mercredi 28 septembre 2011

L'Oréal tente de détrôner Procter & Gamble dans les cosmétiques en Chine

La Tribune (France), no. 4816 - Industrie & services, mardi 27 septembre 2011, p. 8

Le groupe français, qui vient de dépasser le milliard d'euros de chiffre d'affaires dans le pays, explique à " La Tribune " comment il compte dépasser l'américain.

Moins épaisse et colorée mais plus hydratante qu'ailleurs, la BB Cream signée Maybelline est depuis quelques mois devenue un phénomène de mode en Chine. C'est devenu la nouvelle cash machine de L'Oréal dans le pays. " Nous écoulons un tube toutes les trois secondes ", détaille à " La Tribune " le nouveau directeur général de la filiale depuis un an, Alexis Perakis. Comme le gel anti-brillance de L'Oréal Men Expert ou le shampoing sec L'Oréal Professionnel, ce produit a été conçu par des Chinois, pour des Chinois et en Chine. " Ces dix dernières années, nous avons vendu en Chine ce que nous avions conçu ailleurs, dans les dix prochaines, nos produits seront invented in China ", explique le directeur général. Son objectif affiché est clair : rattraper son retard sur le concurrent Procter&Gamble et prendre sa place de numéro un des cosmétiques dans l'ex-empire du Milieu. Le leader mondial est déjà bien parti. Son chiffre d'affaires, supérieur à 1 milliard d'euros en 2010, progresse de 17 % depuis le début de l'année sur un marché à + 12 %. Et sa part de marché est passée en un an de 11,4 % à 13 % quand celle de Procter chute de 19 % à 17 % (*).

Arrivée dans le pays en 1996, soit plus de cinq ans après l'entreprise américaine, L'Oréal est déjà leader en maquillage et en soins. " Le français progresse de 21 % sur un marché des soins de la peau en hausse de 13 %, et a du coup battu Procter et sa marque Olay depuis trois ans ", précise la spécialiste des cosmétiques chez Euromonitor, Oru Mohiuddin. Procter & Gamble, de son côté, continue d'attaquer tous les segments de marché et garde une franche longueur d'avance dans le shampoing, avec 36 % des ventes, contre 4 % pour son suiveur.

Course à l'implantation

Mais pour le moment, les deux peuvent encore gagner de nouveaux consommateurs sans avoir à se les chaparder. " Sur les 120 millions de membres de la classe moyenne, la moitié des foyers a déjà utilisé nos produits; nous misons sur une forte accélération de cette classe moyenne et de notre taux de pénétration auprès d'elle ", rappelle Alexis Perakis. Afin de les conquérir, L'Oréal s'engage dans une course à l'implantation dans 600 villes secondaires, dont la moitié compte plus de 1 million d'habitants. Pour ses marques de luxe, telles que Lancôme, Yves Saint Laurent ou Armani, le groupe ouvre des comptoirs dans les grands magasins, comme récemment près du barrage des Trois-Gorges, dans la 85e ville de Chine. Pour les produits plus grand public (Garnier, L'Oréal, Maybelline), il monte des partenariats avec des distributeurs locaux, qui font pour elle la tournée des " cosmetic stores " (parapharmacie). Enfin, pour la marque Khiel's, introduite mi-2009 et déjà 5e marque de luxe du pays, l'entreprise teste de nouveaux réseaux en ouvrant des boutiques dans les centres commerciaux comme celui de la place du peuple à Pékin. " C'est son expérience de la distribution et sa spécialisation sur les seuls cosmétiques qui fait aussi le succès de L'Oréal ", commente Oru Mohiuddin. Désormais, les équipes marketing ayant rejoint celles de recherche dans des " hub " locaux afin de répondre au besoins spécifiques des Chinois, les réunions sont souvent décentralisées dans ces villes secondaires, avec des visites programmées dans les magasins et chez les consommateurs.

Juste retour des choses, les produits qui marchent à Chongqing ou Xian reviennent désormais vers l'Europe, à l'image de la BB Cream. Elle sort en ce moment en France et dans toute l'Europe de l'Ouest sous la marque Garnier.

(*) Chiffres qui ne comprennent pas les segments rasage et dentaire.

Par Sophie Lécluse

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