Le pouvoir chinois vit cette semaine sa rentrée économique et sociale la plus difficile depuis vingt ans. Après la fin officielle, hier matin, des vacances du Nouvel An chinois, les salariés doivent réintégrer, aujourd'hui, leurs entreprises. Mais beaucoup risquent de prendre brutalement la mesure du ralentissement économique du pays. Touchées par l'effondrement de la demande en Occident et par la frilosité des consommateurs chinois, des centaines de milliers de PME privées, spécialisées dans des productions à faible valeur ajoutée, risquent de ne pas rouvrir leurs portes dans les jours qui viennent. « En Chine, la tradition veut que les petites entreprises payent toutes leurs factures et leurs fournisseurs avant le Nouvel An. Elles ont alors un bilan exact de l'état de leurs finances. Beaucoup vont prendre peur et les licenciements massifs vont se multiplier », explique le directeur d'un groupe d'export du Guangdong, la province la plus riche de Chine.
Dépit des jeunes diplômés
Après avoir annoncé une croissance limitée à 6,8 % au dernier trimestre, les autorités s'inquiètent particulièrement d'une explosion du taux de chômage des « mingong », ces 150 millions d'ouvriers migrants qui, après avoir passé leurs congés annuels en famille, espèrent retrouver leurs usines, leurs restaurants et les grands chantiers de construction de la côte est. « Cette année, près de 20 % d'entre eux pourraient décider de ne pas revenir et de rester à la campagne en attendant la fin de la crise », explique Chen Xin, un chercheur de l'Académie des sciences sociales. « Mais les autres vont venir réintégrer leur emploi ou tenter d'en trouver un autre. » Pékin redoute que des millions de licenciés, très peu protégés socialement, ne décident de retourner leur déception contre les autorités locales. Des émeutes sont déjà recensées tous les jours dans le sud du pays. Si elle n'est pas organisée politiquement, la colère de cette masse ouvrière viendrait s'ajouter au mécontentement des classes moyennes et au dépit des jeunes diplômés peinant à décrocher une première place.
A l'orée du vingtième anniversaire de la répression des manifestations de la place Tiananmen (juin 1989), ce grondement social a poussé Pékin à multiplier les mesures de relance et les promesses d'aide aux chômeurs. Dans la province du Guangdong, des entreprises ont directement négocié un apaisement avec leurs employés. « Elles ont tenu un discours de vérité sur la chute de la demande et ont organisé un allongement des congés du Nouvel An. Les employés ne touchent pas de salaire mais une aide de 10 yuans (90 centimes d'euros) par jour pour rester vivre à la campagne », explique Eddie Leung, le président de l'association des investisseurs étrangers de Dongguan.
YANN ROUSSEAU
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