dimanche 30 novembre 2008

Le second scandale des " frégates de Taïwan " - Roland-Pierre Paringaux

Le Monde diplomatique - Novembre 2008, p. 10

Non-lieu après des années d'enquête
Secret d'Etat, meurtre et corruption, ce qu'il est convenu d'appeler : l'" affaire des frégates de Taïwan ", qui défraie la chronique politico-judiciaire depuis des années, s'est terminé piteusement, le 1er octobre, par un non-lieu. Une fin amère pour la justice française, mandatée pour rechercher la vérité, mais paralysée par un recours systématique au secret-défense et par les interférences politiques. Mais une fin qui n'en est pas tout à fait une pour ce feuilleton à rebondissements digne d'un roman de série noire. Reste, en effet, à traiter un coûteux contentieux financier. Qui va payer une addition que l'on chiffre en centaines de millions d'euros ? Thales, ex-Thomson, ou l'Etat français, à qui Taïwan réclame devant un tribunal arbitral plus de 1 milliard de dollars pour rupture de contrat ?

Et si l'Etat français est condamné, qui réglera in fine les millions de l'amende, sinon le contribuable français ? Enfin, que vont faire les autorités judiciaires suisses, à qui M. Andrew Wang, intermédiaire attitré de la société Thomson et personnage central de toute cette affaire, exige la restitution des 500 millions de dollars de commissions gelés, en 2001, par la justice helvétique ?

Le premier épisode de l'affaire des frégates de Taïwan a lieu vers la fin des années 1980. A l'époque, la tension reste forte entre les dirigeants de Taïpeh et ceux de Pékin, qui revendiquent la souveraineté sur Taïwan. Ce qui n'empêche pas les Taïwanais, lancés dans une course aux armements permanente face à la Chine, de manifester leur intérêt pour des navires de surveillance français de type F3000 - les fameuses frégates. Mais aussi pour d'autres matériels militaires fabriqués par la France : avions, sous-marins, missiles.

Une délégation officielle française se rend à Taïwan, des représentants de la marine taïwanaise visitent des chantiers navals en France. Bientôt, les deux parties tombent d'accord. Pilotée très officiellement côté français par la direction de la construction navale (DCN), l'affaire est sur le point d'aboutir lorsque le président François Mitterrand, soucieux de ne pas provoquer Pékin - qui voit d'un mauvais oeil les négociations officielles avec Taïwan, surtout en matière d'armements - , oppose son veto. Touché. Début 1990, le gouvernement français retire l'autorisation d'exportation. Coulé. La bataille navale semble bel et bien terminée. Pourtant, les deux parties demeurent intéressées. Alors, pour conclure malgré tout, on va affubler ce marché d'un faux nez. Le faire passer de la sphère publique à la sphère privée.

Naissance de l'opération " Bravo "

Un des participants résumera ainsi ce tour de passe-passe : " Tous les protagonistes ont compris qu'il fallait agir de sorte que l'Etat français n'apparaisse pas, et éviter que ce contrat passe pour une provocation à l'égard de la Chine. " En 1991, les parties prenantes du marché des frégates sont donc modifiées de manière à faire figurer des parties privées en qualité de contractants : Thomson, groupe international d'électronique et des systèmes de défense, est substitué à la DCN, et la China Shipbuilding Corporation (CSBC) prend la place de l'Etat taïwanais.

Lorsque cette réorganisation intervient, il y a déjà plusieurs années que le groupe Thomson, dirigé (entre 1982 et 1996) par M. Alain Gomez, s'intéresse aux marchés, essentiellement civils, de Taïwan. Selon un rapport interne de l'époque, face à une concurrence américaine, allemande mais aussi coréenne, " le montant des projets identifiés est de l'ordre de plusieurs milliards de dollars. Le groupe Thomson considère la République de Chine (Taïwan) comme un objectif et un partenaire tout à fait stratégiques dans le contexte actuel. Thomson-CSF, électronique professionnelle, a la volonté de s'engager dans la voie de la coopération technologique par le biais de transferts de technologie et la production locale, et de réaliser les investissements correspondants. D'ores et déjà, le groupe Thomson va affirmer sa présence dans ce pays par l'ouverture d'une représentation permanente ". A la fin des années 1980, plusieurs documents attestent l'importance que revêt le projet de vente des frégates non seulement pour Thomson mais aussi pour l'industrie française de l'armement en général.

Les négociations reprennent sur cette base nouvelle. Elles aboutissent, le 31 août 1991, à la signature d'un contrat de vente de six bâtiments de type frégate, modèle " La Fayette ", pour un montant fixé à cette date à 2 525 692 731 dollars, soit 1,6 milliard d'euros (1) - contrat conclu entre Taïwan représentée par CSBC, un chantier naval, qui est l'émanation de la marine taïwanaise, et la société Thomson-CSF, agissant en chef de file d'une offre proposée par Thomson, la DCN et la direction de la construction navale internationale (DCNI).

Ce contrat et les négociations qui l'ont précédé constituent l'opération " Bravo ", dans laquelle les dirigeants et agents de Thomson dans la région se sont fortement impliqués. Particularité, l'article 18 du contrat interdit le recours à tout intermédiaire extérieur et à toute commission. Il précise également les conséquences juridiques du non-respect de ces dispositions contractuelles - par exemple l'annulation du contrat par l'acquéreur, en l'occurrence Taïwan.

Pourtant, il apparaît bientôt que la signature de ce juteux contrat a été précédée de tractations au cours desquelles plusieurs réseaux d'influence semblent avoir été activés par la société Thomson afin d'en favoriser la conclusion. Le plus important, le réseau DD, correspond à un certain M. Andrew Wang. Agissant essentiellement à Taïwan, celui-ci est un intermédiaire attitré de Thomson depuis les années 1970 et un proche de M. Gomez. Un autre réseau est animé par Mme Lily Liu, une femme bien en cour dans les milieux dirigeants de la Chine populaire. Dans les années qui suivent la signature du contrat, plusieurs éléments laissent supposer que l'intervention de ces réseaux, et plus particulièrement de celui de M. Wang, a pu donner lieu à des infractions pénales.

En effet, le 20 juin 2001, date-clé dans cette affaire, l'autorité judiciaire suisse informe la justice française de l'existence d'" importantes commissions " sans doute liées au contrat des frégates. Des commissions qui se trouvent dans le système bancaire helvétique depuis dix ans ! La note suisse attribue à M. Wang la mission de les distribuer à divers protagonistes, et notamment à des fonctionnaires taïwanais bien placés. A l'époque, elle évalue ses avoirs, répartis sur plusieurs dizaines de comptes bancaires suisses, à plus de 100 millions de dollars.

Ces révélations sont confortées par les propos de l'ancien ministre français des affaires étrangères, M. Roland Dumas, qui affirme avoir été informé de rétro- commissions (2). Sur la base de ces éléments, une information judiciaire est ouverte, le 22 juin 2001, à Paris, sous les chefs d'abus de biens sociaux et de recel commis à l'occasion de la conclusion du contrat. Deux magistrats, M. Renaud Van Ruymbeke et Mme Xavière Simeoni, sont chargés de l'enquête.

Peu après, la société Thales, qui a remplacé Thomson-CSF en mai 1998, se constitue partie civile. Le 26 août, Taïwan entreprend la même démarche. Ce qui est déclaré irrecevable par la cour d'appel de Paris. Mais Taïwan profite de l'occasion pour dénoncer le versement de commissions prohibées par le contrat " Bravo ", et indique qu'elle a engagé, le 22 août 2001, une procédure en arbitrage portant sur 599 millions de dollars de dommages et intérêts. Thales ne conteste pas l'existence de cette procédure - sur laquelle Taïpeh s'appuie, aujourd'hui encore, pour réclamer une compensation. L'information judiciaire a eu pour objet d'identifier d'éventuelles rétrocommissions, seules susceptibles de caractériser des infractions pénales sous la qualification d'abus de biens sociaux. Et les suspicions de rétrocommissions ont mis essentiellement en cause le réseau Wang.

De façon générale, l'importance des commissions versées à l'occasion d'un contrat constitue un élément rendant vraisemblable l'existence de rétrocommissions. Et les autorités helvétiques ont été les premières à attirer l'attention des Français sur le montant des sommes saisies dans les banques suisses sur des comptes détenus directement ou indirectement par M. Wang dans le cadre du projet " Bravo " (lire l'encadré ci-contre). Par ailleurs, en avril 1991, une note du cabinet du premier ministre français Michel Rocard évaluait le coût total de la vente des frégates à 1,9 milliard d'euros. Or, en fin de compte, le contrat portera sur un montant supérieur à 2,4 milliards d'euros. Soit une différence de 500 millions d'euros.

Côté Thomson-Thales, on a peine à expliquer cet écart troublant. Entendu par les magistrats, M. Gomez se contente d'un : " Pas de commentaire. " Mais alors, qui a bénéficié de cette somme considérable : des dirigeants communistes à Pékin, des partisans du Guomindang (le parti alors au pouvoir à Taïwan) ou encore des politiciens français à Paris ? Les uns et les autres ? Les spéculations concernant de possibles reversements en France ont été nombreuses, on s'en doute. Ainsi, en 2006, l'ancien ministre socialiste de la défense Alain Richard, se fondant sur des " sources dignes de foi ", a-t-il laissé entendre qu'une partie des commissions étaient destinées à être reversées dans l'Hexagone. Mais, au bout du compte, rien de vraiment concluant. Reste, comme l'a remarqué un dirigeant de Thomson, que " si les décideurs ont accepté ce supplément de prix, c'est qu'ils y trouvaient leur intérêt par le retour d'une partie des commissions ".

Faux passeports pour M. Wang

Ce point de vue est partagé par les autorités taïwanaises : pour elles, l'augmentation du coût global de la vente serait en réalité la contrepartie d'un système de corruption qui se serait notamment exercé, via M. Wang, en faveur de représentants de la marine taïwanaise. Ces mêmes autorités ont aussi accusé l'intermédiaire privilégié de Thomson d'avoir corrompu un haut fonctionnaire, M. Kuo Li-han, condamné depuis, pour son rôle dans cette affaire, à la prison à vie. Un autre officier de la marine taïwanaise, Yin Ching-feng, chargé du dossier " Bravo ", a été assassiné en décembre 1993 (" lire ").

M. Kuo a été arrêté le 17 décembre 1993. Trois jours plus tard, M. Wang quittait précipitamment Taïwan avec sa famille. Un mandat d'arrêt international était lancé contre lui pour corruption, violation du secret militaire et homicide volontaire. L'enquête a montré que M. Wang et sa famille avaient bénéficié de faux passeports obtenus par l'intermédiaire de Thomson et de M. Gomez - ce que ce dernier n'a pas nié. Elle a également démontré qu'après son départ de Taïwan il était resté en contact avec Thomson. Plusieurs domiciles, aux Etats-Unis, à Londres et à Paris, ont rendu sa recherche difficile. En mars 2005, M. Van Ruymbeke a lancé des mandats contre MM. Wang père et fils pour recel d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Thomson, devenue Thales (3).

Les investigations, à commencer par celles qu'a diligentées la justice suisse, ont permis de rassembler un faisceau d'éléments convergents établissant que M. Wang a dirigé un réseau d'influence agissant pour le compte de Thomson. A ce titre, lui et plusieurs membres de sa famille ont été les destinataires de fonds pour un montant évalué par l'autorité judiciaire suisse à environ 500 millions de dollars (320 millions d'euros).

Côté français, les investigations judiciaires menées à Taïwan établissent l'existence de faits de corruption impliquant le réseau de M. Wang. Cependant, le volume des commissions est tel qu'elles ne sauraient se limiter à la seule corruption d'agents étrangers à Taïwan et à Pékin. Plusieurs éléments attestent qu'une partie de ces fonds (les fameuses rétrocommissions) était destinée à d'autres bénéficiaires. Mais lesquels ? Toutes les enquêtes entreprises pour les identifier sont restées d'autant plus vaines qu'elles se sont systématiquement heurtées au secret-défense pour toutes sortes de documents : contrats de commission, déclarations en douane, relevés bancaires, fichiers, données informatiques, etc. Selon les autorités de tutelle, la déclassification de ces documents serait " de nature à nuire de la façon la plus grave aux intérêts fondamentaux de la nation ainsi qu'au respect des engagements extérieurs du pays ".

Retour à la case départ

Le verrouillage fonctionne comme suit, en quatre temps : le 8 avril 2002, les magistrats instructeurs saisissent le ministre de l'économie et des finances pour qu'il procède à la déclassification des contrats de commission de Thomson-Thales. Ils font valoir que le contrat " Bravo " a été versé à la procédure sans que soit invoquée une quelconque protection, et aussi que leur demande ne vise aucun secret militaire puisqu'elle concerne exclusivement des commissions ayant pour finalité de corrompre des décideurs taïwanais. Par courrier du 17 avril, le ministre de l'économie d'alors, M. Laurent Fabius, annonce qu'il a saisi la commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN) pour avis. Le 6 juin, la commission rend une décision défavorable. Par courrier du 19 juin, le ministre indique qu'il se conforme à la conclusion de la CCSDN, et donc qu'il refuse la déclassification.

Les magistrats instructeurs n'ont donc, sauf exception, jamais eu accès aux documents dont ils avaient sollicité la communication et qui étaient indispensables à l'établissement de la vérité. Les ministres de l'économie et des finances, qu'ils soient de droite ou de gauche (MM. Fabius, Francis Mer et Thierry Breton), s'y sont systématiquement opposés, tout en s'abritant derrière les avis de la CCSDN. Par ailleurs, les investigations concernant les cadres et dirigeants de Thomson-Thales sont, pour l'essentiel, restées vaines et les perquisitions infructueuses. Dans ces conditions, le non-lieu requis au bénéfice de M. Wang, de son fils Bruno et d'un dirigeant de Thomson, M. Jean-Claude Desjeux, n'est pas une surprise. Ce pied de nez à la justice française ne permet cependant pas pour autant de clore l'affaire.

" On revient, en quelque sorte, à la case départ, lorsque les Suisses ont introduit les Français dans l'affaire, en juin 2001 ", explique un magistrat. Aujourd'hui, les Français sont sur la touche ; c'est à la justice helvétique de reprendre la main. Le règlement dépend de ce qui va se passer avec les 320 millions d'euros des commissions. Pour le moment, ils demeurent bloqués, mais M. Wang les réclame par l'intermédiaire de ses avocats. Ils sont à lui. Côté français, il a gagné la partie avec le non-lieu. Il se bat maintenant contre Taïwan, qui veut également cet argent.

Si Taïwan récupère les fonds en question en Suisse, la procédure d'arbitrage s'arrêtera sans doute. Cela dégagerait d'autant la responsabilité de Thales et de l'Etat français. En revanche, si la Suisse rend les 320 millions d'euros à M. Wang, c'est l'Etat français qui pourrait être condamné par le tribunal arbitral à payer des sommes considérables. Un tel scénario serait profondément immoral. Recherché par la justice taïwanaise pour son rôle dans le meurtre de Yin, le corrupteur Wang récupérerait les 320 millions de commissions. Et, une fois de plus, le contribuable français paierait l'addition.

Roland-Pierre Paringaux

Note(s) :

(1) Frégate " La Fayette " : bâtiment de 3 600 tonnes, 125 mètres de long, avec 160 membres d'équipage et pourvu de missiles.
(2) Une rétrocommission est une commission officielle détournée de sa finalité initiale (ici le lobbying) pour bénéficier à des tiers qui n'étaient pas censés en profiter.
(3) Les magistrats instructeurs n'ont pas pu retenir contre M. Wang l'accusation de " corruption d'un agent public étranger " car la convention instituant ce délit est postérieure (septembre 2000) à la signature du contrat des frégates.

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EN IMAGES - Surviving in the monster - Chongqing par Alessandro Rizzi
















Mars 2008 à Chongqing par Alessandro Rizzi

Chongqing est placée sous le contrôle direct du gouvernement central et règne sur un territoire urbain et rural grand comme deux fois la Suisse et abritant... 32 millions de personnes. Elément clef de la stratégie dite du« Go West » initiée à la fin des années 1990, la cité, anciennement dépendante de la province du Sichuan, reçoit de massives aides économiques et des politiques d'investissement privilégiées. Son rayonnement doit, à terme, permettre de doper le développement des provinces centrales du pays, qui ont jusqu'ici peu profité d'une croissance essentiellement concentrée sur la côte est de la Chine. Pour encourager les entreprises à venir s'installer loin des traditionnels grands pôles, les autorités ont fait passer, sur le territoire de la municipalité, le nombre de kilomètres d'autoroute de 134 à 778 entre 1999 et 2006. La ville s'est également lancée dans la construction d'un nouveau port, le plus grand de tout le Yangzi.

Pour attirer les investissements étrangers, des politiques fiscales et des exemptions de TVA ont été proposées. Plusieurs multinationales se sont laissé séduire. Ford s'est installé avec Mazda et leur partenaire local Chang'An. L'allemand BASF planche sur la construction d'un nouveau complexe gazier près de la ville. Le français Carbone Lorraine a, lui, investi l'an dernier 40 millions d'euros dans une usine de production de graphite isostatique. En mars dernier, Lafarge a annoncé la construction d'une nouvelle cimenterie sur le site de YongChuan. Bruno Lafont, le PDG du groupe français, siège d'ailleurs au sein du prestigieux conseil du maire de Chongqing, une assemblée composée de 17 dirigeants de groupes occidentaux « aidant » le maire dans sa stratégie économique. Une fois par an, il y côtoie des représentants de HSBC, Hitachi, BP, Carrefour, Veolia ou encore Gérard Mestrallet, le PDG de Suez. Yann Rousseau

À CONSULTER AUSSI LA RUBRIQUE - Dernière image de Chine

VIDÉO - Zapping de Canal +



Canal + , samedi 29 novembre 2008

SUJETS : Le taux élevé de mélamine dans les tourteaux de soja et l'exécution de Wo Weihan.

Les entreprises françaises espèrent que la crise apaisera l'ire chinoise - Yann Rousseau

Les Echos, no. 20310 - International, vendredi, 28 novembre 2008, p. 8

Les appels au boycott d'entreprises françaises ont déjà repris sur les forums Internet chinois. Les entrepreneurs français estiment toutefois que Pékin, avec la crise, n'a pas intérêt à une détérioration trop vive des relations bilatérales.

Pékin pourrait prendre soin de ne pas se mettre à dos les grands distributeurs français : l'essentiel de leurs marchandises vient de Chine.

Très surpris par le spectaculaire coup de colère des autorités chinoises et l'annulation des déplacements du Premier ministre Wen Jiabao à Lyon et Paris (« Les Echos » du 27 novembre), les milieux d'affaires français tentaient, hier, de se rassurer et espéraient que la nouvelle dégradation des relations bilatérales ne dégénérerait pas avec la même violence qu'au printemps dernier. Furieux des commentaires de Nicolas Sarkozy sur la situation au Tibet, les internautes chinois, soutenus par un pouvoir communiste consentant, avaient organisé un boycott des produits et enseignes français.

Très présent dans le pays avec 120 magasins, Carrefour avait notamment cristallisé, pendant plusieurs semaines d'avril et de mai, les campagnes de dénigrement avant de voir ses ventes plonger.

Si les appels au boycott de produits français ont déjà repris sur les forums des portails chinois les plus populaires - ils sont pour l'instant moins nombreux qu'au printemps -, beaucoup de cadres d'entreprises hexagonales estimaient, hier, que l'aggravation de la situation économique mondiale pourrait pousser Pékin à désamorcer toute nouvelle campagne anti-française.

Grands importateurs européens

« La Chine est, elle aussi, inquiète pour sa croissance et n'a pas intérêt à se brouiller avec les acteurs économiques européens qui ont déjà dû limiter leurs importations de produits «made in China» », expliquait, hier, un expert. Pékin pourrait notamment prendre soin de ne pas se mettre à dos les grands distributeurs français dont l'essentiel de leurs marchandises provient de Chine. En outre, ils font vivre des centaines d'entreprises de la cote déjà violemment touchées par la baisse de la demande mondiale.

En début de semaine, les chancelleries chinoises d'Europe avaient d'ailleurs réuni, dans plusieurs capitales, les grands importateurs européens pour les appeler à ne pas freiner trop violemment leurs commandes de produits chinois dans les prochaines semaines.

Dans ce contexte économique déprimé, le courroux des autorités chinoises pourrait, cette fois, ne prendre qu'une dimension politique et se focaliser sur la personnalité de Nicolas Sarkozy. Hier, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères a ainsi tenu à expliquer que l'annulation du sommet Union européenne-Chine ne devait pas être perçue comme un geste d'irritation à l'égard des Vingt-Sept mais bien comme une réaction à la décision du chef de l'Etat français de rencontrer, le 6 décembre prochain, le dalaï-lama en Pologne.

YANN ROUSSEAU

Note(s) :

DE NOTRE CORRESPONDANT À PÉKIN.

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CENSURE - Guns N'Roses interdit en Chine

Le Temps, no. 3337 - Samedi culturel, samedi, 29 novembre 2008
La Chine ne veut pas du piteux dernier album de Guns N'Roses intitulé Chinese Democracy. Mais pour de mauvaises raisons puisqu'un quotidien officiel chinois y voit une attaque en règle contre l'Empire du Milieu. Incriminant la chanson-titre qui se réfère en fait au mouvement Falungong interdit en Chine. Chinese Democracy sera sans doute vendu sous le manteau en Chine, où la censure impose un contrôle strict sur la musique, les films et les publications.
PHOTO - Greg Baker

TV France - Les enfants de Yingzhou - Lundi 1 décembre à 16h55 sur ARTE

Le Monde - Supplément Télévision, lundi, 1 décembre 2008, p. TEL13

LUNDI - LES ENFANTS DE YINGZHOU

Ici, durant la saison froide, la terre et l'air sont imprégnés d'une humidité tenace. Nous sommes dans un village du district de Yingzhou, en Chine, 700 km à l'ouest de Shanghaï. Dans une grange délabrée, on distingue la frêle silhouette de Gao-Jun, 5 ans à peine. Hormis un voisin, personne ne s'occupe de lui. " Il y a beaucoup de méfiance et de rejet ", dit l'homme. Même ses enfants ne peuvent l'approcher, sinon plus personne ne voudra jouer avec eux. " Voilà où on en est ! "

Le père de Gao-Jun est mort du sida. Son grand-père, seul, l'a porté sur ses épaules pour aller l'incinérer. Sa mère a perdu la tête avant de décéder elle aussi. Accompagnant le cycle des saisons avec des images d'une grande rigueur formelle, la réalisatrice sino-américaine Ruby Yang a passé une année au côté de Gao-Jun, mais aussi de Nan-Nan, à peine plus âgée, également touchée par le virus.

" Tout ça, c'est à cause des prises de sang, se désespère une paysanne. Depuis onze ans, nous donnons notre sang. Ils nous donnent 53 yuans (6 euros) et un gâteau de riz pour deux poches de sang. On était si pauvres. " La collecte s'est faite à grande échelle. Après l'avoir mélangé pour en extraire le plasma, les autorités redistribuaient le reliquat aux donneurs. " Une seule personne pouvait en contaminer cinquante ", témoigne un homme. L'enfer de Gao-Jun et de Nan-Nan prendra momentanément fin. Le petit garçon est accueilli avec chaleur par la famille de Kai-Feng, séropositif depuis deux ans. Quant à Nan-Nan, un de ses oncles a fini par accepter de la prendre chez lui. " C'est l'affectif qui a pris le dessus ", dit-il.

Les enfants de Yingzhou, programmé dans le cadre d'une " Thema " lors de la journée mondiale de lutte contre le sida, a obtenu en 2007 l'Oscar du meilleur court métrage documentaire. Bouleversant.


ARTE
Lundi 1 décembre 2008
16:55 à 17:35

Mardi 2 décembre 2008
01:10 à 01:50

Jean-Jacques Larrochelle

PHOTO - Ruby Yang, la réalisatrice et Thomas Lennon, le producteur

(EU, 2006, 38 min).

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COUP DE COEUR - Le jongleur de nuages par Ysabelle Lacamp


Eté 1917. Le destin d'un des 140.000 Chinois qui vinrent travailler en France pendant la guerre 14-18. Parmi eux, Isaïe, le Chinois aux yeux clairs, l'un des derniers représentants de la petite communauté juive de Kaifeng. Isaïe dont la solitude va se laisser égayer par Marie, une gamine du bourg avec laquelle se tisse une complicité. Mais que l'on retrouve la fillette assassinée, et voilà l'étranger aussitôt désigné comme meurtrier. Commence alors la folle cavale jusqu'à Paris, capitale insouciante et folâtre qui préfère regarder la guerre de loin malgré ses émeutes ouvrières mais où se croisent aussi peuples opprimés et premières idées révolutionnaires. Le Jongleur de nuages

AUDIO - Le message chinois - Bernard Guetta

France Inter - Géopolitique, vendredi 28 novembre 2008


tilidom.com


Dommage mais tant pis. Il est dommage que la Chine ait décidé de reporter son sommet de lundi prochain avec l’Union européenne au motif que Nicolas Sarkozy, président de l’Union jusqu’à la fin décembre, rencontrera le dalaï lama dans huit jours à Gdansk. C’est dommage parce que le monde est en pleine crise économique, que cette récession montante frappe tous les pays sans exception et que cette situation exige plus de concertation internationale que jamais. C’est dommage parce que le président français, après avoir trop vite affirmé dans sa campagne électorale qu’il tiendrait la dragée haute aux dictatures, n’avait pas tardé à comprendre qu’un chef d’Etat ne peut pas ignorer le monde tel qu’il est, notamment pas une puissance de la taille chinoise, et qu’il avait donc adopté, dans la crise tibétaine, une voie médiane, d’abord trop tâtonnante mais, au bout du compte, équilibrée.

Il s’était abstenu de recevoir le dalaï lama avant les JO de Pékin, ce qui aurait été un geste de rupture inutile. Il avait finalement assisté à l’ouverture des Jeux après que les Chinois, comme il l’avait souhaité, eurent repris leurs conversations avec les représentants du prix Nobel de la paix. Il avait fait tout ce qu’il fallait pour ménager la Chine mais comme il n’avait, bien sûr, pas non plus à la laisser dicter sa conduite, il avait choisi la réception qu’offre Lech Walesa, la semaine prochaine, à l’occasion de l’anniversaire de son propre Nobel de la paix, pour rencontrer le chef spirituel des Tibétains, à bas bruit, en marge de cette rencontre de Gdansk.

Il est dommage que la Chine n’ait pas su apprécier cette volonté du président français de concilier les impératifs qui s’imposaient à lui mais, puisqu’elle n’en est apparemment pas capable, tant pis – tant pis pour tous et tant pis pour elle car Nicolas Sarkozy déshonorerait la France en cédant, maintenant, au chantage qui lui est fait.

Peut-être les Chinois ont-ils vu une faiblesse dans la volonté du président français de ne pas casser les ponts. Peut-être s’imaginent-ils qu’ils pourraient encore le faire renoncer à son rendez-vous de Gdansk mais ce serait tellement mal vu de leur part qu’on peine à le croire. Sans doute faut-il plutôt voir dans cet incident un message adressé non pas seulement aux Européens mais, surtout, au futur président américain. La croissance chinoise baisse. A 8% maintenant, elle vogue vers le niveau auquel la Chine sera confrontée à des difficultés économiques et sociales dont les signes avant-coureurs se multiplient. Dès le 20 janvier, la Chine sera, en plus, sommée par Barack Obama de cesser le dumping monétaire grâce auquel elle pousse ses exportations, de faire au moins un geste, et c’est une salve d’avertissement qu’elle vient de lui lancer là, en ciblant l’Europe, pour faire comprendre aux Etats-Unis que ses difficultés n’assoupliront pas ses positions.

Le message est clair. Fort de ses réserves en devises et du soutien qu’il apporte au dollar, le régime chinois se prépare à faire front mais il est autant dépendant de l’Amérique que l’inverse. Message ou pas, il devra bien chercher des compromis et renouer avec l’Europe. Alors, oui, dommage mais tant pis.

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samedi 29 novembre 2008

DÉPÊCHE - Agression d'un journaliste en Chine : la Belgique demande des explications

29.11.08 | 19h24
Le gouvernement belge veut des explications de la Chine après l'agression dans ce pays d'un journaliste de la télévision publique flamande VRT, selon un communiqué publié samedi par le ministère belge des Affaires étrangères.

"Le ministre (Karel de Gucht) a donné des instructions à notre ambassade pour demander des explications aux autorités chinoises et l'ambassadeur de Chine à Bruxelles sera invité au cabinet des Affaires Etrangères pour des explications", selon ce communiqué.

"La liberté de la presse est un des piliers des droits de l'homme et dans le cadre du fonctionnement de l'Etat de droit, il incombe aux autorités de garantir le respect de cette liberté et d'agir fermement contre la violence qui compromet cette liberté", souligne-t-il.

Selon la VRT, son correspondant en Chine Tom Van de Weghe a été agressé et volé jeudi par les autorités locales de la province du Henan, dans le centre de la Chine, où il faisait un reportage sur le sida.

"Nous ne sommes pas au stade de la protestation, mais de l'explication", a précisé à l'AFP un porte-parole du ministère, soulignant que le journaliste avait obtenu de Pékin les autorisations nécessaires.

Report de la finalisation d'une commande d'Airbus par la Chine

Le Monde - Economie, samedi, 29 novembre 2008, p. 14

Airbus a indiqué, jeudi 27 novembre, que la finalisation d'une commande de 150 avions signée en novembre 2007 par Pékin avait été reportée, mais n'était en aucun cas mise en danger, à la suite de l'annulation du sommet Chine-Union européenne prévu à Lyon, le 1er décembre.

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La Chine exécute un scientifique accusé d'espionnage

Libération, no. 8575 - Monde, samedi, 29 novembre 2008, p. 9

Les autorités chinoises ont exécuté vendredi matin Wo Weihan, un scientifique âgé de 59 ans et accusé d'espionnage au profit de Taiwan. Un acte condamné par les Etats-Unis et l'Autriche, qui y a vu un «affront prémédité» envers l'Union européenne. Les Vingt-Sept, ainsi que Washington, s'étaient en effet très fortement mobilisés pour le cas de ce biologiste dont les deux filles vivent en Autriche, soulignant les béances de l'accusation. Wo Weihan avait été arrêté en 2005 à Pékin sous l'accusation d'avoir transmis à Taipei des renseignements de nature militaire. Puis, il avait été condamné à mort en 2007 à l'issue d'un procès qui manquait de transparence, et au cours duquel n'avaient été avancées que des preuves vagues. La Chine est restée sourde aux appels à la clémence. «C'est un Chinois qui a été jugé selon les lois chinoises. Nous ne pouvons pas lui accorder de privilèges simplement parce qu'il a des proches qui sont étrangers», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Qin Gang.

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Ran Chen, right, and her sister Di Chen, left, speak about their father Wo Weihan - Greg Baker

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Bank of China va faire de la gestion privée en Suisse - Carole Papazian

Le Figaro, no. 20010 - Le Figaro Économie, samedi, 29 novembre 2008, p. 23

CERTAINES ANNONCES sont des symboles. Celle de Bank of China hier en est un. La quatrième banque chinoise détenue à 70 % par l'État chinois, qui compte plus de 200 millions de clients et 220 000 employés, vient en effet d'annoncer l'ouverture d'une filiale à Genève. Elle sera le premier établissement chinois à prendre pied en Suisse et elle va le faire sur le créneau de la gestion de fortune.

« Nous voulons offrir nos services à une clientèle chinoise non résidente et à une clientèle internationale », explique Jacques Mechelany, qui dirigera la banque en Suisse. La cible ? La clientèle très fortunée, « une clientèle qui devrait augmenter au fil des années au sein de la population chinoise », selon la banque.

En pleine crise financière et bancaire, Bank of China met en avant sa différence. « La banque est très liquide, les prêts ne représentent que 60 % de ses dépôts et nous nous appuyons sur une économie qui est l'une des seules du monde à rester en croissance », ajoute Jacques Mechelany. En dépit du ralentissement, la Chine table en effet sur une croissance de l'ordre de 8 % et le pays dispose de réserves de 2 000 milliards de dollars. « Le taux d'épargne des Chinois est de l'ordre de 40 % et la Chine est en train de vivre une mutation structurelle du même ordre que celle des États-Unis à la fin du XIX

siècle », estime Jacques Mechelany pour qui la banque dispose d'atouts de poids pour séduire une clientèle privée à la recherche de sécurité et de liquidité.

La banque ouvre aussi une société de gestion d'actifs, BOC Suisse Fund Management à destination des institutionnels. Là aussi en surfant sur la crise. « Les obligations chinoises, qu'elles soient publiques ou privées, vont intéresser les investisseurs internationaux tout comme les actions, compte tenu des taux de croissance attendus. Nous pouvons leur donner un accès privilégié à ces marchés », estime Jacques Mechelany.

Une soixantaine de personnes ont été recrutées pour la banque privée et la gestion d'actifs, mais pour l'instant la banque reste discrète sur ses objectifs en termes de capitaux ou de nombre de clients. Bank of China, qui veut devenir une marque de poids dans la gestion de fortune dans les cinq ans qui viennent, assure être là pour longtemps. « C'est une opération stratégique, ce qui compte ce n'est pas le montant des capitaux que nous gérerons demain, mais le fait de pouvoir acquérir une expertise. » Elle entend aussi être prête au moment où les Chinois auront plus de liberté pour placer leur argent hors de leurs frontières. Les résidents peuvent aujourd'hui avoir des comptes à l'étranger, mais les transferts sont limités à 50 000 dollars par an. À l'avenir, la réglementation devrait s'assouplir.

L'entrée chez Rothschild gelée

Mi-septembre, Bank of China avait déjà frappé un grand coup sur le marché français en annonçant son entrée au capital de La Compagnie financière Edmond de Rothschild à hauteur de 20 %. « Cet accord stratégique doit nous donner un accès privilégié au marché chinois de la gestion privée et de l'asset management en accompagnant là-bas Bank of China auprès de ses clients », explique Michel Cicurel, le président du directoire de la Compagnie financière Edmond de Rothschild. La Banque privée Edmond de Rothschild (70 milliards d'euros sous gestion), cotée à Genève et soeur de la Compagnie financière accueille avec sérénité l'arrivée de la banque chinoise en Suisse. « Le groupe est en forte croissance en Suisse, il va dégager un résultat 2008 équivalent à celui de l'an dernier », indique Michel Cicurel.

Le fait nouveau pour lui ne se situe pas à Genève, mais bien à Pékin. Face à la crise, les Chinois ont en effet gelé toutes les opérations en cours et la Compagnie financière est aujourd'hui dans l'expectative. « Le régulateur chinois, CBRC, a suspendu tous les agréments pour les investissements des banques chinoises dans les banques étrangères à cause de la crise. Nous n'avons pas besoin de capitaux et ce report ne remet pas en question notre santé financière, la Compagnie financière Edmond de Rothschild va très bien, précise Michel Cicurel, mais aujourd'hui nous ne savons pas si l'accord va se concrétiser. »

Papazian, Carole

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DERNIER CHIFFRE DE CHINE - 1 900 milliards de dollars de réserves de change

Marianne, no. 606 - Repères Monde, samedi, 29 novembre 2008, p. 52

1 900 milliards de dollars

C'est le montant colossal des réserves de change de la Chine, première créancière des Etats-Unis. Double hic : en plus de la dégringolade du pouvoir d'achat des ménages américains, grands consommateurs de produits chinois, la crise raréfie les investissements dans l'économie américaine pour le bailleur de fonds chinois.

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Premier vol réussi pour l'avion chinois ARJ 21-700 - Véronique Guillermard

Le Figaro, no. 20010 - Le Figaro Économie, samedi, 29 novembre 2008, p. 25

AÉRONAUTIQUE. Le premier avion régional commercial chinois, de 70 à 90 places, a effectué avec succès hier son premier vol dans la région de Shanghaï, où il est produit, a annoncé l'agence semi-officielle Nouvelles de Chine.

L'appareil, l'ARJ 21-700, a effectué un vol d'une heure. Son maniement a été apprécié du pilote, selon l'agence de presse chinoise. Le rayon d'action maximal de l'avion, dont le premier exemplaire est sorti de la chaîne d'assemblage voilà un an, atteint 3 700 kilomètres.

Le chef du Parti communiste chinois pour la Commercial Aircraft Corporation of China (COMAC), Hu Haiyin, a précisé que la Chine avait fabriqué six avions ARJ 21 jusqu'ici, et que chacun d'entre eux subissait actuellement des tests de vol. La Chine est capable de produire 20 jets ARJ 21 par an.

Avec ce premier appareil, la Chine franchit une étape qui vise à doter le pays de sa propre industrie aéronautique.

L'avion a déjà convaincu des investisseurs étrangers. Lors du récent salon aéronautique de Zhuhai, le loueur américain GECAS a passé une commande pour cinq avions et pris une option pour 20 appareils supplémentaires.

La valeur estimée du contrat tourne autour de 732 millions de dollars.

Guillermard, Véronique

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Polémique sur les prothèses dentaires importées de Chine

Le Figaro, no. 20010 - Le Figaro, samedi, 29 novembre 2008, p. 1

ENTRE 15 ET 30 % des prothèses dentaires vendues en France aux dentistes sont fabriquées à l'étranger, notamment en Chine. Ces « dents » importées ne font l'objet d'aucun contrôle sanitaire. Certains experts les accusent d'être plus fragiles. En réalité, aucune étude sérieuse, comparant les « fausses dents » fabriquées en France à celles produites à l'étranger, n'a été réalisée. Bientôt, chaque prothèse devra être accompagnée d'un certificat de mise en conformité. Les prothésistes français réclament, eux, que la prothèse soit facturée séparément de l'acte médical. Selon sa provenance, le dentiste paie la prothèse 30, 66, ou 115 euros. La pose de la couronne coûtera au patient entre 450 et 1 000 euros en moyenne.

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SCANDALE - Le soja chinois à la mélamine

Libération, no. 8575 - Eco-Terre, samedi, 29 novembre 2008, p. 20

Après le lait et les bonbons, le soja chinois à la mélamine, près de 300 tonnes de tourteaux de soja importés de Chine et destinés au secteur de la volaille bio du Grand Ouest français ont été retirées du marché après la découverte d'un taux de mélamine cinquante fois supérieur à la norme.

PHOTO - Champ de soja - Reuters

L'industrie française des lunettes face à la concurrence chinoise

Marianne, no. 606 - Magazine, samedi, 29 novembre 2008, p. 71

Dans le Jura, l'industrie lunetière traditionnelle oppose tant bien que mal son savoir-faire à la concurrence chinoise.

"C'est un travail très fin. Il ne faut surtout pas déborder. " Seringue de laque en main, pédale distributrice de peinture sous le pied, Marie s'applique à donner aux lunettes qui sortent des ateliers Jecor, à Morez, dans le Jura, la patte made in France qui fait leur différence. Laqueuse depuis vingt-cinq ans dans l'industrie lunetière morézienne, Marie, 41 ans, a eu entre ses mains habiles des centaines de milliers de paires de lunettes. Concentrée, elle dépose à l'aide d'une aiguille de minuscules gouttes de laque couleur argentée sur les branches. Fabienne, sa collègue, réalise avec la même précision et le même soin de petites fleurs dorées sur un modèle chocolat. " Il faut être minutieux et patient. C'est un métier qui ne peut pas être fait par une machine ", explique, avec une pointe de fierté, Marie. " Si les entreprises délocalisent, notre métier disparaît. En Chine, les laqueuses n'existent pas ", ajoute l'ouvrière, qui, comme beaucoup, a acquis sa technique " sur le tas "... dans des entreprises aujourd'hui disparues.

L'innovation technique et la valorisation des savoir-faire locaux, synonymes de qualité, ont sauvé une partie des industriels de la lunette. Deux particularités qui, selon un élu morézien, constituent " un ticket d'entrée sur les marchés, y compris pour le Sud-Est asiatique ". Les ateliers Jecor, en contrebas de Morez, au pied des montagnes, se sont fait une spécialité du traitement de surface. Les montures métalliques brutes en ressortent métamorphosées : classiques, d'une seule couleur, ou extravagantes, fluo à l'intérieur, mauve à l'extérieur, unies, bicolores ou tricolores, toutes sont peintes à la main. " Chaque mois, 55 000 pièces sortent de notre atelier. Toutes ont une valeur ajoutée ", se félicite le PDG de Jecor, Cyrille Cottez. Un art qui permet à l'entreprise de prospérer et de voir son chiffre d'affaires - plus de 3 millions d'euros - croître.

Retour de Chine

Le savoir-faire morézien, c'est aussi ce qui a poussé Daniel Arnaud et Jérôme Colin à créer en 1992 la société Oxibis, implantée à Morbier, à quelques kilomètres de Morez. A l'époque, le pari est osé, la tendance étant à la délocalisation. Mais les associés y croient et le marché leur donne rapidement raison. L'entreprise, qui emploie 60 personnes, produit aujourd'hui 400 000 paires de lunettes par an, pour un chiffre d'affaires de 24 millions d'euros, et travaille avec une vingtaine de sous-traitants, tous situés dans un rayon de 15 km. Soit plus de 120 emplois induits.

" Nous ne sommes pas les seuls à maintenir la filière lunetière, mais nous y participons ", sourit Daniel Arnaud. La jeune société a fait du made in France son label. " Ce sont des produits de plus en plus appréciés, constate l'ancien opticien. Les clients ont besoin de valoriser leur achat, d'être sécurisés, de savoir qu'il y a un service après-vente derrière. " Des qualités qu'offre la production française, haut de gamme, et qui séduisent les consommateurs, malgré des prix plus élevés. Les lunettes 100 % jurassiennes d'Oxibis se vendent en magasin de 130 à 400 . Un coût qui s'explique en grande partie par la production en local : une paire de lunettes jurassienne revient au moins à 30 pièce, soit deux fois plus cher qu'une production chinoise. " Il y a une vraie pression de la part des grands distributeurs pour que les coûts soient réduits. Ça pousse à la délocalisation ", poursuit le chef d'entreprise. Face à une concurrence chinoise omniprésente sur les marchés, difficile d'être serein.

" Le secteur est fragile, reconnaît Daniel Arnaud. Je ne peux pas me dire : dans dix ans, je fais encore du made in France. Si les entreprises disparaissent, les savoir-faire aussi. J'ai peur, un jour, de devoir partir à l'étranger parce qu'il n'y aura plus de producteurs ici ", ajoute-t-il, rappelant qu'en quelques décennies le nombre d'employés du secteur lunetier a fortement diminué dans le bassin, passant de 8 000 dans les années 80 à 3 200 aujourd'hui. Mais, ajoute Daniel Arnaud, avec l'aventure Oxibis, " nous prouvons qu'on peut continuer à travailler en France ". Ce modèle économique français, aussi appelé " capitalisme solidaire ", a séduit les opticiens Atol. " En 2003, nous voulions faire fabriquer une de nos collections dans la vallée de Morez ", se souvient Philippe Peyrard, directeur général délégué de la marque. Les entreprises moréziennes n'avaient alors pas répondu positivement, contraignant Atol à partir en Chine. Une délocalisation de courte durée puisque, deux ans plus tard, l'opticien passe un accord avec Oxibis et rapatrie sa collection " Ushuaïa " à Morbier.

Cette relocalisation a aussi un coût : " Sur les trois dernières années, nous estimons que le manque à gagner s'élève à 500 000 par an " pour 50 000 paires produites localement, à Morbier et aussi à Oyonnax, dans l'Ain. " La rentabilité va arriver progressivement ", espère Philippe Peyrard, qui se réjouit du succès annoncé de la dernière collection " Ushuaïa ", portée à l'écran par sa nouvelle égérie, Adriana Karembeu.

Dans la vallée morézienne, beaucoup n'y voient qu'un coup de pub, les quantités commandées restant faibles. Atol y croit et veut démontrer qu'il existe " une alternative économiquement profitable et éthiquement préférable à la délocalisation et à la destruction des valeurs et des emplois ". Une démarche citoyenne d'" économie responsable " que l'opticien tente de promouvoir au sein d'un Comité des entrepreneurs pour un développement responsable de l'économie (Cedre), créé en janvier 2008, qui entend démontrer que " ne plus fabriquer en France est une hérésie ".

PHOTO - "Le vieux Chiang voit-il la vie en rose ? pas sûr..." Wally Santana/AP

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Le bébé aux huit orteils en Chine : pollution ou mutation génétique ?

Marianne, no. 606 - Ils l'ont fait, samedi, 29 novembre 2008, p. 24

SACRÉ PIED ! - Et si la divinité dépendait du nombre d'orteils ?

Après le bébé aux deux visages, voici le bébé aux huit orteils à chaque pied ! A Leizhou, en Chine, une femme a mis au monde un petit garçon, le 5 novembre dernier, qui souffre de polydactylie. En plus de ses 16 orteils, le bébé a bien cinq doigts à chaque main, mais pas de pouces. Un médecin a avancé comme explication que cela pouvait provenir d'une mutation génétique ou de la pollution. Mais, au lieu de se poser des questions sur leur environnement, les habitants considèrent déjà ce bébé comme un dieu vivant ! Quelqu'un a compté les orteils de Jésus ?.

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Découverte en Chine d'une nouvelle espèce de tortue sans carapace

Le Soir 1E - SCIENCES SANTE, samedi, 29 novembre 2008, p. 18

Une nouvelle espèce de tortue datant de 220 millions d'années a été découverte dans le sud-ouest de la Chine et fournit des éléments essentiels sur l'évolution de la carapace et du corps de ces reptiles, rapporte une étude publiée dans Nature. Baptisée Odontochelys semistestacea, cette espèce, la plus primitive jamais mise au jour, révèle que ces animaux portaient des côtes sur leur dos et non pas une carapace. En revanche, ils avaient déjà sous le corps un plastron comparable à la plaque qui se trouve sous le corps des tortues actuelles. L'étude de ces fossiles « confirme la théorie selon laquelle la carapace se serait formée à partir de la colonne vertébrale et des côtes plutôt qu'en tant que plaques formées à partir de la peau », des ostéodermes, comme certains l'avaient envisagé à partir de l'exemple des crocodiles, explique le Pr Xiao-chun Wu, paléontologue à Ottawa. (Fr. So)

Illustration(s) : AFP

© Rossel & Cie S.A. - LE SOIR Bruxelles, 2008

jeudi 27 novembre 2008

VIDÉO - Bernard Kouchner réplique sur Canal, Interview sur la rencontre avec le Dalai Lama

Canal + 27 nov 2008, Le Grand Journal
Présentée par Michel Denisot, l'émission recevait Bernard Kouchner, le Ministre des Affaires étrangères, qui a réaffirmé que Nicolas Sarkozy rencontrerait le Dalai Lama, malgré les vives protestations de la part de Pékin, dont l'annulation de la participation au sommet Chine-UE prévue le 1er décembre 2008.

VIDÉO - Guignols de l'info - DALAI LAMA

Canal + 27 nov 2008, Guignols de l'info
PPDA reçoit le Dalai-Lama, le "Peace maker"

Le régime chinois veut imposer un rapport de force avec M. Sarkozy - Natalie Nougayrède

Le Monde - International, vendredi, 28 novembre 2008, p. 7

Dans une décision spectaculaire qui met en relief les tensions accumulées entre la Chine et la présidence de Nicolas Sarkozy, Pékin a décidé d'annuler un sommet prévu le 1er décembre à Lyon entre l'Union européenne (UE) et la Chine, en pleine crise financière mondiale, alors que chef de l'Etat français s'apprête, le 6 décembre, à rencontrer le dalaï-lama à Gdansk, en Pologne. Le report jusqu'à une date non spécifiée de ce sommet auquel devait assister le premier ministre chinois, Wen Jiabao, intervient après plusieurs mises en garde adressées par le régime chinois à Paris, ces dix derniers jours.

L'annonce impromptue par M. Sarkozy, le 13 novembre, lors d'un discours, qu'il aurait " l'occasion de voir " le dalaï-lama le 6 décembre à Gdansk, en Pologne (lors d'une réunion de Prix Nobel autour de Lech Walesa), ainsi que son commentaire selon lequel " les Tibétains n'ont pas à souffrir de la répression et ont le droit à la liberté ", seraient à l'origine de cette nouvelle détérioration dans la relation bilatérale. Les officiels chinois ont manifestement décidé d'en étendre les conséquences à l'ensemble de l'UE, présidée par la France, constatent des diplomates.

C'est de Bruxelles, et non de Paris, mercredi 26 novembre, qu'a été rendu public un communiqué annonçant l'annulation du sommet. La raison : l'Elysée, qui " regrette " la décision chinoise, et déclare " tenir plus que jamais au partenariat stratégique " avec Pékin, s'efforçait d'évacuer la dimension proprement franco-chinoise de cette déconvenue diplomatique, alors qu'un sommet bilatéral entre M. Sarkozy et Wen Jiabao était également prévu à Lyon. Les autorités chinoises, dit le communiqué, " ont motivé leur décision par le fait que le dalaï-lama effectuerait au même moment une nouvelle visite dans plusieurs pays de l'Union ". Le chef spirituel tibétain est attendu notamment à Bruxelles la semaine prochaine.

L'annulation du sommet a placé les Français dans l'embarras vis-à-vis de leurs partenaires européens, au moment où la Chine est plus que jamais courtisée pour une meilleure concertation internationale sur les questions financières. " Les enjeux sont importants. Nous sommes stupéfaits que les Français n'aient pas mieux verrouillé auprès des Chinois l'idée de cette rencontre de M. Sarkozy avec le dalaï-lama ", a commenté, mercredi, une source européenne.

INCOMPRÉHENSION

A Pékin, certains observateurs européens interprètent la décision chinoise avec un mélange d'incompréhension et de rancoeur, estimant que le coup de colère en dit long sur la vision que se font les Chinois du reste du monde en général et de l'Union européenne en particulier : le principe de priorité, même à propos d'une question tibétaine particulièrement sensible pour la République populaire, aurait dû normalement faire passer les relations sino-européennes avant une irritation essentiellement dirigée contre la France.

Depuis la menace de M. Sarkozy de ne pas participer à la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques, en août, si un dialogue sino-tibétain n'enregistrait pas de " progrès ", après les émeutes de Lhassa en mars, la relation franco-chinoise a été abîmée. Nicolas Sarkozy avait pourtant décidé de se rendre à Pékin et de ne pas rencontrer le dalaï-lama lors de sa visite en France, en août. Les responsables français avaient alors proclamé que la page était tournée sur des mois de tensions. Il aura suffi que M. Sarkozy annonce sa rencontre prochaine avec chef religieux tibétain pour que l'ire de Pékin soit rallumée.

Pour les dirigeants chinois, qui, selon des connaisseurs du dossier, sont parvenus à la conclusion que les choix de M. Sarkozy pouvaient fluctuer au gré des pressions qui s'exerceraient sur lui, le comportement du président français relève de l'impolitesse : il aurait dû y mettre les formes. Par le passé, d'autres dirigeants européens ont rencontré le dalaï-lama sans que cela occasionne des dégâts diplomatiques comparables. Pékin aurait senti dès novembre 2007 qu'il disposait d'un certain levier, lorsque M. Sarkozy avait renoncé à se faire accompagner en Chine par sa secrétaire d'Etat aux droits de l'homme, Rama Yade.

Mais la mesure extrême que vient de prendre la Chine pourrait aussi refléter des dynamiques internes au régime, où les " durs ", rétifs à trop d'ouverture envers les Occidentaux, apparaissent en position de force. L'affront chinois aux Européens pourrait ainsi recouvrir un message de fermeté plus large, au moment où les Etats-Unis sont en pleine transition politique.

Natalie Nougayrède

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DERNIER CHIFFRE DE CHINE - Banque centrale de Chine

Le Monde - Economie, vendredi, 28 novembre 2008, p. 17

La banque centrale de Chine a annoncé, mercredi 26 novembre, une baisse des taux d'intérêt des prêts à un an à 5,58 %, contre 6,66 % auparavant, ainsi qu'une baisse du taux de réserves des banques, afin de " stimuler l'économie " et de soutenir le plan de relance de 4 000 milliards de yuans (454 milliards d'euros). Selon la Banque mondiale, la croissance sera de 7,5 % en 2009, son plus faible niveau depuis 1990.

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Les Français vendent laborieusement leurs vêtements en Chine - Nicole Vulser

Le Monde - Economie, vendredi, 28 novembre 2008, p. 16

TEXTILE MALGRÉ UNE BONNE IMAGE, L'HEXAGONE SE CLASSE À LA NEUVIÈME PLACE DES EXPORTATEURS D'HABILLEMENT DANS LE PAYS

POUR des Français, vendre des vêtements en Chine, c'est jouer les David contre Goliath. De janvier à septembre 2008, Paris a exporté pour 19,9 millions d'euros de chiffre d'affaires dans l'habillement en Chine pendant que Pékin a exporté pour 2,748 milliards d'euros dans l'Hexagone, selon une étude de l'observatoire économique de l'Institut français de la mode (IFM).

Même si certaines marques françaises produisent en Chine, les industriels hexagonaux ne pèsent qu'un poids plume dans cette balance commerciale (1 % du marché de l'habillement en 2007). En 2007, ils n'étaient que les vingtièmes fournisseurs de la Chine dans ce secteur. Ils ont amélioré ce résultat en prenant, sur les neuf premiers mois de l'année, la neuvième place, après Hongkong, qui caracole en tête, suivi de l'Italie.

CONTREFAÇON

Cette étude de l'IFM bat en brèche des idées reçues : la Chine n'a pas vocation à rester l'atelier de confection du monde. Avec la hausse des salaires horaires moyens d'un ouvrier textile (0,55 dollar à l'intérieur du pays et 0,85 dollar sur la côte), les industriels chinois devraient rapidement sous-traiter dans des pays où la main-d'oeuvre est encore moins chère, comme l'Inde (0,69 dollar), le Vietnam (0,46) ou le Pakistan (0,42).

Pour l'auteur de l'étude, Franck Delpal, la Chine deviendra en 2010 le troisième marché mondial, en consommation de vêtements, devant le Japon. Avec de réelles disparités entre les ménages urbains et les ruraux.

Les citadins les plus fortunés se sont offert en moyenne, en 2007, plus de treize vêtements et presque quatre paires de chaussures. Ils ont augmenté de 15,5 % leurs dépenses en habillement entre 2006 et 2007. Le sportswear se vend bien chez les moins de 30 ans (soit 40 % de la population). Autres particularités : la contrefaçon est un sport national et le marché du prêt-à-porter reste plutôt féminin en Chine, tandis que le luxe est davantage acheté par des hommes.

" Le luxe exporte finalement très peu de vêtements en Chine, il existe donc un vrai décalage entre la force de l'image française du luxe et la faiblesse de la réalité du prêt-à-porter français sur le terrain ", admet Jean-Pierre Mocho, président de la Fédération française de prêt-à-porter féminin. Etam et Pierre Cardin restent les marques françaises les plus achetées dans les 260 plus grands magasins chinois.

" LA LÉGISLATION EST TRÈS LOURDE "

Présent depuis 1983, Eric Bompard, PDG de la société spécialisée dans le cachemire, va en Chine six ou sept fois par an vérifier que son joint-venture avec le leader de cette laine de chèvre de Mongolie fonctionne bien. Pour le premier de ses trois magasins, " le marché n'était pas tout à fait prêt. En Chine, le cachemire n'a pas, comme en France, l'image d'une matière luxueuse ", explique-t-il, tout en concédant " avoir dû un peu freiner sa stratégie d'expansion avec la crise ".

De son côté, Ari Zlotkin, directeur général d'Anne Fontaine - connu pour ses chemises blanches pour femmes - a essuyé les plâtres en s'implantant, en 2005, sans partenaire local à Shanghaï. " La législation est très lourde, les loyers augmentent de façon faramineuse et sont proches de ceux de Madison Avenue à New York, alors que la clientèle n'est pas encore là ", dit-il. Cette boutique, l'une des 80 du groupe dans le monde, est juste rentable et permet surtout " de capitaliser sur la croissance du pays et la construction de l'image de la marque ".

Agent distributeur, Wang Gang assure qu'il faut être suffisamment connu pour être demandé. Et d'assurer que Vuitton, bénéficiant de son image de pionnier du luxe est l'un des rares groupes français à pouvoir négocier en Chine des conditions de baux très avantageuses, puisqu'il sert de " locomotive " aux centres commerciaux. Une façon de rappeler que le succès va au succès.

Nicole Vulser

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DERNIER CHIFFRE DE CHINE - Sévère coup de frein économique

Le Monde - International, jeudi, 27 novembre 2008, p. 6

DEMANDE DOMESTIQUE :
+ 11,4 % en 2007,
+ 9,4 % en 2008,
+ 8,1 % en 2009 et + 9,2 % en 2010.
EXCÉDENT BUDGÉTAIRE (EN % DU PIB) :
2,1 % en 2007,
2 % en 2008,
0,8 %en 2009 et 1 % en 2010.
BALANCE DES OPÉRATIONS COURANTES(en milliards de dollars) :
371 milliards en 2007,
398 en 2008,
437 en 2009 et 472 en 2010.
VENTE DE LOGEMENTS EN 2008(sur huit mois) : - 12,7 %.
A Pékin : baisse de 50 % des transactions immobilières.
La construction résidentielle a cru de 30,5 %.
Mais il y a un déficit de logements à bas prix.

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DERNIÈRE IMAGE DE CHINE

27/11/2008

Des ouvrières saccagent les bureaux de leur usine lors d'une manifestation à Dongguan, Chine, le 25 novembre 2008.

Crédit : D. CHAN / REUTERS

CINÉMA - La condition humaine sera adaptée par Lou Ye

Le Point, no. 1889 - Le point de la semaine, jeudi, 27 novembre 2008, p. 18

Hervé Gattégno, Fabien Roland-Lévy et les services du « Point »

C'est le Chinois Lou Ye qui devrait adapter au cinéma « La condition humaine ». Depuis quarante ans, d'autres metteurs en scène (Verneuil, Costa-Gavras...) se sont cassé les dents sur le roman de Malraux, qui raconte l'insurrection communiste en 1927 à Shanghai (Goncourt 1933). Problème : le réalisateur d'« Une jeunesse chinoise » a été banni pour cinq ans par le régime de Pékin. Le film sera donc tourné hors de Chine

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Marché de l'art - Chu Teh-Chun

Le Point, no. 1889 - Tendances, jeudi, 27 novembre 2008, p. 126

L'artiste abstrait Chu Teh-Chun, né en Chine en 1920 et installé à Paris dans les années 50, est une notabilité française de la peinture, membre de l'Académie des beaux-arts depuis 1997. Son travail utilise à la fois la tradition picturale chinoise et l'apport des peintres modernes occidentaux. Sur le Marché de l'art international, il est devenu, à l'instar de Zao Wou-ki, une star des cotations qui a dépassé, dans le cadre de transactions à tendances spéculatives, les 3 millions de dollars. Mais les temps risquent de changer. Deux ventes d'art chinois chez Christie's Hong-kong présentent pas moins de huit oeuvres de l'académicien. La plus chère est estimée 500 000 euros.

Judith Benhamou-Huet

Note(s) :

Les 30 novembre et 1er décembre, Hongkong, Christie's, 852.25.21.53.96, www.christies.com.

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La présence chinoise à Cuba - Stéphane Bussard

Le Temps, no. 3335 - International, jeudi, 27 novembre 2008

Une ère nouvelle semble s'ouvrir pour Cuba. Après avoir été le jouet de la Guerre froide, notamment lors de la crise des missiles de 1962, après l'effondrement économique des années 1990 provoqué par le «lâchage des Soviétiques», La Havane retrouve une place de choix sur l'échiquier international. Au cours des dernières semaines, plusieurs chefs d'Etat prestigieux défilent dans la capitale pour courtiser les leaders cubains: le Brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, le commissaire européen au Développement Louis Michel, l'allié indéfectible vénézuélien Hugo Chavez et le président chinois Hu Jintao.

Assouplissement américain

La présence chinoise sur l'île des Caraïbes n'est pas nouvelle. Deuxième partenaire commercial (2,7 milliards de dollars en 2007) derrière le Venezuela, la Chine est très présente à La Havane, qui compte près de 3000 bus Yutong chinois. Lors de sa récente visite, le président Hu Jintao a accepté d'accorder déjà 70 millions de dollars des 350 millions de crédit que la Chine promet pour rénover les hôpitaux cubains. Pour Pékin, il est important d'investir dans un pays producteur de matières premières comme le nickel ou de denrées comme le sucre.

Poussés par l'âpre concurrence internationale, les Américains pourraient changer radicalement de cap. Par pragmatisme pour ne pas rater le coche le jour où l'ouverture de l'île deviendra une réalité.

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Carrefour veut des hypermarchés sans voiture en Chine - François Bellanger

Le Monde - Environnement & Sciences, vendredi, 28 novembre 2008, p. 5

Sous l'effet de la crise, tout le monde s'affole, les clients m'appellent de partout ", sourit François Bellanger. Ce spécialiste des modes de vie urbains anime à Paris le think tank Transit City, consacré à l'avenir de la ville, des transports, du commerce, dont le prochain atelier, vendredi 28 novembre, au Pavillon de l'Arsenal, débattra de la question : " A quoi ressemblera le voyage dans vingt-cinq ans ? "

Le recul de la voiture signe-t-il la fin des hypermarchés installés en périphérie ?

Bien sûr. Pendant la flambée du prix de l'essence, les hypers d'Ile-de-France non desservis par le RER ont vu fondre leur chiffre d'affaires. L'Amérique a commencé à remettre en cause le modèle du " mall " commercial, le principe " no parking, no business ". En Chine, Carrefour se fait opérateur de transport pour créer des hypermarchés sans voiture : les clients peuvent emprunter les réseaux de bus affrétés par l'enseigne.

Propos recueillis par Grégoire Allix

PHOTO - REUTERS

www.transit-city.com

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mercredi 26 novembre 2008

Pékin face à un sévère coup de frein économique - Alain Faujas

Le Monde - International, jeudi, 27 novembre 2008, p. 6

Cinq cents ouvriers chinois en colère ont saccagé les locaux de l'usine de jouets Kaida Toy Factory de Zhongtang (province du Guangdong) et détruit cinq véhicules de police, mardi 25 novembre, pour protester contre les conditions de licenciement de 380 salariés sur les 2 000 qu'emploie l'entreprise.

Cette émeute s'inscrit dans la longue liste des protestations populaires provoquées par le fort ralentissement de l'économie chinoise. Celui-ci s'est traduit par la disparition de la moitié des entreprises exportatrices chinoises de jouets au cours des sept premiers mois de l'année, et par des licenciements massifs dans la province du Guangdong.

Mais le recul des exportations affecte tout autant le secteur textile, l'industrie lourde (acier et ciment) et l'immobilier puisque les prix des logements chinois ont reculé de 3,5 % par rapport au sommet de la fin 2007, selon les statistiques de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

A court terme, les perspectives économiques sont sombres en Chine. La Banque mondiale vient, une nouvelle fois, d'abaisser ses prévisions de croissance, qui a culminé en 2007 à 11,7 % et qui reviendra à 9,4 % cette année.

En juin, elle avait prédit que l'année 2009 verrait une croissance de 9,2 % du produit intérieur brut chinois ; elle ne parie plus que sur 7,5 %. " Les six prochains mois seront difficiles ", avertit Louis Kuijs, économiste du bureau de Pékin de la Banque mondiale, qui table sur une contamination de l'ensemble de l'économie chinoise par les secteurs en difficulté.

A elle seule, la chute des exportations et la poussée des importations - qui pourraient excéder les exportations pour la première fois depuis longtemps - amputeraient la croissance chinoise d'un point. Cela n'empêchera pas les réserves de la Chine, qui sont les plus importantes du monde devant les réserves japonaises, de passer de quelque 1 900 milliards de dollars à 2 550 milliards.

Bonne nouvelle pour les consommateurs : les prix devraient s'apaiser grâce à la décrue des cours des matières premières, et l'inflation devrait revenir de 6,5 % au milieu de cette année à 2 %, redonnant un peu de pouvoir d'achat aux ménages.

Malgré la multiplication des émeutes, les experts de la Banque mondiale contestent la thèse très répandue selon laquelle la Chine a besoin d'une croissance d'au moins 8 % pour donner du travail aux millions de migrants qui se sont déplacés des campagnes vers les zones littorales en expansion rapide. Selon eux, cette thèse n'a pas de base scientifique, et le marché du travail restera tendu.

De son côté, l'OCDE est optimiste à long terme, car elle juge que Pékin conduit une politique budgétaire " saine ". Ce qui a permis de lancer, le 10 novembre, un plan de soutien à la croissance associant une politique de grands travaux et des dépenses sociales qui ne menacent pas les finances publiques. Elle voit les exportations chinoises repartir à la hausse à partir de 2010, même si l'inexorable montée des coûts salariaux chinois ne permettra plus à la Chine de tailler des croupières aux industriels du reste du monde dans les mêmes proportions qu'au cours des cinq dernières années.

Alain Faujas

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La crise redonne aux classes moyennes l'espoir d'accéder à la propriété immobilière

Le Monde - International, jeudi, 27 novembre 2008, p. 6

Zou Tao est une sorte de pionnier : à sa manière, cet homme de 35 ans est devenu une référence pour de nombreux représentants de la classe moyenne chinoise. Certains internautes le qualifient même de " héros ". En cette période d'incertitude pour la Chine après une longue période de croissance ininterrompue, l'homme n'est pas peu fier de ses succès dans le domaine de l'activisme social : depuis plus de deux ans, son militantisme exercé à partir du moment où les prix de l'immobilier ont commencé à flamber a facilité l'accession à la propriété de milliers de jeunes salariés.

Devenir propriétaire est, dans la Chine contemporaine, un désir qui n'a fait que croître au fur et à mesure de l'amélioration de la qualité de vie : selon certaines statistiques, 60 % des Chinois d'une classe moyenne évaluée à moins de 200 millions de personnes possèdent leur propre logement. Et des sondages indiquent que 80 % de locataires rêvent de devenir propriétaires...

Aujourd'hui, plus de 50 000 personnes ont rejoint l'association fondée par Zou Tao il y a deux ans. Il suffit aux futurs acheteurs de consulter les deux sites Internet qu'il a créés cette année pour rendre plus aisée la recherche d'appartements abordables dans les villes de Pékin et de Shenzhen. L'inscription est gratuite et, après avoir entré son mot de passe, il suffit de consulter la liste de biens immobiliers disponibles dont la valeur réelle est garantie par l'association de M. Zou. Qui négocie directement les prix avec les promoteurs depuis que le marché immobilier a commencé, cette année, à baisser. Une tendance qui va se poursuivre, vu l'impact de la crise financière sur l'économie chinoise. Avantage aux acheteurs !

Zou Tao est une figure paradoxale de l'activisme compassionnel : ancien soldat de l'Armée populaire de libération, ex-homme d'affaires enrichi dans le commerce d'accessoires pour golfeurs, c'est la spéculation effrénée dans l'immobilier qui l'a fait agir : " En 2005, le prix du mètre carré était déjà, ici, de 6 000 à 8 000 yuans - 600 à 800 euros - ", explique-t-il, dans son bureau de Shenzhen, où il réside. La ville, première " zone économique spéciale " créée par Deng Xiaoping en 1980, incarne, tout près de Hongkong, les succès du " modèle " chinois. " En 2007, poursuit-il, les prix avaient grimpé à 25 000 yuans ! "

Tao avait attrapé, un peu plus tôt, le dragon par la queue : le 25 avril 2006, il publie sur Internet une pétition appelant les Chinois de la classe moyenne à " boycotter l'achat d'appartements pendant trois ans " et les exhorte à ne pas être " esclaves de - l'achat de leur - foyer ". Il recueille aussitôt des dizaines de milliers de signatures.

Cette première initiative fait long feu : ce genre d'appel au boycottage ne fait l'affaire ni des promoteurs ni de leurs amis du Parti communiste, avec lesquels ils entretiennent une relation souvent incestueuse. Les réactions sur son site sont rapidement filtrées par les " pare-feu " de la police chinoise de l'Internet et tout se termine, comme il l'avoue, " dans le silence ".

Notre homme ne désarme pas pour autant. Il écrit ensuite une lettre de " 200 000 caractères " au premier ministre, Wen Jiabao, pour dénoncer la situation dans le secteur de l'immobilier. Il se rend à Pékin pour essayer de la lui remettre. Il en est empêché. Mais il soutient que c'est grâce à lui que certaines mesures ont été prises récemment pour décourager la spéculation. " Désormais, pour l'achat d'une deuxième résidence, il faut apporter 40 % du prix total et payer des taux d'intérêt de 11 %. La mesure a permis de décourager tous ceux qui achetaient un complexe de 300 appartements et revendaient le tout en faisant d'énormes bénéfices ! "

Il précise : " Le mètre carré est descendu, cet automne, en ville, aux alentours de 15 000 yuans. Même si l'on n'assiste pas à des achats massifs, car les prix restent encore élevés, la crise financière et ses conséquences sur le marché peuvent être, à terme, en Chine, une bonne nouvelle pour l'accession à la propriété de la classe moyenne... Le dégonflement de la bulle fait que les acheteurs sont redevenus de "vrais" acheteurs, et non des spéculateurs ! "

La nouvelle stratégie de Zou Tao est de rassembler des groupes d'acheteurs putatifs afin que ces derniers soient en position plus favorable pour négocier à la baisse. Ce qui lui vaut d'être la cible de l'irritation, voire de la franche colère des promoteurs et de leurs hommes de main. " Je reçois des coups de téléphone de menaces, des types m'abordent dans la rue et me disent : "On aura ta peau !" ", confie-t-il. Mais Tao est sûr de son combat. Et du soutien dont il jouit dans la classe moyenne.

Zheng Yanxi, la trentaine, secrétaire de direction dans une entreprise de sous-traitance en informatique, a toutes les raisons de louer ce genre d'activisme social. Attablée dans un café de Shenzhen, elle vient juste de signer la promesse de vente de son appartement. La semaine passée, grâce à l'association de Zou Tao, elle a payé 500 000 yuans un logement de 80 m2. Parce que notre militant des droits du propriétaire a négocié le prix avec le promoteur et évité les frais d'agence, elle a économisé 46 000 yuans. " Nous entrons dans une période d'instabilité. Posséder notre résidence était une priorité pour mon mari et moi. On aurait pu attendre que les prix baissent encore, mais on a décidé d'acheter au plus vite. Quand on ne sait pas ce que l'avenir réserve, il faut se donner les moyens de faire face ", explique la jeune femme, mère d'un enfant d'1 an.

Son époux est directeur des relations humaines dans une entreprise de haute technologie. Ils gagnent à eux deux l'équivalent de 1 500 euros par mois, un salaire confortable. Leur appartement, ils l'ont acheté à crédit en versant 20 % d'apport initial. En dépit de ses craintes sur l'avenir, elle est confiante dans le dynamisme de Shenzhen : " Cette zone va devenir de manière croissante une plate-forme industrielle fabriquant des produits à plus forte valeur ajoutée ; elle tiendra le choc ! ", se rassure-t-elle.

En trente ans, cette " zone ", qui était un village, s'est transformée en une cité hérissée de gratte-ciel. Il y avait 30 000 habitants en 1980 ; il y en a 14 millions aujourd'hui. Il y avait, à l'époque, 8 hôtels ; il y en a 500. Le PNB local était de 17 millions d'euros. Il a atteint 67 milliards d'euros...

Bruno Philip

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