La secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, a reçu, mercredi 11 mars, à Washington, son homologue chinois, Yang Jiechi, alors qu'un incident naval sino-américain en mer de Chine et les vives condamnations de la " répression " au Tibet par le Congrès américain ont quelque peu alourdi le climat entre les deux pays.
La Chine et les Etats-Unis sont cependant engagés dans une phase de rapprochement sur les dossiers cruciaux, tels l'Iran et la Corée du Nord, voire le changement climatique, et ni Washington ni Pékin ne tiennent à voir dérailler leurs efforts. A propos de l'incident naval, qui a vu cinq navires chinois poursuivre un navire de la marine américaine dans les eaux internationales en fin de semaine dernière, Mme Clinton a affirmé que les deux pays allaient s'efforcer d'éviter que de pareils incidents se reproduisent et oeuvrer pour que ce dernier en date " n'ait pas des conséquences imprévues ". Elle s'est déclarée " satisfaite " de l'accord intervenu avec M. Yang.
Selon la version donnée par le Pentagone, le bâtiment américain, l'USNS-Impeccable, qui était dépourvu d'armement, a été harcelé par cinq bateaux chinois, dont l'un s'est approché à moins de huit mètres au cours d'une " dangereuse " manoeuvre d'intimidation. Le département américain de la défense a protesté contre ce " harcèlement, l'Impeccable croisant en toute légalité dans les eaux internationales ".
Côté chinois, la réponse a été particulièrement virulente, le porte-parole du ministère des affaires étrangères, Ma Zhaoxu, répliquant que les affirmations américaines étaient " totalement inexactes " et soutenant que le bâtiment de la marine des Etats-Unis avait " violé les lois internationales et les réglementations chinoises ". " La Chine, a-t-il ajouté, demande que les Etats-Unis mettent fin à de telles activités. " Interrogé par des journalistes, à Pékin, ce même porte-parole a refusé de spécifier quelles lois internationales, au juste, l'Impeccable avait violées.
Ce navire américain est un bateau équipé de systèmes sonars perfectionnés. Il est spécialisé dans le repérage en profondeur des sous-marins. Sa présence, à quelque 120 kilomètres au sud de l'île chinoise de Hainan, au large des côtes vietnamiennes, n'est sans doute pas étrangère au fait que les Chinois sont en train de bâtir leur plus grande base de sous-marins sur cette île, rapporte la presse hongkongaise.
L'incident s'inscrit dans le contexte plus large d'une compétition sino-américaine dans la région, où Washington, analysent les spécialistes, entend répondre au défi représenté par la montée en puissance de la marine chinoise et montrer à ses alliés régionaux en Asie de l'Est (Taïwan, Japon, Corée du Sud) que les Etats-Unis sont capables d'assurer leur sécurité.
L'arrivée du ministre chinois à Washington, le jour même du 50e anniversaire du soulèvement manqué de Lhassa, ne pouvait, par ailleurs, être absente des conversations entre la secrétaire d'Etat et son homologue. L'engagement de l'administration Obama dans la défense des droits de l'homme à travers le monde " ne fait aucun doute ", a déclaré Mme Clinton.
Après que la Chambre des représentants a adopté, mardi, à la quasi-unanimité, une " résolution de soutien au peuple tibétain ", Pékin a vertement réagi, prévenant les Etats-Unis que cela pourrait entraîner une détérioration des relations entre les deux pays.
Le ministre chinois devait être reçu par Barack Obama jeudi, honneur qui n'a pas été réservé jusqu'à présent aux ministres de passage à Washington. La partie américaine attache manifestement beaucoup d'importance à prendre un bon départ avec Pékin. Le président américain devrait nommer sous peu un envoyé spécial pour le Darfour, dossier pour lequel il souhaite infléchir l'intransigeance chinoise.
L'envoyé spécial de Mme Clinton pour la Corée du Nord, alliée de la Chine, le diplomate Stephen Bosworth, est rentré bredouille de sa première tournée dans la région, alors que, a souligné la secrétaire d'Etat, il se tenait prêt à se rendre " sur-le-champ " à Pyongyang. Même si les Nord-Coréens procèdent à un tir de missile, comme l'intention le leur en est prêtée, les Etats-Unis continuent de réclamer une réunion du groupe des Six (Russie, Chine, Etats-Unis, Japon et les deux Corées), dans le but de dénucléariser la péninsule coréenne. Mme Clinton a déclaré à ce sujet que la Chine et les Etats-Unis sont " unis " pour s'opposer à tout lancement de missiles par la Corée du Nord et se sont mis d'accord pour discuter des réponses à apporter, le cas échéant.
PHOTO - Yang Jiechi et Hillary Clinton, 11 mars 2009, Washington / REUTERS
Bruno Philip et Corine Lesnes
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