lundi 20 avril 2009

Paris et Pékin mettent fin à leur brouille commerciale - Arnaud Rodier

Le Figaro, no. 20131 - Le Figaro Économie, lundi, 20 avril 2009, p. 21

La France est de nouveau bienvenue dans l'empire du Milieu.

Après la réconciliation politique entre Nicolas Sarkozy et Hu Jintao au G20 de Londres, les entreprises françaises sont de nouveau les bienvenues dans l'empire du Milieu. Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État au Commerce extérieur, assiste au Forum de Boao, le « Davos chinois ».

LE GOUVERNEMENT n'a pas perdu de temps pour mettre à profit la poignée de main entre les présidents Nicolas Sarkozy et Hu Jintao, lors du G20 de Londres, le 1er avril dernier. La veille, la France avait reconnu, dans un communiqué, qu'elle récusait « tout soutien à l'indépendance du Tibet sous quelque forme que ce soit ». Le geste mettait fin à une brouille franco-chinoise qui durait depuis près d'un an et le passage de la flamme des Jeux olympiques 2008 à Paris.

Quinze jours après ces retrouvailles, la France dépêche sa secrétaire d'État au Commerce extérieur, Anne-Marie Idrac, en Chine. Le Forum de Boao n'est qu'un prétexte. Mais le premier ministre Wen Jiabao y participe. Et la tournée du ministre est soigneusement ciblée : Shenzhen pour le nucléaire et le réacteur EPR, Tianjin pour l'aéronautique et l'Airbus A 320 assemblé en Chine, Pékin pour le nucléaire encore et la conférence interministérielle de l'AIEA (Agence internationale pour l'énergie atomique).

Les grands chantiers du plan de relance

En Chine les « guangxi », les relations, sont la clé des affaires. Et si le vice-maire de Shenzhen, une ville de 12 millions d'habitants construite en trente ans, semble plus porté sur les chiffres que sur la politique, il ne laisse pas passer cinq minutes avant de dire à la ministre française qu'il se « félicite de cette première visite depuis la rencontre du G20 qui représente un symbole significatif ». Beaucoup plus direct, Wang Yang, secrétaire du Parti de la province du Guangdong, lancera de son côté : « Les relations commerciales entre la France et la Chine sont bien rétablies ! »

Nicolas Legrand, directeur de Sanofi Pasteur à Shenzhen, où le groupe a un projet d'usine de production d'insuline de 1 milliard d'euros et prépare une grande étude sur le diabète, véritable fléau en Chine, assure, comme la quasi-totalité des Français, qu'il a continué à travailler normalement pendant la crise entre Paris et Pékin. Mais au plus fort du boycott de Carrefour, un diplomate se rappelle que des menaces physiques ont été envoyées par Internet. Et les entreprises avouent qu'il était souvent difficile d'obtenir un rendez-vous avec les fonctionnaires dont elles avaient besoin.

Tout pourrait donc changer. « Les voyants sont au vert », se réjouit un conseiller de la ministre française. Zhang Xiao Qiang, vice-président de la Commission nationale de la réforme et du développement, a promis à Anne-Marie Idrac, en marge du Forum de Boao, que la France était la bienvenue pour participer aux grands chantiers du plan de relance chinois de 460 milliards de dollars annoncé en novembre 2008. « C'est un nouveau départ », lui a-t-il dit.

Mais Paris ne devra pas nourrir d'illusions, Pékin ne lui fera pas de cadeau. Ainsi, le secrétaire du Parti du Guangdong, qui pilote un vaste programme ferroviaire dans le delta de la rivière des Perles, souligne-t-il que « la France est techniquement très avancée, mais un peu plus chère que les autres ». Avant d'ajouter : « Nous voulons aussi des transferts de technologie pour créer des emplois. »

Fin juin, la Chine procédera à la « prise de béton » de la centrale EPR de Taishan, près de Shenzhen. La secrétaire d'État y est invitée. Elle-même a convié Wang Yang à voir le chantier de Flamanville. « Aucun de mes interlocuteurs n'a regardé en arrière. Tous se sont montrés positifs », affirme-t-elle.

Le ministère du Commerce va prochainement envoyer une mission d'acheteurs chinois en France, comme il l'avait fait en février en Europe. Les diplomates n'ont qu'une peur : qu'elle ne rapporte pas autant que les 6 milliards de dollars que l'Allemagne avait récoltés.

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