vendredi 30 octobre 2009

BLOG - Jean-Michel Aphatie et la Chine

Après l'interview de Xavier Bertrand sur RTL, le journaliste Jean-Michel Aphatie a mis à jour son blog avec son nouvel article qui s'intitule : "Le Yin et le Yan (sic) de l'actualité". Voici le passage sur la Chine. Désolé pour les sic. Je n'ai pas pu m'empêcher de les noter :
Yin et Yan (sic), voilà qui nous emmène à la Chine. Figurez-vous que la semaine dernière à Pékin, l’UMP, en la personne de son secrétaire général, et le parti communiste chinois, représentée par son boss dont je ne connais pas le nom, ont signé un « mémorandum d’entente » sur des généralités qui n’engagent personne. Cette histoire n’est qu’une histoire de symboles mais la politique, activité de représentation des individus et de leurs intérêts, fait une large place au symbole.

Voilà donc un parti démocratique de la république française signant un « mémorandum » avec un parti unique allégrement assis sur les libertés publiques de ses concitoyens. Au surplus, et pour rire, l’UMP de droite copine avec les communistes chinois qui, c’est (sic) chinois, sont libéraux pour le business et restrictifs sur les libertés.

On pourrait gloser sur le n’importe quoi de la signature de ce « mémorandum », quel mot affreux. Parler avec les communistes chinois n’implique pas de faire ami-ami du stylo avec eux. Les respecter ne veut pas dire les flatter. Signer des contrats ne veut pas dire abdiquer de tout, et notamment pas de ce que nous sommes. Brèfle (sic), faites-vous une idée en écoutant l’interview de Xavier Bertrtand. Et rions un bon coup en imaginant la tête de l’élu UMP de base tout à coup embrassé sur la bouche par des communistes chinois qui doivent se marrer comme des baleines en relisant le fameux « mémorandum ».


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VIDÉO - Xavier Bertrand s'explique sur sa visite en Chine au micro de RTL


Xavier Bertrand était l'invité de RTL ce vendredi 30 octobre 2009. Le secrétaire général de l'UMP, qui répondait aux questions de Jean-Michel Aphatie, était de retour de Chine, où il a signé avec le Parti communiste chinois un protocole axé notamment sur l'environnement et la sortie de crise économique. VOIR LA SÉQUENCE À PARTIR DE 3:30
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RETRANSCRIPTION AUDIO - La Chine, entre TGV et démocratie - Alexandre Adler

France culture - Chronique international, jeudi 28 octobre

Aujourd'hui, nous allons parlé d'une actualité qui ne se situe pas dans les jours ou dans les semaines, mais peut-être dans les mois voire les années. C'est l'entrée de la Chine dans la grande saga du TVG.

tilidom.com

En effet, on sait que les Chinois après avoir longtemps soufferts d'un réseau ferroviaire un peu archaïque, d'avoir acheté leur premier wagon nouveau si l'on ose dire en Allemagne de l'Ouest, les Chinois ont commencé à s'émanciper de cette technologie soviétique. Et on sait déjà que l'année dernière ou plus exactement à la fin de 2007, ils avaient réussi à inaugurer la ligne de chemin de fer la plus en altitude de la planète, un train qui monte jusqu'à Lhassa dans des conditions climatiques absolument inouïes et qui désenclave définitivement le Tibet.

Mais dans les trois années qui viennent, on a compté que pas moins de dix-huit lignes de trains à grande vitesse allaient naître et bouleverser totalement la géographie chinoise. Il faut imaginer en effet que le TVG va permettre aux habitants de Pékin de faire leurs courses à Tianjin, à 120 km de là en moins d'une demi-heure, que des destinations de l'intérieur de la Chine qui mettaient la journée, 8 heures, 6 heures, vont maintenant être atteintes en moins de 4 heures. Donc, que tout d'un coup, la carte de la Chine, cet empire immense, dont on entendait parler de la capitale que de temps à autre lors d'une visite d'un inspecteur d'un mandarin, tout d'un coup, ce pays va rétrécir d'une manière extraordinaire comme nous l'avons connu avec le TGV Méditerranée qui met Marseille et Lyon à porter d'un grand coup de métro de Paris. Le phénomène est en train de se réaliser.

Canton-Hong Kong, 3/4 d'heure.
Shanghai-Wuhan, au centre de la Chine, moins de 3 1/2 heures.
Shanghai-Chengdu, la capitale du Sichuan, la province la plus enclavée, 6 heures.
Ce sont des bonds en avant dont aucun en Chine n'avait eu l'idée. Le problème sera plutôt l'affluence des passagers rendra souvent ces trains engorgés. Il va falloir donc les multiplier, peut-être créer des compagnies rivales. Peu importe, il s'agit d'un bouleversement qui n'est pas seulement un bouleversement technologique, mais un bouleversement géopolitique. Lequel ?

Sans être d'un optimisme béat, on remarquera que l'un des arguments les plus utilisés par les partisans du maintien d'une dictature autoritaire en Chine, d'un pouvoir centralisé fort, c'est l'étendue du pays. On vous va a dit, on vous dira encore, depuis Pékin qu'on a du mal à gouverner avec des procédures démocratiques et parlementaires, un monde aussi vaste et dans lequel très vite, la démocratisation se traduirait par une régionalisation exacerbée, voire par des tentatives de sécession. Et bien, la technologie vient d'enlever beaucoup de validité à cet argument. Dans un monde chinois où désormais l'avion et le train sont en concurrence pour transporter des passagers sur des distances considérables, est-il si vrai que cela que l'on ne peut pas gouverner la Chine sans État autoritaire ? La question est de plus en plus ouverte et elle le sera de plus en plus.
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INTERNET - Le mur de Berlin est tabou en Chine

Le Soir - 1E - CULTURE, vendredi, 30 octobre 2009, p. 38

En partant de la chute du mur de Berlin, le site www.berlintwitterwall.com permet aux internautes du monde de s'exprimer à propos des murs en général et de formuler un souhait pour l'avenir. Sur les 3.000 commentaires, la moitié sont rédigés en chinois et parlent des entraves sur internet dont les Chinois font les frais. Effectivement... Le site est interdit dans le pays depuis lundi.

© Rossel & Cie S.A. - LE SOIR Bruxelles, 2009

LIRE AUSSI - Pourquoi le dernier domino de Berlin était chinois

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UN AN APRÈS LE KRACH - Anatomie d'un effondrement - François Chesnais

Le Monde diplomatique - Novembre 2009, p. 26 27

Peu après la faillite de la banque d'investissement Lehman Brothers, en septembre 2008, l'idée que nous vivions " la crise la plus grave depuis celle des années 1930 " s'est transformée en lieu commun. La référence à 1929 a gagné les discours politiques. Dans un but précis. L'évocation, après tant d'années, d'une crise dont très peu de gens étaient en mesure de discuter les raisons, mais dont le souvenir continuait à hanter la mémoire populaire, permettait de taire le débat sur ses causes. Elle offrait surtout l'avantage de présenter comme " inéluctables " les politiques de sauvetage des banques avec l'argent public et de prêts massifs à de grandes entreprises, mais aussi les licenciements annoncés par celles-ci. Une fois de plus, il fallait " s'adapter ".

Et pourtant : d'août 2007 à fin septembre 2008, la plupart des économistes invités à s'exprimer dans les médias ont minimisé la gravité du krach financier et nié la possibilité qu'il débouche sur une récession d'assez grande ampleur. Ils ont ensuite quelque peu adapté leur discours, mais en prenant soin le plus souvent d'éviter l'évocation de 1929. Du flot de livres sur la crise parus au premier semestre 2009 (1), il ressort que les appréhensions les plus sérieuses sont d'ordre géopolitique : la place prise par la Chine et son rôle attendu, le déclin relatif des Etats-Unis, celui absolu et prévisible de l'Europe. Pour le reste, moyennant des aménagements du système financier, l'économie mondiale pourrait repartir en gros sur les mêmes bases qu'auparavant. Michel Aglietta et Sandra Rigot se démarquent de cette position. Mais c'est pour en appeler à la responsabilité des investisseurs financiers institutionnels, dont ils attendent qu'ils abandonnent la " logique de la valeur actionnariale ". André Orléan, qui ne nourrit pas ce genre d'illusion, réclame le rétablissement de barrières dissuasives à la mobilité des capitaux. Il n'y a que Frédéric Lordon pour penser en permanence aux dégâts humains de la crise.

L'injection de sommes massives dans le sauvetage des banques et de grandes entreprises aux Etats-Unis et dans de nombreux pays européens, combinée avec la résilience des économies chinoise et indienne, est venue limiter dans l'immédiat l'ampleur de la récession mondiale. Les institutions économiques internationales peuvent donc annoncer, sinon la fin des intempéries, au moins une reprise plus tôt que prévu. Elles paraissent donner raison à tous ceux qui ont expliqué que la crise n'appelait que des aménagements dont on pouvait discuter calmement la nature et l'ampleur. Très représentatif à cet égard a été le livre publié par le Cercle des économistes, club très oecuménique dont seuls les économistes de l'école de la régulation ont choisi de ne pas faire partie.

Coordonné par Pierre Dockès et Jean-Hervé Lorenzi, le livre est construit sur l'opposition entre deux interprétations. Dans la première, la crise est un moment classique du cycle économique et a surtout une fonction d'assainissement. Dans la seconde, elle marque la rupture d'un régime de croissance, la nécessité d'" accoucher d'un nouveau monde ". L'opposition relève surtout de la mise en scène, exception faite de la contribution de Dockès à l'appui de la seconde position.

La neuvième réunion du Cercle a produit en juillet une déclaration affichant la volonté de se démarquer de la " vision rassurante, inopérante et dangereuse du "business as usual" ". Elle appelle à l'élaboration " de réformes institutionnelles et des coordinations indispensables à l'émergence d'un nouveau modèle de croissance ". Les dix propositions formulées par les auteurs n'y contribuent guère. Voici un pot-pourri de banalités où la pression de la finance se fait sentir assez fortement. Ainsi le " renforcement de la régulation bancaire et financière " supposerait l'abrogation des accords négociés à la Banque des règlements internationaux (BRI), notamment celui dit " Bâle II ", coupable d'avoir poussé les banques vers les opérations hors bilan avant d'avoir aggravé la tempête financière.

Bien que la crise nous réserve encore des surprises, une de ses conséquences au moins relève de la certitude : le déplacement de l'axe du capitalisme mondial vers l'Asie. Le mouvement était déjà largement amorcé avant 2007, mais que les Etats-Unis aient été l'épicentre de l'ouragan financier et que leur système productif l'ait subi de plein fouet du fait de vulnérabilités antérieures en accélère le rythme. Le calendrier et surtout la vigueur de toute relance mondiale dépendent en grande partie de la Chine. D'où le malaise qu'expriment, chacun à sa manière, les livres traitant surtout des équilibres économiques mondiaux.

Le premier, d'Anton Brender et Florence Pisani, présente avec un raffinement considérable une thèse qui impute à Pékin une part de responsabilité dans le déclenchement de la tourmente et décrit l'empire du Milieu comme le débiteur moral des Etats-Unis, alors même qu'il en est le créancier. Le scénario écrit dans les années 1990 voulait que cette économie émergente serve de champ de valorisation au capital des fonds de pension privés des pays avancés (2). Le flux des capitaux de placement devait se faire dans le sens Nord-Sud. Il a pris le chemin inverse. Brender et Pisani réservent aux Etats-Unis le beau rôle. La globalisation financière dont ils ont été les architectes a " permis aux régions émergentes (Asie, pays du Golfe) d'accumuler une forte épargne sans en porter les risques (...). Comment les régions à fort excédent commercial auraient-elles pu dépenser moins qu'elles ne gagnaient, si d'autres (les Etats-Unis, le Royaume-Uni, etc.) n'avaient pas dépensé plus ? ".

De même, comment auraient-elles pu placer leurs liquidités sans que les systèmes bancaires occidentaux " ne prennent les risques financiers que les régions émergentes n'ont pas pris ? ". D'une présentation théorique très sophistiquée des " chaînes globales de prise de risque financier " émerge ainsi un récit dans lequel les emprunteurs hypothécaires et les consommateurs à crédit américains incarnent des quasi-héros sans lesquels la croissance asiatique, et celle de la Chine en particulier, n'aurait pas eu lieu ; et où ce qu'on nomme le shadow banking system (" système bancaire de l'ombre ", tout ce qui est " hors bilan " dans les comptes des sociétés financières) aurait été l'agent indispensable de prises de risque qui, au total, auraient été bénéfiques pour le monde entier.

La recette ordinaire associe un réquisitoire implacable et des propositions lilliputiennes

Il est également beaucoup question du déplacement de l'axe du capitalisme mondial vers l'Asie dans le livre de Patrick Artus et Marie-Paule Virard, dernière livraison dans la série des essais à sensation qu'ils proposent chaque année à leurs lecteurs (3). La méthode est toujours la même. Le travail débute par un réquisitoire propre à couper l'herbe sous les pieds des altermondialistes et s'achève sur des propositions d'une modestie déconcertante. S'agissant de la situation des Etats-Unis au moment où M. Barack Obama entamait sa présidence, le bilan dressé est le suivant : une désindustrialisation avancée du fait d'un sous-investissement chronique dans la production et de délocalisations industrielles très difficilement réversibles ; un délabrement profond des infrastructures, autre conséquence du sous-investissement public et privé ; un endettement public et privé confinant à l'insolvabilité ; des déficits budgétaires et commerciaux structurels ; une société minée par des inégalités insupportables ; un système de protection santé lacunaire ; le système des retraites gravement menacé.

Pour les auteurs, les Etats-Unis ne peuvent s'en prendre qu'à eux-mêmes. Ils ont transféré une partie de leur industrie manufacturière à l'étranger. Sans polémiquer directement avec Brender et Pisani, le livre souligne que " 60 % des importations en provenance des pays émergents sont produits par des firmes américaines installées dans ces pays (c'est notamment le cas en Chine, où la hausse des exportations doit être mise sur le compte des entreprises étrangères qui y sont installées) ". Et Artus et Virard de remarquer à juste titre qu'il y a " peu de chance de voir les grandes firmes américaines, telles Nike, Hewlett-Packard ou Motorola, qui ont transféré des capacités de production vers ces pays, les rapatrier ". Les Etats-Unis auraient adopté un modèle " bipolaire " comportant une spécialisation extrême aux deux bouts de la chaîne : les activités hautement qualifiées (finance, management, développement) et les bad jobs, sous-rémunérés, précaires et sans couverture sociale, dont beaucoup relèvent des services à la personne. Ils auraient ainsi vidé leur économie d'une bonne partie de la substance qui en faisait la force.

Vient ensuite, comme chaque fois, la pirouette intellectuelle guidée par la froide réalité. Le titre du sixième chapitre contient le message du livre, " il faut sauver le soldat Obama ". Pour cela, il incombe aux pays à fortes réserves de change de " décider, en dépit de l'épisode des subprime et autres ABS [produits financiers titrisés], de prendre le risque d'être à nouveau spoliés afin de permettre le redressement de l'économie américaine ". Il faudrait en particulier que la Chine suive une " pratique coopérative " sans demander trop en échange.

Depuis plus longtemps que bien d'autres, Aglietta porte une grande attention à la Chine (4). Aussi, dans le livre cosigné avec Sandra Rigot, il se montre confiant : les dirigeants chinois tiendront leurs engagements en matière de relance et contribueront ainsi à bloquer le processus de récession mondial. Mais il faudrait qu'ils adoptent aussi les mesures nécessaires pour asseoir un régime de croissance mondial, dont les investisseurs institutionnels des pays à systèmes de retraite privés demeureraient le pivot. Il s'agirait d'entreprendre " une phase de construction d'une sorte d'économie sociale de marché régulée par l'Etat ", comportant d'" énormes investissements sociaux, d'éducation, d'infrastructures, de réduction des coûts environnementaux et d'économie de ressources non renouvelables, poursuivis pour au moins une décennie ". Des investissements si élevés qu'ils absorberaient toute l'épargne domestique, de sorte que l'empire du Milieu ferait enfin appel aux capitaux des fonds de pension des pays à retraite par capitalisation. Les changements politiques prônés par les auteurs paraissent aussi importants qu'incertains. C'est l'une des raisons qui poussent Aglietta à prévoir une récession longue et une reprise suivie de taux de croissance mondiaux faibles - l'autre raison majeure étant le montant de l'endettement privé et étatique.

Régulation, rénovation de la finance... Peu importe le flacon pourvu qu'on stabilise le système

Toutefois, le principal propos du livre est ailleurs. Il porte sur la conversion attendue des gestionnaires financiers. Aglietta est l'un de ceux qui ont annoncé le plus tôt la probabilité d'une crise financière (5). Ses explications sur la titrisation et le shadow banking system comptent parmi les plus claires et les plus critiques. Il n'est pas prêt à oublier la violence de la secousse qui a suivi la faillite de la banque Lehman Brothers en septembre 2008 et juge possible de nouveaux soubresauts brutaux. Mais, quand il apprécie l'avenir, l'économiste pointe la nécessité d'offrir enfin des assises stables à ce qu'il a baptisé voici dix ans le " régime de croissance patrimonial (6) ". Après avoir déploré les " dérives du capital financier (7) ", il voudrait contribuer à la " rénovation de la finance ". Aglietta est loin de l'antilibéralisme, plus encore de l'anticapitalisme. Son livre dissipe les illusions que certains de ses lecteurs ont pu entretenir à cet égard.

Pourquoi la rénovation, et pas davantage ? Parce que " le pouvoir prépondérant des actionnaires va rester, parce que nul ne veut ni ne peut mettre en cause la globalisation et parce que la transition démographique ne peut que donner un poids croissant aux investisseurs institutionnels qui ont des engagements de long terme de garantie des retraites ". Pour remédier aux dérives du partage de la valeur ajoutée, un des facteurs qui ont préparé la crise, on ne peut pas " revenir à la régulation des revenus dans le cadre de la gouvernance des entreprises managériales des années de la croissance fordiste ". De l'avis d'Aglietta et Rigot, " un nouveau contrat social compatible avec la poursuite de la globalisation financière " ne pourrait voir le jour que s'il émergeait de la crise des fonds de pension disposés à assumer " leurs responsabilités d'investisseurs à long terme ".

" Faire entrer en grand, dans la sphère des rapports économiques, l'exigence démocratique radicale "

Dans ce livre, il est assez peu question des régulations étatiques. On peut interpréter cette sobriété comme une appréciation de leur inefficacité totale et du degré de pouvoir atteint par les fonds de pension et de placement. D'où cet espoir, répété à longueur de pages, que surgissent des " investisseurs patients ", prêts à exercer leur pouvoir d'actionnaire pour imposer d'autres critères que ceux de la valeur actionnariale, laquelle assigne au travail le rôle de variable d'ajustement en termes de rémunération et de précarité de l'emploi. Leur tache serait de rechercher des rendements à long terme compatibles avec une progression parallèle des salaires réels et de la productivité. Aglietta et Rigot ne demandent aux " nouveaux investisseurs institutionnels " rien moins que de " discipliner la finance de marché ".

C'est plus qu'ils ne peuvent leur offrir eux-mêmes en termes de conseils pour y parvenir. Les dix recommandations formulées sont sans doute susceptibles d'aider un gestionnaire à réfléchir sur ses déboires récents. Elles relèvent de la gestion sensée, mais il est difficile d'y voir les fondements d'un " nouveau contrat social ". On est intéressé d'apprendre que le fonds de pension des employés de l'Etat de Californie (CalPERS) a constitué un portefeuille " plus robuste à la crise " que beaucoup d'autres, mais on ne trouvera pas dans ce livre un quelconque bilan de la présence des représentants syndicaux dans les conseils d'administration des fonds de pension (8). Dans le cas des Etats-Unis, un " nouveau contrat social " supposerait par exemple de pouvoir interdire aux entreprises d'imposer à leurs salariés des plans d'épargne-retraite en lieu de droits à pension véritables. En deçà de rapports politiques entre capital et travail analogues à ceux du New Deal, on ne voit pas comment. Les concessions que le syndicat des travailleurs de l'automobile (United Auto Workers, UAW) a acceptées sur la réduction des droits à retraite, des salaires et de l'emploi, dans le cadre des plans de sauvetage de l'automobile, permettent de mesurer à quel point on en est loin. Derrière une maîtrise technique élevée des complexités de la finance, il est à craindre que les préconisations d'Aglietta et Rigot confinent à un chapelet de voeux pieux.

D'où le soulagement d'ouvrir le dernier livre de Frédéric Lordon. L'auteur partage la rage des " Conti " et des ouvriers de Caterpillar, de Celanese ou de Molex. Même s'il pense que la sortie du capitalisme " n'est pas a priori l'issue la plus probable de la crise ", elle " n'en fait pas moins bel et bien partie des possibilités qui naissent du grand effondrement ". Son livre s'achève d'ailleurs sur une " projection ", tentative de dessiner un au-delà du capitalisme qu'il nomme l'" horizon des récommunes ". Le terme renvoie à la res communa, la chose partagée. Il s'agit de " faire entrer en grand, dans la sphère des rapports économiques, l'exigence démocratique radicale ".

La démocratie, constate Lordon, " c'est toujours bon pour la comédie parlementaire, jamais pour les travailleurs associés ", terme qui vient de Karl Marx et qui fut singulièrement délaissé par le marxisme officiel. L'auteur esquisse également des objectifs politiques immédiats suffisamment concrets pour que les salariés les comprennent et s'en emparent. C'est le cas en particulier de la proposition de création d'un système socialisé du crédit. Tout cela paraît sortir du cadre " régulationniste " classique...

Lordon a communiqué son enthousiasme à certains de ses collègues et amis. Ainsi, André Orléan tire de son dernier travail la conclusion qu'il faut recloisonner les différents métiers financiers et réintroduire des barrières aux mouvements du capital de placement. La situation exige, selon lui, " une régulation ayant pour but de fixer des bornes strictes à l'extension des marchés financiers, d'en restreindre l'application à des espaces économiques bien spécifiés. Il faut revenir sur la liberté totale de circulation laissée au capital ". Et Orléan de lancer : " Notre mot d'ordre est le cloisonnement. "

Beaucoup des propositions du livre de Lordon sont déjà connues. Certaines ont été présentées ici même (9). Reste à poser la question de leur mise en oeuvre. Atteindre les objectifs qu'il désigne et appliquer les mesures préconisées par Orléan exigerait une action politique de très grande ampleur portant sur des aspects centraux de ce que Lordon nomme le " capitalisme de basse pression salariale ", à savoir les salaires, la précarité et le temps de travail. L'ampleur de la confrontation, pour autant que les forces nécessaires du côté des salariés parviendraient à se rassembler, ne poserait-elle pas la question du " qui doit décider de l'affectation des ressources productives et en vue de quels objectifs " ?

Note(s) :

(1) Outre les livres retenus pour examen dans cette recension, on citera inter alia Jacques Attali, La Crise et après ?, Fayard, Paris, 2008 ; Eric Bengel, Chronologie d'une crise. 2005-2009, Editions de Verneuil, Paris, 2009 ; Philippe Dessertine, Ceci n'est pas une crise (juste la fin d'un monde), Anne Carrière, Paris, 2009 ; Gaël Giraud et Cécile Renouard (sous la dir. de), Vingt Propositions pour réformer le capitalisme, Flammarion, Paris, 2009 ; Jean-Louis Chambon (sous la dir. de), Repenser la planète finance. Regards croisés sur la crise financière, Les Echos Editions - Eyrolles, Paris, 2009.
(2) Le locus classicus de cette position a été un rapport très influent du cabinet de conseil McKinsey. Cf. McKinsey Financial Institutions Group, " The global capital market : Supply, demand, pricing and allocation ", Washington, DC, 1994.
(3) Cf. notamment Patrick Artus et Marie-Paule Virard, Le capitalisme est en train de s'autodétruire, La Découverte, Paris, 2005, et Globalisation, le pire est à venir, La Découverte, Paris, 2008.
(4) Michel Aglietta et Yves Landry, La Chine vers la superpuissance, Economica, Paris, 2007.
(5) Michel Aglietta et Laurent Berrebi, Désordres dans le capitalisme mondial, Odile Jacob, Paris, 2007.
(6) Michel Aglietta, " Le capitalisme de demain ", notes de la Fondation Saint-Simon, n° 101, Paris, novembre 1998.
(7) Michel Aglietta et Antoine Rebérioux, Dérives du capitalisme financier, Albin Michel, Paris, 2004.
(8) Cf., sur le bilan de l'" activisme actionnarial " des syndicats américains, Catherine Sauviat, " Les fonds de pension et les fonds mutuels : acteurs majeurs du nouveau pouvoir actionnarial ", dans La finance mondialisée. Racines sociales et politiques, configuration, conséquences, La Découverte, Paris, 2004.
(9) Frédéric Lordon, " Enfin une mesure contre la démesure de la finance, le SLAM ! ", Le Monde diplomatique, février 2007. Lire aussi son blog " La pompe à phynance ", http://blog.mondediplo.net

© 2009 SA Le Monde diplomatique. Tous droits réservés.

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La Chine lance une nouvelle Bourse pour les start-up - Arnaud de la Grange

Le Figaro, no. 20296 - Le Figaro Économie, samedi, 31 octobre 2009, p. 24

Enquête

Calqué sur le modèle initial du Nasdaq, le nouveau marché ChiNext ouvre ses portes aujourd'hui à Shenzhen.

Pour porter chance aux futurs milliardaires du « Nasdaq chinois », la musique de Superman avait été diffusée en boucle lors de l'inauguration de la nouvelle Bourse chinoise il y a une semaine. Place aux affaires sérieuses aujourd'hui avec l'entrée en activité de ce fameux ChiNext situé à Shenzhen, dans le sud du pays. Réservé aux PME innovantes en quête de liquidités pour accélérer leur croissance, ce nouveau marché se veut dans l'esprit du second marché new-yorkais à ses débuts. Son lancement est l'aboutissement d'une longue histoire. Les Chinois ont tergiversé pendant plus de dix ans sur le projet, échaudés par les ouvertures peu concluantes de seconds marchés à Hongkong et au Japon. Rattachée à la Bourse de Shenzhen, ChiNext opérera de façon indépendante.

Pour l'heure, 28 entreprises ont été retenues mais quelque 150 seraient en liste d'attente. Une douzaine d'entre elles relèvent du secteur des nouvelles énergies ou de l'industrie médicale et pharmaceutique, le restant allant du software aux produits manufacturiers de haute technologie. Quelques exemples de sociétés qui font leurs premiers pas aujourd'hui sur ce marché boursier ? Une SSII, Ultrapower Software, ou Anke Biotechnology, un fabricant d'hormones de croissance.

Cette petite trentaine de start-up a « récolté » au total 15,5 milliards de yuans (1,5 milliard d'euros). Ces levées de capitaux correspondent à 56 fois la valeur de leurs revenus en 2008, alors qu'à la Bourse de Shanghai, les introductions dépassent rarement 35 fois la valeur des revenus de l'année précédente. Pour une société comme Dinghan Technology, qui fabrique des sous-systèmes pour métros, ce ratio monte même à 82.

Sur la place financière chinoise prompte aux folles embardées, le risque a été clairement identifié par les autorités nationales. Ce type de marché est « exposé à des risques plus élevés de manipulation du marché et de transactions erratiques et spéculatives », a reconnu Shang Fulin, président de la China Securities Regulatory Commission. Le jour de l'ouverture de ChiNext, il a ainsi été décidé que les ventes et les achats d'actions seraient bloqués si la valeur chutait ou augmentait de plus de 80 % par rapport au prix initial.

La naissance de ChiNext s'inscrit dans la stratégie de la Chine de développer ses marchés financiers et de faire monter en gamme son industrie, passant d'une production manufacturière sans grande valeur ajoutée à des produits high-tech. Or, la Bourse de Shanghai est dominée par les grandes entreprises d'État, et jusqu'ici les PME chinoises de croissance peinaient à obtenir des crédits bancaires.

Des règles draconiennes

Certains analystes se demandent cependant si ChiNext va pouvoir épauler les très « jeunes pousses » locales compte tenu des strictes règles édictées. Pour accéder au nouveau marché, les entreprises doivent avoir enregistré un bénéfice d'au moins 10 millions de yuans (1 million d'euros) les deux années précédentes et posséder 20 millions de yuans (2 millions d'euros) d'actifs. Ou bien avoir réalisé un bénéfice de 5 millions de yuans l'année précédente, et un chiffre d'affaires de plus de 50 millions avec une croissance supérieure à 30 % sur deux ans. En tout cas, les gros acteurs chinois comme les géants de l'Internet, Baidu, Sina ou Sohu, sont, eux, depuis longtemps cotés au Nasdaq. Le site de jeux vidéo en ligne Changyou.com a ainsi été la première introduction en Bourse de 2009 sur le marché américain.

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Rothschild renforce sa coopération avec Bank of China

Les Echos, no. 20542 - Finance, vendredi, 30 octobre 2009, p. 30

Il n'y aura pas de prise de participation de Bank of China dans le capital de la Compagnie financière Edmond de Rothschild. Après deux ans de négociations, perturbées par l'irruption de la crise financière, l'accord finalement annoncé à l'occasion de la visite en Chine de la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, est un pur accord de coopération. La banque de Benjamin de Rothschild et Bank of China ont déjà lancé de manière commune, cette année, des produits financiers pour le réseau Bank of China et entendent désormais intensifier leurs relations en matière de gestion d'actifs et de banque privée. La banque française apporte son savoir-faire et ses produits, Bank of China, son réseau.

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DERNIER CHIFFRE - 417 155 millionnaires en Chine

Le Point, no. 1937 - Le point de la semaine, jeudi, 29 octobre 2009, p. 11

Le chiffre de Jacques Marseille.

C'est, selon la dernière étude du Boston Consulting Group, le nombre de millionnaires en dollars que comptait la France en 2008, se classant au 7e rang (
282 831) - derrière les Etats-Unis (3 980 560), le Japon (1 085 584), la Chine (417 155), l'Allemagne (373 565), le Royaume-Uni (370 760) et l'Italie (297 103). Au total, le monde ne comptait plus « que » 9 millions de millionnaires l'an dernier, contre 11 millions en 2007.

LIRE AUSSI - L'inflation des milliardaires en Chine

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Cai Chongguo : "J'étais à Tian'Anmen" - Jean-Jacques Gandini

Le Monde diplomatique - Novembre 2009, p. 28

Cai Chongguo, alors jeune professeur de philosophie, était présent à Tiananmen dans la nuit du 3 au 4 juin 1989 : " J'ai vu, de mes yeux vu, les chars reculer sur les cadavres qu'ils avaient écrasés, une fille avec une robe bleue - je m'en souviendrai toujours - et un garçon vêtu de vert. " Combien de morts ? Et combien de fusillés pendant la répression ? Il y a vingt ans, l'Armée du peuple a tiré sur le peuple et cette tache reste indélébile, même si l'histoire officielle continue de l'occulter. Et pour cause ! Durant le mois de mai, toutes les couches de la population, y compris des membres du parti, sont descendues dans la rue pour conspuer les dirigeants, dénoncer l'affairisme officiel et l'accroissement des inégalités sociales. Activement recherché par la police, Cai a réussi à atteindre Hongkong le 1er juillet, et de là la France, où il poursuit le combat en participant au China Labor Bulletin, qui a pour vocation de promouvoir un syndicalisme indépendant en Chine.

L'Esprit du temps, Le Bouscat, 2009, 96 pages, 9,50 euros.

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jeudi 29 octobre 2009

AUDIO - Relations Chine-États-Unis - Françoise Lemoine et Éric Laurent

France culture - Les enjeux internationaux, jeudi 29 octobre 2009.

Sur le plan économique, il y a une forte interdépendance. Les États-Unis dépendent du financement de leur déficit public par les achats de bons du trésor. La Chine dépend des États-Unis pour ses débouchés à l'exportation. Et la crise 2008, cette double interdépendance a bien été mise en évidence. Le plan de relance se substitue à la demande extérieure défaillante. C'est un énorme plan de relance de l'investissement (600 milliards $ soit 8% du PIB chinois 2009/2010), mais très fragile parce que les +8% de croissance ne pourra pas durer éternellement. Par ailleurs, une économie de la taille de la Chine ne peut pas se reposer sur la demande extérieure. En 2010, la Chine dépassera le Japon pour devenir la deuxième puissance économique mondiale (7% du PIB mondial contre 20-25% pour les États-Unis). La Chine doit donc développer son marché intérieur face au marché américain.

tilidom.com

Françoise Lemoine
. Economiste au Cepii. A paraître fin novembre chez Pearson Education : "La Chine : 1re & 2e année", une analyse qui puise dans l'économie, la géopolitique et l'histoire pour montrer comment la Chine devrait devenir la première puissance commerciale au milieu de ce siècle. Le livre dégage les grandes tendances à venir, expose comment son fulgurant essor modifie les équilibres géopolitiques tant asiatiques que planétaires, et la compare avec les autres grands émergents, notamment avec l'Inde.
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Dialogue Chine-Taïwan par tableaux interposés - Florence de Changy

Le Monde - Culture, vendredi, 30 octobre 2009, p. 21

La Chine n'a jamais reconnu l'indépendance de Taïwan, aussi l'exposition à voir jusqu'au 10 janvier 2010 à Taipei marque-t-elle une date. Non pas à cause de son sujet, consacré à l'empereur Yongzheng (1723-1735), connu pour sa cruauté mais aussi pour son raffinement, et dont la mort soudaine reste énigmatique. Mais parce que le Musée du palais de Pékin a prêté trente-sept pièces au Musée national du palais de Taipei. En soixante ans, les deux institutions ne s'étaient jamais parlé.

Trente-sept pièces, c'est modeste dans une exposition qui compte 500 objets. Mais le différend est lourd. En 1949, battant en retraite face aux communistes de Mao, Tchang Kaï-chek s'est réfugié à Taïwan avec 650 000 pièces provenant de la Cité interdite. " Un vol " des collections impériales, selon Pékin; " sauvetage ", répondent les nationalistes.

Homme de goût

On aime dire à Taipei que l'homme de goût qu'était Tchang Kaï-chek a choisi le meilleur, laissant sur place ce qui n'était pas exceptionnel. Cette exposition n'offre guère de démenti, à quelques exceptions près, comme cet imposant portrait de l'empereur Yongzheng sur son trône, vêtu d'une robe dorée brodée de neuf dragons, et coiffé d'un chapeau d'été tressé et orné de perles.

Le conservateur du Musée de Pékin, Zheng Xinmiao, pense que la principale contribution de son pays à l'exposition est le sceau de l'empereur, dont les caractères affirment : " Etre le chef est difficile. "

Dans une peinture envoyée par Pékin, les habitués du Musée de Taipei reconnaissent sur l'étagère en fond deux objets phares de leur musée : une porcelaine du fameux bleu-vert " du ciel après la pluie ", datant d'il y a huit siècles, et un pichet sang de boeuf en forme de " chapeau de moine ".

" Cela ne nous a pas étonnés de voir nos objets peints sur ces tableaux ", déclare, amusée, la présidente des guides du Musée de Taipei, Beatrice Liang. " Sur d'autres peintures célèbres, nous reconnaissons les livres que nous possédons. Pékin se vante d'avoir les étagères ! ", explique la conservatrice, Chou Kung-shin, qui avait ce projet depuis plus de trente ans.

Une exposition de retour en Chine est loin d'être envisagée. " Nous nous concentrons sur ce qui est faisable, les échanges de personnel, les accords commerciaux sur la reproduction d'oeuvres ", répond Mme Chou.

Pour l'Exposition universelle de Shanghaï, en 2010, la Chine aurait " beaucoup insisté " pour que Taïwan y envoie son rouleau peint sous l'empereur Chien-lung, Le Jour de Qingming au bord de la rivière, inspiré d'un tableau du même nom possédé par Pékin. Taïwan n'a pas cédé.

Florence de Changy (Taipei, envoyée spéciale)

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DERNIER CHIFFRE DE CHINE - Obésité en Chine

Le Monde - Environnement & Sciences, vendredi, 30 octobre 2009, p. 4

Un adulte chinois sur quatre affiche une surchage pondérale, selon une étude d'une université américaine de Caroline du Nord.

Le phénomène, déjà décelé depuis le début des années 2000, empire. La jeune génération chinoise est friande de restauration rapide.

LIRE AUSSI - L'obésité, nouveau fléau des pays émergents par Catherine Vincent

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LITTÉRATURE - Gallimard reprend Bleu de Chine

Le Monde - Monde des livres, vendredi, 30 octobre 2009, p. LIV2

La maison Bleu de Chine, créée en 1994 et spécialisée en littérature chinoise contemporaine, va devenir une collection de Gallimard. Antoine Gallimard a racheté " le fond et la marque ", a indiqué Geneviève Imbot-Bichet, sa fondatrice, qui reste aux commandes de l'entreprise. La maison d'édition détient un catalogue d'une centaine de titres et continuera à publier cinq à six titres par an.

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LITTÉRATURE - Bons baisers de Lénine par Yan Lianke

Le Monde - Monde des livres, vendredi, 30 octobre 2009, p. LIV3

La monstrueuse parade de Yan Lianke

La censure ne manque pas toujours de goût. Ainsi, en ce qui concerne plusieurs romans de Yan Lianke, comme l'iconoclaste Servir le peuple ou le poignant Rêve du village des Ding (Philippe Picquier, 2006 et 2007), on dira sans trop d'ironie qu'elle n'avait pas tout à fait tort de s'en prendre à eux, car l'auteur y fait preuve d'une veine satirique efficace. Mais Yan Lianke n'est pas qu'un opposant faiseur d'histoires (au sens propre), pas seulement. Il est avant tout un grand romancier contemporain. Son précédent livre, Les jours, les mois, les années (éd. Philippe Picquier, 2009), le laissait deviner. Bons baisers de Lénine, qui n'a pas subi de censure, le confirme.

Comme souvent chez Yan Lianke, tout commence dans un petit bourg rural à l'écart de l'histoire et de la géographie : " Au bout du compte, Benaise n'était qu'un hameau oublié du monde au fond des Balou. " Autrement dit, dans les montagnes du Henan, la province de naissance de l'auteur.

Néanmoins, à la manière d'une fable, Benaise possède une spécificité symbolique car, " depuis sa fondation sous les Ming, il n'avait jamais été peuplé que d'aveugles, de boiteux et de sourds-muets. (...) Les infirmes y affluaient du monde extérieur, les gens-complets en partaient. " Arrive alors un nouveau chef de district qui veut racheter aux Russes la momie de Lénine et développer le tourisme communiste local. Au prétexte du slogan de Deng Xiaoping - " Enrichissez-vous " -, il persuade les villageois handicapés de se produire sur scène.

A l'évidence, Bons baisers de Lénine rappelle Freaks, le film de Tod Browning (1932), par sa monstrueuse parade, mais ce n'est un roman ni sur la tolérance ni sur la différence. Formellement, le texte de Yan Lianke s'apparente à une quête impossible, la momie de Lénine tenant lieu de Graal communiste. A Benaise, il règne malgré les circonstances une indéniable joie de vivre. De manière significative, le nom du bourg renvoie à une expression dialectale du Henan qui désigne une forme de bonheur collectif et de satisfaction sociale. Le malheur des Benaisiens tient à l'illusion que l'on peut être plus " benaise " que " benaise ". D'ailleurs, lucide, Mao Zhi, l'ancienne révolutionnaire, rêve qu'une fois la momie de Lénine achetée aux Russes, Benaise soit " déjointé ". Qu'il disparaisse des cartes administratives, qu'il retourne à l'oubli. Mais le chef de district n'est pas prêt à laisser filer sa poule aux oeufs d'or. Son canard à trois pattes.

Les handicapés de Yan Lianke sont contaminés par une angoisse qui en rappelle d'autres. L'opposition entre la Chine révolutionnaire d'hier et la Chine capitaliste d'aujourd'hui est familière. De même que le choix d'une narration longue, de formes très ouvertes de récit, parfois délirantes, qui laissent une grande liberté d'interprétation. Cette manière romanesque et tonique d'interroger un monde instable, difficile à saisir, est en fait l'un des points communs d'une génération d'écrivains nés à la fin des années 1950. On pense, entre autres, à Yu Hua dans Brothers (Actes Sud, 2008), ou Mo Yan dans La dure loi du Karma (Seuil, 760 p., 26 euros). Cependant, à l'absurde de l'un et au fantastique de l'autre, Yan Lianke répond par un mélange de bizarre et d'effrayant - de grotesque, au sens propre.

L'armée a du goût

Dans un pays en bouleversement, qui est loin d'en avoir fini avec ses vieux réflexes totalitaires, notamment en ce qui concerne la presse et l'édition, ces trois écrivains semblent vouloir regarder en face une réalité trop complexe pour un seul livre. En incisant le réel, ils libèrent des angoisses, des fantasmes, mais aussi des anecdotes et des faits divers, sans distinction, dans un mélange de littérature réaliste et de cauchemar très maîtrisé.

Chronologiquement parlant, Bons baisers de Lénine, publié en 2004, est le premier roman de cette veine. C'est celui qui décida Yan Lianke à quitter l'armée chinoise, après vingt-cinq années de carrière et de heurts. Après ce gros livre riche et formidablement foutraque, l'auteur, par ailleurs amoureux des formes courtes, est devenu un écrivain à plein-temps.

Comme la censure, l'armée a du goût, parfois. Dans ce texte, c'est tout un monde qui surgit d'un point dérisoire et perdu sur une carte virtuelle. Bons Baisers de Lénine, roman de jouissance et de drame, au-delà d'une construction virtuose qui mêle une quantité de registres et de tons, est un précipité littéraire d'une grandiose intensité. En d'autres termes, un accomplissement.

Nils C. Ahl

Bons baisers de Lénine (Shòu huó) de Yan Lianke. Traduit du chinois par Sylvie Gentil, Ed. Philippe Picquier, 564 p., 21,50 Euros.

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Suite de la visite de Christine Lagarde en Chine

Le Figaro, no. 20294 - Le Figaro Économie, jeudi, 29 octobre 2009, p. 22

Christine Lagarde n'a pas hésité à parler des sujets qui fâchent, tels que la propriété industrielle avec le vice-ministre du Commerce ou l'évolution des taux de change avec le gouverneur de la Banque centrale chinoise. « Nous partageons avec les autorités chinoises le souhait ardent d'avoir un dollar fort », a-t-elle déclaré, sans attaquer de front le taux de change du yuan.

L'objectif est de positionner la France afin qu'elle bénéficie autant que d'autres de la manne financière que représentent les fonds souverains chinois. La journée d'hier, à Pékin, a été ponctuée par la signature d'un accord-cadre entre la China Development Bank (CDB) et la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Un fonds commun franco-chinois, doté au départ de 500 millions d'euros, sera créé pour permettre des investissements croisés dans des PME. « C'est une relation de long terme que nous instaurons. Les stocks d'investissements chinois en France est aujourd'hui de 300 millions d'euros ; ce montant pourrait être rapidement augmenté de 50 % », indique le patron de la Caisse des dépôts, Augustin de Romanet.

« C'est une visite qui va permettre de développer les échanges entre nos deux pays », a indiqué hier le ministre des Finances chinois, Xie Xuren. Une délégation d'acheteurs chinois est maintenant attendue en France fin novembre. Fin décembre, François Fillon viendra à Pékin sceller politiquement les liens entre les deux pays. On se risquerait presque à parler de fiançailles. Mais la lune de miel est encore loin... Les entreprises se remettent tout juste de la période de rétorsion dont la France a été victime.

« On nous demandait encore il y a quelques semaines des rabais, juste parce que nous étions une entreprise française », témoigne le patron d'une PME industrielle installée à Pékin. Ensuite parce qu'il est encore difficile pour les entreprises étrangères de travailler avec les autorités. Alstom a investi ces dernières années dans des usines chinoises, dans l'énergie et le transport. « Le groupe compte 9 000 salariés en Chine, et nous voudrions être considérés comme une entreprise chinoise », note Philippe Favre, son directeur international. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Alstom attend toujours, par exemple, certaines licences administratives pour son usine de métro de Shanghaï.

Marie Visot

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LUXE - L'industrie du luxe cherche des relais de croissance en Chine

Les Echos, no. 20541 - Industrie, jeudi, 29 octobre 2009, p. 19

Souffrant de la chute de leurs ventes en Occident et au Japon, les marques de luxe accélèrent leur développement sur un marché chinois toujours complexe. Le Comité Colbert lance aujourd'hui une nouvelle campagne dans le pays pour séduire les jeunes consommateurs.

Quand les cadres de Berluti ont décidé d'ouvrir leur cinquième boutique en Chine continentale, ils n'ont pas opté pour une implantation sur l'une des prestigieuses avenues de Shanghai mais choisi la ville de Ningbo, dans la province côtière du Zhejiang. Peu connu en Occident, ce port est en train de s'imposer comme l'un des marchés incontournables pour les géants mondiaux du luxe. Si le revenu annuel moyen dans la ville est estimé à 25.300 yuans (2.500 euros), une classe d'hommes d'affaires ayant fait fortune à l'export a attiré les grandes enseignes de la confection, de la joaillerie et de l'automobile. Rolls-Royce vient d'inaugurer une nouvelle concession dans la cité, ce qui fera de la province du Zhejiang la seule du pays à abriter deux magasins de la prestigieuse marque.

« En Chine, il existe une folie pour le luxe comme on ne voit nulle part ailleurs », tranche Bernard Fornas, le PDG de Cartier International. « Dans un contexte mondial difficile, la Chine s'impose comme une réserve de croissance très importante », explique-t-il avant de révéler que la clientèle chinoise, achetant dans le pays ou à l'étranger, est devenue depuis l'été dernier la plus importante au monde pour Cartier, devant les consommateurs japonais, qui ont longtemps dominé ce marché. « Nous avons 31 boutiques dans 19 villes du pays et nous allons en ouvrir entre 5 et 10 par an dans les prochaines années pour répondre à la demande », souffle Bernard Fornas.« Jamais, nous n'avions assisté à un tel déploiement de nouveaux points de vente dans un seul pays », confirme Elisabeth Ponsolle des Portes, la déléguée générale du Comité Colbert, qui fédère les grands groupes de luxe tels que LVMH (propriétaire des « Echos »), Hermès ou encore Baccarat.

Entre 2005 et 2009, les 70 marques représentées au sein du comité ont, en moyenne, vu la part de leur chiffre d'affaires mondial réalisé en « Grande Chine » - en incluant les très fortes ventes à Macao et à Hong Kong, où les produits, moins taxés, sont jusqu'à 20 % moins cher - passer de 4,5 % à 8 %.

Communication en 3D

Pour conforter cette croissance cruciale pour l'avenir de l'industrie et conquérir les jeunes Chinois, le comité dévoile aujourd'hui une originale campagne de communication centrée sur un site en 3D (www.ccolbert.fr), permettant aux internautes « un voyage interactif au sein du luxe français ». Le projet doit notamment permettre à de petites marques françaises de gagner en notoriété et de se développer sur un marché prometteur mais toujours difficile où les sociétés sont confrontées à l'imposition de lourdes taxes sur leurs ventes, au manque de personnel qualifié, à l'explosion des loyers et à la contrefaçon.« Si les grandes enseignes telles que Louis Vuitton, Gucci ou Cartier sont profitables ici, de petites marques qui ont assisté à l'effritement de leurs marchés traditionnels se disent qu'elles doivent dès aujourd'hui construire leur notoriété en Chine pour un jour être prospères », analyse Ignatius Tong, un consultant de Roland Berger basé à Shanghai.

Suivant cette démarche, le spécialiste de la porcelaine Bernardaud a ouvert trois points de vente à son nom dans le pays depuis 2007 et a décidé de lancer une usine de production à Jingdezhen, le Limoges chinois. « Avec notre partenaire chinois, nous allons attaquer le marché de l'hôtellerie-restauration, qui connaît un véritable boom », précise Michel Bernardaud, représentant la 5e génération à la tête de la société. « Au vu des droits de douane très élevés appliqués en Chine, fabriquer ces produits en France et les exporter n'était pas rentable », pointe-t-il. « S'installer en Chine, c'est très coûteux et cela prend beaucoup de temps », confirme cependant Bernard Fornas de Cartier.

DOMINIQUE CHAPUIS ET YANN ROUSSEAU (À PEKIN)

PHOTO - Yves Carcelle et l'ambassadeur chinois en France, Kong Quan, 29 octobre 2009 / Getty Images

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LUXE - Dominique Hériard Dubreuil, présidente de Rémy Cointreau

Le Figaro, no. 20294 - Le Figaro Économie, jeudi, 29 octobre 2009, p. 22

Le FIGARO.- Que représente le marché chinois pour une marque comme la vôtre ?

Dominique HÉRIARD DUBREUIL.- Nous exportons du cognac depuis cent ans en Chine et sommes vraiment en développement depuis trente ans. Depuis les années 1990, les Chinois ont un mode de vie - ils sortent et reçoivent beaucoup chez eux - qui a considérablement fait augmenter leur consommation de cognac. Ils le boivent d'ailleurs comme du vin !

Les tensions franco-chinoises liées à la question tibétaine se sont-elles ressenties sur la bonne marche de vos affaires ?

Nous étions en forte expansion, elle a un peu ralenti il y a deux ans. C'est d'abord dû à la crise que le monde a traversée. Cela dit, la tension franco-chinoise, essentiellement politique, incite à la vigilance - notamment parce que l'on ne maîtrise pas le phénomène des blogs et l'influence que cela peut avoir sur l'opinion publique. L'année dernière, nous avons juste été plus discrets, avons organisé moins d'événements : la provocation n'est pas nécessaire. Mais les choses semblent être derrière nous.

Vous êtes donc optimiste pour l'avenir ?

Nous avons des équipes locales, une stratégie de long terme et un réseau de distribution totalement refondé. Nous sommes donc parés pour la reprise. Je n'ai aucun doute sur le fait que les Chinois vont continuer à boire du cognac ! La Chine est un marché formidable, difficile et stimulant. Ce qui nous oblige à faire des efforts et à être compétitifs.

Dominique Hériard Dubreuil préside le conseil d'administration de Rémy Cointreau.

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LUXE - Bruno Pavlovsky : « Chanel franchit une nouvelle étape dans sa conquête du pays »

Les Echos, no. 20541 - Industrie, jeudi, 29 octobre 2009, p. 19

Bruno Pavlovsky, président des activités mode de Chanel

Chanel va ouvrir en décembre deux nouvelles boutiques en Chine, dont un « navire amiral » à Shanghai. Le groupe, aux mains de la famille Wertheimer, veut accélérer son développement dans ce pays désormais clef.

Où en est Chanel en Chine ?

Décembre va être un mois capital pour notre conquête de la Chine. Nous allons ouvrir le 3 décembre une nouvelle boutique à Hangzhou et une autre à Shanghai, à l'hôtel Peninsula. Cette dernière sera notre navire amiral dans le pays. On y a mis toute notre énergie pour présenter l'ensemble de l'univers de Chanel, des accessoires à la joaillerie. Il s'agit de montrer les valeurs du luxe portées par Chanel et de faire comprendre le positionnement de la marque aux Chinois. Nous voulons à l'occasion de cette ouverture faire de Shanghai une capitale de la mode. Un défilé y sera organisé. Une centaine de journalistes du monde entier sont invités.

Il s'agit d'un développement clef pour la maison ?

Cette boutique de Shanghai sera notre cinquième dans le pays, où notre développement n'en est qu'à son démarrage. C'est devenu pour nous un marché stratégique sur lequel nous progressons étape par étape. Dix ans après notre première implantation, à Pékin en 1999, nous passons un nouveau palier.

Aujourd'hui, si on inclut Hong Kong et Macao, où Chanel est présent depuis trente ans, notre réseau dans la grande Chine va atteindre 15 magasins. Ce qui commence à peser.

Quelle est votre stratégie d'implantation dans le pays ?

Quand nous sommes arrivés en Chine, notre activité était déjà bien développée à Hong Kong. Notre idée au démarrage était d'ouvrir des boutiques autour de la Chine, où les Chinois se rendaient régulièrement. Car, à l'époque, il n'était pas facile de s'implanter dans le pays.

La mise en place de notre premier centre logistique à Shanghai a constitué une véritable aventure. Il a fallu cinq ans pour constituer et former une équipe locale. Dans un premier temps, nous avons donc beaucoup appris pour ne pas faire de faux pas, en commençant par faire apprécier la marque aux Chinois, à partir de Hong Kong.

Aujourd'hui, nous franchissons un nouveau cap. Notre objectif est d'ouvrir dès 2010 deux boutiques par an en Chine, en fonction des opportunités, et ce sur les cinq ans à venir. Et, déjà, on retrouve l'engouement pour la marque qu'on a vu au Japon en son temps.

Les Chinois connaissent-ils bien les valeurs du luxe ?

Les Chinois, qui sont de grands commerçants, apprécient le luxe depuis longtemps. Ce qui est nouveau, c'est qu'ils peuvent plus en profiter et plus facilement qu'en venant dans nos boutiques à Paris ou à Londres. Nous voyons de plus en plus de clientes chinoises qui connaissent la mode. Pour les autres, nous avons encore beaucoup de travail pour communiquer sur la marque, sa créativité et son savoir-faire, et faire la différence avec les autres maisons de luxe. Car il y a une vraie sensibilité de la clientèle au prix.

Quelle est la place de la Chine dans votre stratégie ?

Nous avons un réseau de 170 boutiques dans le monde. Jusque-là, Chanel était bien ancré dans ses trois zones historiques, l'Europe, les Etats-Unis et le Japon. Aujourd'hui, trois nouveaux marchés sont à développer : la Chine - probablement le plus important et aujourd'hui le plus dynamique -, la Russie et le Moyen-Orient.En Chine, nous enregistrons une croissance à deux chiffres chaque année. Ce qui est important à un moment où l'économie et l'activité du luxe, en particulier, sont en recul aux Etats-Unis et au Japon, alors que l'Europe résiste bien. Ce que je peux vous dire, c'est que les ventes du groupe Chanel vont encore être en progression en 2009.

PROPOS RECUEILLIS PAR DOMINIQUE CHAPUIS

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LUXE - Fauchon revoit ses plans après des déconvenues

Les Echos, no. 20541 - Industrie, jeudi, 29 octobre 2009, p. 19

Alléché par la « magie » du marché chinois, le groupe Fauchon admet aujourd'hui qu'il a dû complètement revoir sa stratégie de développement pour équilibrer des comptes locaux qui ne l'étaient pas. Arrivé, avec un partenaire chinois, en 2007 à Pékin, Fauchon évoquait, lors de l'inauguration d'une impressionnante boutique de trois étages située dans l'un des plus beaux « malls » de la capitale, l'ouverture rapide de 13 adresses dans tout le pays. Deux ans plus tard, deux des étages du magasin pékinois ont fermé.

« La Chine reste une priorité pour nous, mais nous allons l'aborder différemment », explique Isabelle Capron, la directrice générale de la société, qui annonce des projets de boutiques plus petites ou de simples stands de la marque dans des grandes surfaces.« A la faveur d'un taux de croissance colossal et avec la promesse des JO, beaucoup de choses ont été surévaluées et plusieurs enseignes du secteur, notamment dans l'hôtellerie haut de gamme, ont connu des ­déconvenues », assure la responsable, qui croit toujours à une explosion du marché du luxe chinois sur le long terme, mais pointe son actuel manque de maturité.« Dans ce secteur, la Chine est ­sûrement le futur Japon, mais ce n'est pas pour tout de suite », souffle-t-elle.

DENIS COSNARD

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LUXE - Adrian Cheng veut faire connaître les designers français

Les Echos, no. 20541 - Industrie, jeudi, 29 octobre 2009, p. 19

Le jeune directeur général du groupe familial New World Development Company cherche des marques françaises à distribuer en Chine.

« Je veux faire connaître les designers français en Chine. »Tel est le projet d'Adrian Cheng, héritier d'une grande famille chinoise et directeur général New World Development Company. Ce groupe de distribution à capitaux familiaux compte 33 grands magasins et affiche un chiffre d'affaires de 3,8 milliards en 2008. Il cherche à se développer dans le luxe à travers sa société Luxba, qui distribue déjà Moschino en Chine.« Cela constitue une plate-forme de distribution pour des marques en Chine. Nous distribuons déjà Burberry, Zegna, Cartier_ plusieurs centaines de marques. Nous avons aussi 800 bijouteries disséminées dans toute l'Asie, et nous produisons en outre des films et des concerts »,explique le jeune homme.

Art, luxe et nature

Il affiche de grandes ambitions, car il mise sur l'expansion de la classe moyenne chinoise, friande de marques qui donnent un statut : « Nous allons ouvrir trois à quatre magasins par an, et le groupe devrait croître de 10 % par an au moins »,prévoit-il. Venu à Paris pour trouver des designers qu'il souhaite diffuser à travers ses points de vente, il a aussi le projet de créer des centres commerciaux tels que le K11 installé à Hong Kong, qui se veut le premier centre commercial mêlant art, luxe et nature.

Il estime aussi qu'il est possible de faire fabriquer sous licence : « Avec la crise, les entreprises aux critères de qualité trop bas ont disparu et on peut donc désormais faire fabriquer des produits de qualité, en particulier si l'on fait une gamme spécifique pour le marché chinois. »C'est là en effet, selon lui, l'une des conditions pour réussir sur ce marché, où les clients ne sont pas tous prêts à dépenser autant que les Occidentaux pour accéder aux produits de leurs rêves.

Selon Adrian Cheng, une marque ne peut réussir en Chine que si elle dispose d'une collection très complète, allant du vêtement de luxe au sport en passant par les accessoires. Dans un pays aussi vaste, les goûts varient d'une région à l'autre, souligne-t-il :« Les Pékinois préfèrent les vêtements plus simples, à Shanghai les motifs floraux sont appréciés, dans le Sud, personne ou presque ne met de costume, il faut des vêtements de sport. »

M. CITTANOVA

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