d'entreprise, c'est bien la crise de l'euro qui a dominé le sommet d'été du World Economic Forum d'Asie à Dalian.

" On ne parle que de ça ici. Quelle direction va prendre l'Europe? Qui a le leadership? Il y a une véritable inquiétude sur le manque de lignes directrices claires, d'ambition partagée sur le long terme. Vues d'ici, les mesures sont perçues comme prises au jour le jour ", explique André Loesekrug-Pietri, président de A Capital, le principal fonds d'investissement entre l'Europe et la Chine.

Cet entrepreneur français résume bien en quelques mots le sentiment qui a prédominé dans les conversations lors des réunions mais aussi dans les couloirs : l'Europe est empêtrée dans une crise qui s'est déclenchée il y a presque deux ans, et qu'elle est impuissante à résoudre. Cette préoccupation faisait également partie des messages clés délivrés par le Premier ministre chinois Wen Jiabao dans son discours d'ouverture du Forum. Il a réclamé à deux reprises que l'Europe et les États-Unis mettent leur maison en bon ordre.

Fait remarquable, les chefs d'entreprises et les analystes s'interrogent d'ailleurs davantage sur le fonctionnement des institutions européennes que sur l'économie de la zone euro qui demeure à leurs yeux dans bien des domaines plus solide que celle des États-Unis. Le Vieux Continent reste, aux yeux des pays asiatiques, surtout de la Chine, un acteur commercial vital dont la technologie et le savoir-faire sont primordiaux pour la poursuite de son développement.

" Nous savons ce qui doit être fait. Mais le processus politique rend les réformes très difficiles. Les inquiétudes sont bien présentes. Il ne reste plus de temps ", s'alarme ainsi Victor Chu, PDG de First Investment Group, et gourou célèbre du monde des affaires à Hong Kong.

Quant aux solutions proposées, on sait ici qu'elles dépendent davantage de la capacité de l'Europe à améliorer ses réformes structurelles que de ses nombreuses déclarations de rhétorique qui restent lettre morte, comme le montre la réaction des marchés financiers.

Même l'ancien Premier ministre britannique Gordon Brown, invité au Forum, s'est montré lui aussi très sombre : " Sans une coordination mondiale, je prévois dix ans de croissance faible, des niveaux très élevés de chômage et un échec de coopération qui mènera finalement à un plus large protectionnisme ", s'est-il alarmé. Aussi, face au risque de crise systémique, le rôle de la Chine comme futur moteur de la croissance mondiale était-il très commenté à Dalian. Une telle locomotive peut en effet contribuer à tirer la croissance européenne.

" Au cours des quinze prochaines années, 60 % de la population chinoise disposera d'un revenu annuel supérieur à 20.000 dollars. Cela représentera un marché énorme pour toute entreprise ", explique Jing Ullrich, directrice chez JP Morgan qui compte parmi les meilleures analystes de l'économie de la république populaire.

Virginie Mangin

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