La Corée du Sud a officiellement accusé, jeudi 20 mai, le Nord d'avoir torpillé la corvette Cheonan coulée le 26 mars en mer Jaune, entraînant la mort de 46 marins. Jusqu'à présent, tout en indiquant que de sérieux soupçons pesaient sur le régime de Pyongyang, le gouvernement sud-coréen s'était abstenu de mettre en cause celui-ci, attendant les conclusions des experts internationaux (américains, australiens, britanniques et suédois) chargés d'établir les causes du naufrage. " Les preuves conduisent de manière accablante à la conclusion que la torpille a été tirée par un sous-marin nord-coréen ", estime l'équipe d'enquête dans son rapport : " Il n'y aucune autre explication possible ", conclut-elle.
L'accusation de torpillage de l'unité navale sud-coréenne, acte de guerre entre deux pays en situation d'armistice depuis 1953, attise la tension dans la péninsule et ouvre une crise diplomatique impliquant principalement la Chine et les Etats-Unis.
Une visite de Mme Clinton
Séoul, qui a écarté des représailles militaires afin d'éviter une dangereuse escalade, entend saisir le Conseil de sécurité des Nations unies et appeler ses alliés à renforcer les sanctions à l'encontre la République populaire démocratique de Corée (RPDC). Celle-ci nie toute implication dans ce naufrage et a qualifié les résultats de l'enquête d'" affabulations ". La Commission de défense nationale, l'organe suprême du régime, a demandé que les conclusions de l'enquête soient examinées avec des experts nord-coréens dans le cadre de la Commission militaire d'armistice.
La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, est attendue à Séoul le 26 mai, après des visites à Tokyo et à Pékin. Selon Washington, qui a fermement condamné " l'acte d'agression " de Pyongyang, le naufrage sera au centre des entretiens de Mme Clinton en Chine. Pékin, qui a reçu début mai le dirigeant nord-coréen, a appelé, jeudi, à la " retenue " après les accusations portées à l'encontre de Pyongyang.
Le voyage de Mme Clinton a pour but de " mettre en place un ensemble de réponses aux conclusions de l'enquête sur le naufrage ", a déclaré Kurt Campbell, le secrétaire d'Etat américain adjoint. La coopération de la Chine est essentielle dans toute action concertée à l'égard de la RPDC.
Ce torpillage, fait-on valoir à Séoul, est " la plus grave provocation de la RPDC " depuis l'explosion en vol d'un appareil civil de Korean Air en 1987 (115 morts). Comme dans le cas du Cheonan, la RPDC avait nié toute implication. Ce naufrage est intervenu au cours d'une mission de routine au large de l'île Baengnyeong, une zone sensible en raison de la non-reconnaissance par Pyongyang de la ligne de démarcation entre les deux pays et théâtre d'affrontements navals meurtriers en 1999, 2002 et en novembre 2009.
Depuis l'arrivée au pouvoir en 2008 du président de centre droit, Lee Myung-bak, qui a mis fin à la politique d'ouverture en direction du Nord de ses prédécesseurs, la tension entre les deux Corées n'a cessé de s'attiser.
Philippe Pons
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