Trois jours seulement avant le début du procès de ses quatre employés de Shanghai, Rio Tinto a annoncé un accord non engageant avec le holding chinois Chinalco en vue de la constitution d'une coentreprise dans le minerai de fer en Guinée.
Après plus de neuf mois de sérieuse brouille, le numéro trois mondial des mines par la capitalisation boursière, Rio Tinto, resserre ses relations industrielles avec le holding étatique chinois Chinalco, son principal actionnaire avec 9 % du capital. Ce dernier s'était senti humilié début juin 2009 quand Rio Tinto avait mis brutalement fin au projet de partenariat stratégique entre les deux groupes pour marier son minerai de fer australien avec celui de son concurrent, BHP Billiton. La réaction de Pékin avait été rageuse et s'était soldée par l'emprisonnement de quatre représentants du groupe minier anglo-australien basés à Shanghai. Leur procès débute aujourd'hui.
Avec un agencement temporel qui ne doit rien au hasard, vendredi, les deux entreprises ont annoncé la création d'une coentreprise pour exploiter le gisement riche en minerai de fer de Simandou, en Guinée. Aux termes de l'accord non engageant, Rio Tinto, qui détient 95 % du projet, cédera à Chinalco une participation de 44,65 %. En échange, le chinois va investir 1,35 milliard de dollars en deux ans pour la finalisation du site minier et de la logistique liée. En toute hypothèse, des entreprises de l'ancien empire du Milieu contribueront à la construction du complexe minier et notamment de ses infrastructures. Le transfert de propriété se fera seulement après que Chinalco aura déboursé l'intégralité de cette somme, précise Rio Tinto. Le groupe risque par ailleurs de perdre à terme la majorité conservée de 50,35 % de Simandou en cas d'exercice par le gouvernement guinéen de son option de rachat d'une part du gisement pouvant aller jusqu'à 20 %.
La transaction avec les Chinois a permis de débloquer un dossier enlisé depuis décembre 2009, quand le régime de Conakry avait vendu la moitié nord du dépôt à BSG Resources, une firme du milliardaire israélien Benny Steinmetz. Jusqu'à présent, Rio Tinto a dépensé dans Simandou plus de 600 millions de dollars en exploration et en évaluation.
2,2 milliards de tonnes
Localisé dans le sud-est de la Guinée, ce gisement est le plus riche au monde des dépôts non exploités de minerai de fer avec ses 2,2 milliards de tonnes de ressources en minerai contenant 66 % de fer. Plus de 1.000 personnes y travaillent actuellement, mais, une fois démarrés les travaux de construction proprement dits, il générera des dizaines de milliers d'emplois, y compris dans ses infrastructures ferroviaires et portuaires. Quand la mine ouvrira ses portes, elle comptera plus de 4.000 travailleurs pour une production à plein régime estimée à plus de 70 millions de tonnes de minerai de fer par an. Au total, cet actif nécessite des investissements pour environ 12 milliards de dollars.
Il n'est cependant pas le principal chantier dans le minerai de fer de Rio Tinto. L'effort essentiel sera consenti pour l'expansion du bassin de Pilbara, en Australie occidentale, avec l'objectif affiché de livrer 330 millions de tonnes de minerai de fer. Le ticket d'entrée de Chinalco de 1,35 milliard de dollars est modéré eu égard aux capitaux qu'il faudra dépenser pour que les installations commencent à fonctionner : entre 5 et 6 milliards de dollars, d'après les dernières estimations de Rio Tinto. C'était le prix que Rio Tinto devait payer pour rétablir des relations normales avec son principal client, la Chine.
MASSIMO PRANDI
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