Les prix du thé ont flambé dans le monde ces deux dernières années, après avoir systématiquement baissé pendant un quart de siècle. Les aléas climatiques ont fait craindre une pénurie.
Depuis deux ans, le marché du thé bout à gros bouillons et cela pourrait bien durer. « En 2010, le consommateur va payer le thé plus cher que jamais », pronostique Philippe Chalmin, directeur de « Cyclope », l'ouvrage annuel spécialisé dans les marchés mondiaux et les matières premières. Après avoir baissé de 25 % en un quart de siècle, pour le plus grand profit des groupes agroalimentaires faisant commerce de thé, les prix à la production ont flambé depuis 2007. Ils ont plus que doublé en deux ans.
Des épisodes climatiques malheureux, sécheresse dans certains pays, inondations dans d'autres, voire les deux successivement, ont notablement réduit la production, créant ainsi une forte tension sur les principaux marchés aux enchères : Mombasa au Kenya, Colombo au Sri Lanka et Calcutta en Inde. La moitié du thé mondial s'y échange. La crainte de la pénurie y est née sur ces trois places, où les cours servant de référence mondiale ont atteint leurs plus hauts niveaux depuis des années. A Mombasa, où s'échangent les plus gros volumes, on n'avait pas enregistré de tels records en vingt-cinq ans, si bien que les recettes liées aux ventes de thé ont progressé de 11 %, à 69 milliards de shillings kenyans (712 millions d'euros), malgré la baisse des quantités exportées, indique l'édition 2010 de « Cyclope ».
Unilever, numéro un avec Lipton
Avec le retour de conditions climatiques plus favorables en 2010, la forte hausse de la production kenyane, les tensions ont commencé à baisser sur les marchés. Les prix sont un peu redescendus de leurs sommets. A Monbasa, le kilo de thé se négocie actuellement autour de 2,4 dollars, contre plus de 3,6 dollars en fin d'année dernière. Mais la faiblesse des stocks et les trois années nécessaires à un théier pour entrer en production continuent à soutenir les cours.
Les multinationales dominent ce marché mondial du thé, estimé à 25 milliards de dollars. En tête, l'anglo-néerlandais Unilever avec la marque Lipton et l'anglais Associated British Food (ABF), dont la marque emblématique est Twinings of London. Unilever contrôle environ 15 % du marché mondial, ABF 6 %. Dilmah, le seul producteur et négociant sri-lankais, revendique la troisième place, avec un chiffre d'affaires de 500 millions de dollars, au coude-à-coude avec l'indien Tata qui possède la marque Tetley.
L'essor du marché, qui incite Nestlé à entrer aujourd'hui dans la danse, a aussi poussé Dilmah à se lancer récemment en France. Le groupe familial a pénétré dans la restauration et de l'hôtellerie française en 2009, avec l'objectif de se développer à terme dans les linéaires des grandes surfaces. Les marges de progrès de la consommation sont énormes. Un Français consomme 250 grammes de thé par an quand un Anglais en boit l'équivalent de 3 kilos, un Russe ou un Polonais, 1 kilo.
Cueilli à la main
Merrill Fernando, fondateur et PDG de Dilmah, affirme réaliser des marges supérieures de 40 % à ses concurrents grâce à une qualité haut de gamme. Il ne propose que des thés « monocépage », pur Ceylan, pur Chine, pur Inde_ à la différence des multinationales qui ont fait leur fortune avec des assemblages. Son thé est cueilli à la main, transformé dans la journée et conditionné à Colombo alors que la plupart des thés sont emballés loin des lieux de récolte, perdant ainsi une partie de leur arôme.
A côté des multinationales, on trouve de nombreuses maisons proposant des thés haut de gamme, tels que Mariage Frères, George Canon, les frères Dammann rachetés par le groupe de café italien Illy, etc.
MARIE-JOSEE COUGARD
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