Pour étoffer sa gamme, l'électricien public étudie l'hypothèse du développement d'un réacteur de troisième génération de 1.000 mégawatts avec son partenaire chinois CGNPC, lequel serait concurrent de l'Atmea conçu par Areva et Mitsubishi.
Henri Proglio n'a pas fini de secouer la filière nucléaire française. Hier, le patron d'EDF a annoncé que la compagnie électrique voulait développer son propre réacteur de 1.000 mégawatts (MW). « EDF souhaite engager des études de développement d'un réacteur de 1.000 MW conçu à partir de l'expérience du parc français de 900 mégawatts qui a été un véritable succès », a-t-il déclaré devant la commission de l'économie du Sénat. Exploitant de centrales nucléaires, EDF est aussi, depuis des années, l'un des rares électriciens à concevoir lui-même certains de ses réacteurs.
Objectif avancé hier par Henri Proglio : disposer « d'une gamme diversifiée permettant de répondre aux besoins mondiaux et préparant sur le très long terme le renouvellement du parc français dans des conditions optimales de sûreté et de compétitivité ».
EDF affirme que plusieurs options sont ouvertes pour se doter d'un outil de moyenne puissance. L'une consiste à adopter le réacteur Atmea de 1.100 MW développé par Areva et son partenaire japonais Mitsubishi Heavy Industries. « Nos équipes travaillent dessus », souligne un dirigeant. L'autre, plus inattendue, vise à développer un réacteur avec son allié chinois CGNPC. « L'idée est de développer un réacteur de troisième génération sur la base du CPR-1000 », précise une source proche du dossier.
Ce produit chinois de deuxième génération a été conçu à partir du réacteur français de 900 MW de Framatome, importé par la Chine dans les années 1990. Développer la génération suivante permettrait à EDF et CGNPC d'aborder des marchés comme l'Afrique du Sud. Chez EDF, on préfère parler d'un réacteur « universel », sans nationalité.
L'Atmea certifié fin 2011
Henri Proglio avait l'intention de signer un protocole d'accord pour étudier ce codéveloppement avec CGNPC lors de la visite à Paris du président chinois, Hu Jintao, début novembre. Mais le projet a été bloqué la veille par l'Elysée. Sa signature aurait sans doute fait des vagues. Même si François Roussely, l'ancien patron d'EDF à qui Nicolas Sarkozy avait confié une mission sur la filière nucléaire, milite pour un tel développement, il ne manquerait pas de fragiliser Areva et son réacteur Atmea.
Selon la patronne du groupe Anne Lauvergeon, celui-ci sera certifié « aux alentours de l'automne 2011 » par l'Autorité de sûreté nucléaire française. Areva et GDF Suez veulent notamment proposer l'Atmea en Jordanie, qui attend des offres en janvier pour son programme nucléaire. La réflexion d'EDF portant sur l'étude d'un réacteur potentiellement concurrent au moment où Areva est en train de conclure son augmentation de capital a sans doute joué un rôle dans la décision de l'Elysée.
EDF ne veut pas seulement travailler avec les Chinois, même si c'est avec eux que le patron de la production et de l'ingénierie, Hervé Machenaud, entretient les relations les plus étroites. Henri Proglio envisage également de coopérer avec le russe Rosatom autour de ses réacteurs VVER. Il compte enfin sur l'EPR de 1.600 MW d'Areva, qu'il souhaite optimiser à partir du retour d'expérience des chantiers en cours.
THIBAUT MADELIN
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