dimanche 31 janvier 2010

LE LIVRE DU MOIS - Le Singe et le Tigre : Mao, un destin chinois par Alain Roux

l'Humanité - Tribune Idées, lundi, 23 novembre 2009

S'appuyant sur de nombreux documents inédits, l'historien Alain Roux livre une remarquable biographie du dirigeant chinois, qu'il veille à situer « dans son temps et son espace ».

Trente-trois ans après sa mort, Mao Zedong, dont le portrait trône à l'entrée de la Cité interdite à Pékin, est encore à découvrir. Comment évaluer la démarche et le rôle d'une personnalité qui a profondément et durablement marqué la Chine actuelle de son empreinte ? Les années ont passé et le Grand Timonier, le plus souvent jadis objet de culte, devient objet d'histoire. S'appuyant sur nombre d'ouvrages et de documents inédits, c'est en historien sinologue, pratiquant un travail rigoureux, qu'Alain Roux nous livre une remarquable biographie du dirigeant chinois, qu'il veille à situer « dans son temps et son espace ».

L'auteur retrace l'itinéraire de celui qui fut à la fois un dirigeant totalitaire, responsable de millions de morts, et un chef d'État capable d'insuffler un nouveau dynamisme et une nouvelle fierté à ses compatriotes. Cette biographie s'attache à comprendre la complexité de cette image et à expliquer, loin des portraits complaisants ou de procès à charge, les deux genres se privant d'absence de réflexion sur la société chinoise, ses contradictions, son évolution. « Les progrès considérables dans la connaissance des écrits et des discours de Mao Zedong, ainsi que l'évolution politique de la Chine durant ces trente dernières années ont permis de sortir la biographie de Mao du genre hagiographique », rapporte Alain Roux. Comment s'est construit Mao le révolutionnaire qui a abattu le régime corrompu de Tchang Kaï-chek, qui a suscité une mobilisation libératrice de la paysannerie, a cassé la société patriarcale, jeté les bases d'un État moderne et restauré la souveraineté nationale ? Par quel cheminement est-il devenu ce tyran absolu, coupable de deux catastrophes successives, la famine du grand bond en avant et le chaos meurtrier de la révolution culturelle ? Et qu'est-ce qui explique le respect dont il jouit encore auprès de la grande masse du peuple chinois ? « Je cherche à expliquer et non à justifier ce qui ne peut l'être », relève Alain Roux qui situe toujours « dans le temps » la formation de cette « pensée Mao Zedong » en présentant les principaux textes où elle s'est exprimée dans leurs relations avec la vie de leur auteur : ce sont souvent des réponses à des problèmes immédiats, estime l'historien.

« Il y a en moi un peu de tigre - c'est le principal - et aussi un peu de singe - c'est secondaire », écrivait, en juillet 1966, Mao à sa femme Jiang Qing, pour lui annoncer le lancement de la Révolution culturelle. Le tigre « roi de la montagne », détenteur d'un pouvoir absolu, le singe, symbole de l'intelligence au service de la sagesse et de la vérité, mais aussi de la ruse et de l'absence de scrupules. Étrange confidence.

Dominique Bari

PLUS D'INFORMATIONS - Le singe et le tigre, Mao un destin chinois. Alain Roux. ditions Larousse, septembre 2009, 800 pages, 24,70 euros.

© 2009 l'Humanité. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

vendredi 29 janvier 2010

ANALYSE - Le temps de l'ère chinoise ? - Alain Frachon

Le Monde - Analyses, vendredi, 29 janvier 2010, p. 2

A peine commencée, l'année est déjà chinoise . 2010 a vu le produit intérieur brut de la Chine dépasser celui du Japon, et les exportations chinoises devancer celles de l'Allemagne. La Chine est doublement sacrée : deuxième économie de la planète, premier exportateur mondial. A la " une " de la presse, chiffres et estimations dressent le portrait de la superpuissance de demain. Exemples. D'ici à la fin de l'année, le budget chinois de la défense deviendra le deuxième du monde. Les 27 millions d'étudiants du pays forment la plus forte concentration de QI jamais assemblée. Dans les cinq ans à venir, l'empire du Milieu construira 97 aéroports et 83 métros pour ses mégalopoles. Doté de plus de 2 milliards de dollars (1,42 milliard d'euros) de réserves, le fonds souverain chinois est potentiellement le plus gros investisseur mondial.

Avec une croissance à deux chiffres, la Chine tire l'économie mondiale. L'inventeur du concept des BRIC (les puissances émergentes que sont le Brésil, la Russie, l'Inde et la Chine), Jim O'Neill, économiste en chef de la maison Goldman Sachs, prophétise : en 2027, la puissance économique chinoise aura rattrapé celle des Etats-Unis. Si Goldman Sachs le dit... Preuves ultimes : à Davos, l'unique restaurant chinois est réservé depuis des semaines, parce que Pékin a dépêché au Forum sa plus nombreuse délégation; aux Internatinaux de tennis d'Australie, deux Chinoises étaient en demi finale...

Dans l'unanimisme des experts célébrant l'inévitable avènement de l'ère chinoise, il y a une voix dissidente : celle de l'Américain Minxin Pei (université de Princeton), qui, dans la revue de la Fondation Carnegie, émet des doutes sur la capacité de la Chine à passer du statut de puissance à celui de superpuissance.

Réserves économiques d'abord. Rien ne prouve que Pékin saura maintenir pareil taux de croissance. L'histoire économique enseigne plutôt le contraire. La Chine vieillit : les plus de 60 ans représenteront près de 20 % de la population d'ici à 2020. Tiré par les exportations et un yuan sous-évalué, son modèle de développement n'est pas à l'abri de réactions protectionnistes. La Chine n'a pas encore montré son aptitude à la transition vers un type de croissance nourrie par la demande intérieure. Il lui faudra au moins trente ans pour sortir de la misère ses centaines de millions de paysans.

Réserves " écologiques " ensuite, dans un pays où la pollution tue quelque 750 000 personnes chaque année. La Chine ne restera pas longtemps indifférente au coût environnemental d'un mode de développement ravageur.

M. Pei formule des réserves politiques sur la capacité du Parti communiste à conserver le monopole du pouvoir en cas de baisse durable de la croissance. Il note la méfiance que Pékin suscite dans son environnement, de l'Inde à la Russie. Il est moins péremptoire que les prophètes de l'ère chinoise. Raison de plus pour lui prêter l'oreille.

Alain Frachon / Courriel : frachon@lemonde.fr

© 2010 SA Le Monde. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Le secrétaire américain au Commerce met la Chine en garde - Yves Bourdillon

Les Echos, no. 20604 - International, vendredi, 29 janvier 2010, p. 6

Le secrétaire américain au Commerce, Gary Locke, a affirmé hier que « l'incident » subi récemment par Google en Chine « rappelait les difficultés toujours rencontrées par les entreprises étrangères et américaines présentes » et que cela pourrait dissuader les entreprises américaines de « pénétrer le marché chinois », ce qui serait « mauvais au final » pour les deux pays. Alors que les relations entre les deux pays se sont tendues après la dénonciation par Google, le 12 janvier, d'attaques massives par des pirates informatiques venant de Chine et de la censure dans ce pays, Gary Locke, dans un discours devant le US-China Business Council à Washington, a appelé la Chine à devenir plus « transparente, prévisible et engagée en faveur de l'Etat de droit ».

© 2010 Les Echos. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Chine : Twitter se rebelle à son tour

Libération, no. 8931 - Ecrans, vendredi, 29 janvier 2010, p. 29

Google fait des émules. Hier, Evan Williams (PHOTO), le PDG du site de microblogging Twitter, a annoncé qu'il entendait combattre le blocage de Pékin, ainsi que des pays qui censurent le Web. En juin, à la veille de l'élection présidentielle, l'Iran avait brièvement bloqué Twitter et le réseau social Facebook.

© 2010 SA Libération. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

ENQUÊTE - Les marques chinoises partent à l'assaut du monde - Jean-Yves Guerin

Le Figaro, no. 20371 - Le Figaro Économie, vendredi, 29 janvier 2010, p. 20

Les uns après les autres, les grands groupes chinois disposent leurs pions à l'étranger avec l'ambition de devenir des leaders mondiaux.

Un Russe conduit sa voiture Geely dans la toundra, un Américain prend une bière dans son minibar Haier, une BYD fend l'autoroute de Dubaï, pendant qu'un Européen pianote sur son ordinateur portable Lenovo... Il ne s'agit pas d'une fiction futuriste : ces marques chinoises ont déjà débarqué sur tous les continents. Longtemps usine du monde qui produisait pour des marques occidentales ou japonaises, le visage du « made in China » se redessine peu à peu.

Les groupes qui ont réussi à sortir de leurs frontières se comptent encore sur les doigts de la main. Mais « d'ici cinq à dix ans, nous allons assister à l'émergence de marques chinoises extrêmement pointues », estime Shaun Rein, directeur du cabinet China Market Research Group, à Shanghaï. À côté d'Adidas, c'est maintenant Lining, marque de vêtements de sport créée par le premier médaillé d'or olympique chinois du même nom, qui séduit les Chinois et a posé sa première pierre à l'étranger, à Singapour.

La politique du « zou chuqu »

Avec un marché national en plein boom, ces nouveaux étendards de l'empire du Milieu amassent des fonds pour financer leur conquête du monde. « Ils profitent de la crise avec des consommateurs qui veulent acheter moins cher et le gouvernement qui achète de plus en plus chinois », souligne David Tse, professeur à la Hongkong University. Jouant sur les effets de volume, la plupart restent dans l'entrée de gamme et s'approprient de plus en plus des technologies banalisées, surtout dans l'électronique.

Pékin a placé la barre très haut, en voulant compter, d'ici aux dix prochaines années, 50 marques chinoises dans le classement Fortune des 500 premières entreprises mondiales. Au dernier pointage, l'année dernière, l'empire du Milieu plaçait déjà 37 de ses champions dans ce top 500. En tout cas, ces ambitions ont valu des frictions commerciales à la république populaire, objet d'une plainte américaine devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour subventions illégales à des entreprises pour développer leur marque.

La velléité de la Chine de créer des géants internationaux n'est pas nouvelle. Le gouvernement lance sa politique du zou chuqu, littéralement « aller dehors », dès les années 1990. Pékin est alors en plein nettoyage de ses sociétés d'État et le gouvernement pense que seule une concurrence venue de l'extérieur pourra doper les performances de ses entrepreneurs. C'est ainsi que commencent les négociations pour entrer à l'OMC, dont la Chine est membre depuis 2001. Les leaders chinois n'ont plus qu'à aller chercher d'autres marchés pour conserver leur position dominante. C'est ce qui a poussé des entreprises comme Huawei et ZTE, équipementiers télécoms, ou encore Haier, numéro un de l'électroménager en Chine et leader mondial de la fabrication de réfrigérateurs, à s'internationaliser.

Depuis, une nouvelle génération d'entrepreneurs est arrivée et ne fait qu'amplifier le phénomène. Ils ont souvent démarré leur propre entreprise - sans passer par l'acquisition d'une société d'État et débordent d'ambitions. À 41 ans, Feng Jun, PDG d'Aigo, fabricant d'appareils électroniques, tire 20 % de ses revenus de l'international et espère bien porter ce chiffre à 50 % rapidement pour devenir le « prochain Samsung ».

Constructeurs de voitures hybrides et électriques, BYD a, de son côté, annoncé son intention de se lancer sur le marché américain cette année. L'entreprise installée à Shenzhen compte Warren Buffett parmi ses actionnaires. Déjà présents au Moyen-Orient ou en Asie du Sud-Est, d'autres constructeurs automobiles comme Chery et Geely espèrent aussi pouvoir conquérir les pays développés. Dans un contexte de consolidation du marché chinois, certains se disent qu'une notoriété hors des frontières pourrait leur éviter d'être avalé par un concurrent à domicile.

Mais cette conquête est ardue. Le « made in China » conserve une image désastreuse sur le plan de la qualité, régulièrement alimentée par des rappels de produits. Les consommateurs européens ne paraissent pas encore prêts à conduire des voitures chinoises. La barrière culturelle reste aussi un obstacle de poids. Les managers chinois d'aujourd'hui ne sont pas formés pour gérer des équipes étrangères. Ce choc des mondes a sans aucun doute contribué à l'échec de Lenovo dans le développement de la branche PC d'IBM rachetée en 2005. La compagnie vient d'annoncer un recadrage de sa stratégie, qui se concentrera essentiellement sur le marché chinois.

PHOTO - China's Vice-Premier Li Keqiang attends a session at the World Economic Forum (WEF) in Davos January 28, 2010.


INTERVIEW - Charles-Edouard Bouée, directeur général en Chine du cabinet de stratégie roland berger

Quelles sortes d'entreprises chinoises cherchent à imposer leur marque à l'export ?

Essentiellement des sociétés qui ont une position très installée sur leur énorme marché intérieur. Ainsi, Haier qui fait de l'électroménager (frigidaires, climatiseurs, téléviseurs...) est leader du marché national en Chine. Ce qui lui a permis de s'implanter à l'étranger, notamment aux États-Unis, où leur réfrigérateur pour célibataires a été un vrai succès. Néanmoins, pour Haier comme pour les autres, le gros du chiffre d'affaires se fait toujours en Chine.

Dans quel secteur les groupes chinois s'implantent-ils le plus à l'étranger ?

Dans l'industrie pétrolière et, de façon plus globale, dans toutes les activités liées aux ressources naturelles. L'explication est simple : hormis le charbon, la Chine n'a pas beaucoup de réserves naturelles. Du coup, le gouvernement a incité les groupes oeuvrant dans ces domaines à se développer hors de leurs frontières. Ainsi, les Chinois ont pris des participations dans les mines australiennes.

Quel rôle jouent les pouvoirs publics dans ce mouvement ?

Ils incitent leurs groupes leaders à s'internationaliser, mais à prendre leur temps quand il s'agit d'acquérir des entreprises étrangères. Il y a eu, en effet, quelques échecs comme le rachat de la branche téléviseurs de Thomson par TCL ou des cas difficiles, mais aussi des acquisitions réussies comme celles d'Adisseo et de la branche silicones de Rhodia par China National Chemical Corp. J.-Y. G.


La stratégie de rachat des entreprises occidentales pour aller plus vite

POURQUOI chercher la notoriété quand on peut l'acheter ? C'est le raisonnement de certaines sociétés chinoises qui, à défaut de pouvoir rapidement se faire un nom hors de leurs frontières, s'offrent des marques internationales. « Cela reste le cas le plus courant. Les entreprises génèrent des profits sur le marché domestique et saisissent l'opportunité quand elle se présente », résume Terence Tsai, professeur de marketing à la China Europe International Business School (CEIBS), à Shanghaï.

Récemment, le secteur automobile s'est distingué par cette stratégie. Fin décembre, Geely a signé un accord pour acquérir le suédois Volvo. En octobre dernier, Tengzhong avait finalisé le rachat de l'américain Hummer. Et si Baic n'a pas concrétisé son projet, il s'était positionné pour reprendre Opel à General Motors. Des opérations qui, à chaque fois, valent aux groupes chinois la une des journaux occidentaux.

Mais ces nouveaux géants ne cherchent pas seulement à accroître leur notoriété avec cette politique. Réseau de distribution, nouvelle technologie, ils ont compris tout l'intérêt d'acquérir des sociétés déjà connues en Occident, les aidant aussi à pallier leur incompréhension des règles de management sur ces marchés.

D'ailleurs, les échecs retentissants de plusieurs entreprises chinoises mettent au jour les difficultés de ces dernières à s'internationaliser. En Europe, TCL rachète la branche téléviseurs de Thomson en 2004 pour déposer le bilan deux ans après. En Asie, le constructeur Shanghai Automotive Industry Corporation, qui a pris 51 % du capital de Ssangyong, a dû se résoudre aussi à déposer le bilan de sa filiale sud-coréenne début 2009. Les fleurons de l'économie chinoise n'ont cependant pas beaucoup le choix.

Le Congrès n'est pas d'accord

Car, quand il ne s'agit pas d'une opération de sauvetage, les fonds chinois sont rarement les bienvenus. En 2005, l'offre de CNOOC (China National Offshore Oil Corporation), troisième pétrolier chinois, pour le rachat du numéro six américain, Unocal, provoque une levée de boucliers au Congrès. L'an dernier, ce sont les dirigeants australiens qui se sont émus de l'offre d'augmentation de capital de Chinalco, numéro un de l'aluminium en Chine, dans le groupe minier Rio Tinto.

L'argument souvent objecté est que ces rachats touchent des secteurs stratégiques. Mais les biens de consommation sont aussi dans le viseur. Haier avait fini par renoncer à son offre pour le rachat de l'américain Maytag en 2005, face à l'hostilité de l'opinion publique et après une âpre bataille contre Whirlpool, qui avait revu sa copie et déboursé 1,4 milliard de dollars pour l'emporter. -

© 2010 Le Figaro. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Hyundai pourrait profiter des problèmes de qualité chez Toyota - Ingrid François

Les Echos, no. 20604 - Industrie, vendredi, 29 janvier 2010, p. 23

Le constructeur sud-coréen confirme sa résistance à la crise, en doublant son bénéfice net en 2009. Le rappel massif de véhicules chez Toyota pourrait l'aider à surmonter les difficultés qui l'attendent en 2010.

Hyundai a de nouveau montré hier qu'il faisait partie, avec Volkswagen et Ford, des groupes résistants dans la crise. Le premier constructeur sud-coréen a réalisé sur les trois derniers mois de 2009 un résultat net de 946 milliards de wons (584 millions d'euros), presque 4 fois équivalent à celui du troisième trimestre 2008. C'est bien mieux que le consensus des analystes interrogés par l'agence Bloomberg, à 815 milliards de wons. Hyundai termine ainsi l'année sur un résultat net de 2.962 milliards de wons (1,8 milliard d'euros), à comparer avec un bénéfice de 1,4 milliard en 2008. Et ce alors que ses concurrents français, eux aussi présents sur les petits modèles, devraient être dans le rouge. Les ventes sur l'année entière ont atteint 19 milliards d'euros, en baisse de 1 %.

Le constructeur, qui s'est hissé l'an dernier à la quatrième place mondiale avec sa marque soeur Kia, a bénéficié d'une part de la faiblesse du won, qui dope ses ventes à l'étranger, mais aussi des bonus écologiques introduits sur ses marchés les plus importants, comme la Chine ou la Corée. Ses modèles compacts, d'une qualité correcte pour leur prix, correspondent bien aux attentes actuelles des consommateurs. Les ventes sont aussi appuyées par une stratégie marketing payante, comme par exemple l'assurance-chômage pour ses clients, qui peuvent être indemnisés s'ils perdent leur emploi après l'achat d'un véhicule.

Combler l'écart avec le japonais

En France, la marque sud-coréenne se classe en 16e position, avec 21.506 unités vendues, en hausse de 17 % par rapport à 2008, sachant que son autre marque Kia est 17e, avec 21.157 véhicules (+ 34 %). Aux Etats-Unis, l'ensemble Hyundai-Kia, actuellement numéro sept du marché local, est l'un des seuls constructeurs à avoir augmenté ses volumes, après avoir inauguré deux usines. Hyundai affiche maintenant comme priorité d'y porter sa part de marché à 4,6 %, contre 4,2 % en 2009.

En 2010, le groupe sud-coréen devra faire face à un won plus fort, une concurrence plus intense et surtout à la fin des aides gouvernementales sur son marché local. Mais les déboires actuels de son concurrent Toyota sur des pédales d'accélération défectueuses aux Etats-Unis et dans beaucoup d'autres pays pourraient lui donner un coup de pouce inattendu. « Cela pourrait aider Hyundai à combler l'écart avec Toyota en termes d'image », estime Zayong Koo, analyste chez Nomura, cité par Bloomberg. Le japonais a confirmé hier que sa campagne de rappels concernera aussi l'Europe, selon des modalités qui restent à communiquer. En attendant, Toyota a été contraint hier de rappeler d'autres véhicules au Canada et en Chine. L'opération vise désormais 5,3 millions de véhicules, et devrait prendre de l'ampleur.

INGRID FRANCOIS

© 2010 Les Echos. Tous droits réservés.


Hyundai bat encore des records - Cyrille Pluyette

LE CORÉEN Hyundai est le grand gagnant de la crise. Après avoir annoncé hier un triplement de son bénéfice trimestriel sur la période octobre-décembre, à 821 millions de dollars, le groupe prévoit d'augmenter cette année ses ventes de 11 %, pour atteindre 3,46 millions de véhicules. En 2009, il en a écoulé 3,2 millions, soit un bond de 14 %, grâce au bon rapport qualité prix de ses modèles et à son offre de petites voitures. Hyundai a notamment gagné des parts de marché aux États-Unis et en Chine, où son modèle Elantra est devenu la voiture étrangère la plus vendue. Aux États-Unis, toute la difficulté consistera pour le groupe « à continuer à répondre aux attentes des consommateurs en sortie de crise », confiait John Krafcik, le patron du groupe en Amérique du Nord au Salon de Detroit.

© 2010 Le Figaro. Tous droits réservés.



Bookmark and Share

jeudi 28 janvier 2010

La Chine désormais premier débouché commercial du Japon

Les Echos, no. 20603 - International, jeudi, 28 janvier 2010, p. 8

En 2009, la Chine a absorbé un cinquième environ des exportations japonaises, plus que les Etats-Unis ne l'ont fait. Et la tendance ne devrait pas s'inverser de sitôt.

La Chine était déjà le premier partenaire commercial du Japon depuis 2004, elle constitue désormais son premier débouché à l'exportation, devant les Etats-Unis. Les statistiques commerciales pour 2009, publiées hier par le ministère japonais des Finances, montrent que la Chine hors Hong Kong a absorbé l'an dernier 10.239,06 milliards de yens (77,6 milliards d'euros) d'exportations de l'Archipel. En fait, Pékin qui talonnait d'année en année les courants d'exportation du Japon vers les Etats-Unis a l'an dernier moins souffert de la crise que le géant américain. En valeur, les ventes du Japon ont reculé de 20,9 % par rapport à 2008 vers l'empire du Milieu, mais de 38,5 % vers les Etats-Unis.

A cela, rien d'étonnant tant la structure des échanges est différente. Aux Etats-Unis, le Japon vend essentiellement des voitures ainsi que des biens de consommation tels les produits électroniques grand public. La crise a largement affecté tous ces postes. En Chine, depuis que le Japon y a massivement délocalisé ses activités d'assemblage, il y exporte essentiellement des biens d'équipement et des produits semi-finis comme les semi-conducteurs, à charge pour les ateliers chinois de les terminer, puis soit de les renvoyer au Japon, soit de les exporter vers le reste du monde. Tokyo vend par exemple peu d'automobiles à la Chine, car elles sont produites sur place pour le marché local.

Nouveau centre de gravité

La Chine, elle, importe désormais en provenance du Japon deux fois plus de produits chimiques et d'engins de construction, quatre fois plus de semi-conducteurs, presque autant de générateurs électriques et pratiquement deux fois plus d'instruments scientifiques et optiques que les Etats-Unis.

Vis-à-vis de la Chine, le Japon enregistre toutefois un important déficit commercial (1.193,41 milliards de yens, soit environ 9 milliards d'euros en 2009), alors que le solde des échanges avec les Etats-Unis reste fortement excédentaire, même s'il a diminué de près de moitié l'an dernier.

Au-delà de l'aspect purement statistique, ce changement dans le classement montre combien le centre de gravité de l'activité économique mondiale est en train de se déplacer en Asie. Chine et Japon constituent respectivement la troisième et la deuxième économie du monde. Fin 2008, selon les calculs de la Banque mondiale, ces deux économies représentaient ensemble plus de 15 % du PIB mondial. Compte tenu du développement de l'économie chinoise, ce chiffre est appelé inévitablement à grandir et confirme que « la Chine restera le plus gros marché du Japon devant les Etats-Unis », prédit Kyohei Morita, analyste de Barclays Capital.

MICHEL DE GRANDI

PHOTO - Chinese Vice President Xi Jinping delivers a speech during a welcome reception hosted by Japan China friendship groups in Tokyo, Tuesday, Dec. 15, 2009.

© 2010 Les Echos. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Les menaces d'inflation font tanguer les marchés asiatiques

Le Monde - Economie, jeudi, 28 janvier 2010, p. 15

Le point de vue de l'agence économique et financière, Reuters Breakingviews.

Al'exception de celle du Japon, les Bourses asiatiques viennent de vivre une semaine houleuse. Elles ont chuté de 7 %. Pour les gouvernements et les banques centrales, c'est à la fois une bonne et une mauvaise nouvelle.

Voyons d'abord les aspects négatifs. Les exportateurs asiatiques ne sont pas encore tirés d'affaire. Lundi 25 janvier, on a vu Foxconn, champion mondial de la fabrication des téléphones portables et propriété du géant taïwanais de l'électronique Hon Hai, émettre son quatrième avertissement sur résultats depuis 2008. La baisse de la demande et la faiblesse des prix ont provoqué un net recul des bénéfices. La place de Taïwan, où le secteur des technologies pèse lourd, en a subi les conséquences. Elle n'avait pas dévissé autant en une seule séance depuis six mois.

On peut aussi voir dans cette semaine boursière calamiteuse le signe d'une certaine réussite des pouvoirs politiques. La surabondance de liquidités avait contribué à mettre les marchés en ébullition, permettant aux indices de grimper de 70 % au cours de l'année 2009. Si l'on ne peut pas vraiment affirmer que les titres sont surcotés, il est quand même plutôt sain qu'une correction vienne calmer le jeu. C'est dans l'immobilier que le risque de surchauffe est le plus grand. Le montant total des ventes de biens réalisées en Chine a bondi de 87 % en 2009.

Pékin a réagi en programmant le relèvement progressif du niveau minimum de réserves que certaines banques doivent respecter. Il était temps de donner un bon coup de frein : entre le 1er et le 19 janvier, les banques chinoises ont distribué pour 1 450 milliards de yuans (212 milliards de dollars) de nouveaux prêts. Le record doit être à nouveau battu, puisque le chiffre surpasse la croissance époustouflante enregistrée début 2009.

Tour de vis

Il semble que les mesures prises pour lutter contre l'inflation aient commencé à drainer le marché d'une partie de ses liquidités. A Hongkong, les ventes de biens immobiliers ont marqué le pas au quatrième trimestre 2009. Les investisseurs s'attendent à ce que cette politique se durcisse, et les craintes de voir faiblir l'afflux de capitaux en provenance de Chine en cas de tour de vis supplémentaire de la part de Pékin ont fait plonger le dollar de Hongkong, pour le ramener à sa parité d'il y a quinze mois face au dollar.

D'un autre côté, les gouvernements d'Asie ont peur de tuer la croissance. C'est en effet ce qui pourrait se passer si une hausse trop rapide du coût du crédit se combinait avec une dépréciation brutale des actifs. En regardant les choses sous cet angle, on comprend mieux pourquoi la banque centrale chinoise a créé la surprise, mardi, en ne procédant à aucune modification de taux lors de son adjudication annuelle toujours très attendue.

A l'heure où les responsables politiques doivent trouver le juste arbitrage entre risque d'inflation et risque de décélération économique, on imagine mal comment les marchés asiatiques pourraient se mettre à l'abri de nouvelles secousses.

Wei Gu

(Traduction Christine Lahuec)

© 2010 SA Le Monde. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Prévisions de croissance du FMI : la Chine et les Etats-Unis en tête, l'Europe à la traîne

Le Monde - Economie, jeudi, 28 janvier 2010, p. 13

L'économie mondiale est en phase de reprise ", a déclaré, mardi 26 janvier, Olivier Blanchard, économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI), en annonçant une prévision de croissance pour 2010 meilleure qu'attendu, soit + 3,9 %, contre + 3,1 % prévus en octobre 2009. L'amélioration annoncée pour 2011 du produit intérieur brut mondial (PIB) est moins spectaculaire, puisque la croissance atteindrait + 4,3 %, et non + 4,2 %, comme prévu auparavant.

Les raisons de ce regain d'optimisme sont à chercher du côté des Etats-Unis (+ 2,7 % en 2010, contre + 1,2 %) et de la Chine (+ 10 % contre + 9 %). En effet, les entreprises américaines ont recommencé à stocker plus vite qu'espéré et les ménages ont maintenu leur consommation, en raison de " l'ampleur extraordinaire des mesures de relance ".

Plan de soutien massif à l'économie, crédit abondant et bon marché ont permis à la Chine de rebondir plus vite et plus fort que le reste du monde. D'ailleurs, ce sont les principales économies asiatiques (Inde : + 7,7 % contre + 6,4 %) qui " ouvrent la voie de la reprise mondiale ", note le rapport du FMI.

Les experts du Fonds soulignent que la reprise est " à plusieurs vitesses ". Car derrière le peloton asiatique, on trouve l'Afrique subsaharienne (+ 4,3 %, contre + 4,1 %), qui profite de la remontée des prix des matières premières.

En revanche, malgré la performance américaine, les économies avancées décollent très lentement, soit + 2,1 %, contre + 1,3 % prévu en octobre 2009. L'Allemagne (+ 1,5 %), la France (+ 1,4 %), le Royaume-Uni (+ 1,3 %) et l'Italie (+ 1 %) ne retrouvent pas leur rythme d'avant la crise.

Presque partout, l'année 2011 verra un léger affaissement de la reprise, car les plans de relance et les politiques monétaires seront arrivés à leur terme. Dans les pays avancés, Olivier Blanchard a souligné que, " si la demande privée ne prend pas le relais du soutien public, aucune reprise forte et durable ne peut être assurée ".

Une délicate sortie de crise

Le FMI ne voit pas de reprise de l'inflation, ni de bulles spéculatives dans un futur proche. Il salue le retour de la confiance qui a contribué à améliorer le climat sur les marchés financiers.

En revanche, le Fonds s'inquiète du risque d'un nouveau ralentissement de la croissance mondiale sous l'effet de l'" abandon prématuré et non concerté des politiques de soutien ", de la hausse du chômage, des inquiétudes sur la viabilité des finances publiques, de la hausse du coût des emprunts et d'un rebond des prix des matières premières.

" Dans ces conditions, note le rapport, les pouvoirs publics font face à une tâche gigantesque : rééquilibrer la demande en faveur du secteur privé et non plus du secteur public, et en faveur des pays à excédent extérieur excessif et non plus de ceux dont le déficit est excessif, tout en remettant en état le secteur financier et en favorisant la restructuration " des secteurs non financiers.

S'il a modifié ses prévisions, le Fonds ne change pas ses conseils. En premier lieu, " les mesures de relance budgétaire prévues pour 2010 doivent être exécutées intégralement " pour éviter une rechute. Ensuite, le retour à l'orthodoxie budgétaire et monétaire devra tenir compte de la situation de chaque pays, les plus déficitaires devant renouer plus tôt avec des excédents.

Le FMI préconise de rassurer les marchés en faisant savoir dès maintenant à quelles conditions il sera mis fin au taux zéro et aux politiques d'argent facile. L'afflux des capitaux dans certains pays émergents pourrait être contrôlé par une appréciation de la monnaie, un assouplissement du taux de change et même des restrictions aux entrées de capitaux.

Alain Faujas

PHOTO - Dominique Strauss-Kahn (L), the managing director of the International Monetary Fund, and Liu Mingkang, the chairman of the China Banking Regulatory Commission, attend the Asian Financial Forum in Hong Kong January 20, 2010. The world's economy is recovering more strongly than expected and the projected growth rate in 2010 is likely to beat the forecast 3 percent, Strauss-Kahn said on Wednesday.

© 2010 SA Le Monde. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Des paysans chinois se mobilisent en faveur du meurtrier d'un cadre corrompu

Le Monde - International, jeudi, 28 janvier 2010, p. 7

Zhang Huping, 24 ans, est à Pékin depuis samedi 23 janvier pour suivre, auprès de la Cour suprême, la demande d'appel de son frère, Zhang Xuping (PHOTO), 19 ans, condamné à mort pour avoir assassiné, en septembre 2008, Li Shiming, le responsable du parti du village de Xiashuixi, à Luliang (province du Shanxi).

Il attend de rencontrer l'avocat Liu Xiaoyuan, actuellement en déplacement, devenu célèbre pour avoir chroniqué sur son blog, en 2008, le procès de Yang Jia, accusé de l'assassinat de six policiers dans un commissariat à Shanghaï.

Chroniqué seulement : la mère du prévenu, que comptait aider maître Liu, fut enlevée par la police et placée au secret dans un hôpital psychiatrique. Condamné à mort et exécuté dans la foulée, Yang Jia, qui s'était fait rosser par la police pour une broutille avant d'aller se venger, est devenu un héros sur l'Internet chinois.

Cette fois, la victime, le chef local du parti, qui pouvait compter sur un réseau de protecteurs et disposait d'hommes de main, s'était tellement fait d'ennemis parmi la population que celle-ci s'est mobilisée pour soutenir le justicier.

Malgré la discrétion de la presse, l'histoire de son frère Zhang Xuping fait son chemin sur les forums Internet en cette fin d'année lunaire où se multiplient les émeutes dans les zones rurales. La police a tué à deux reprises en tirant sur la foule, début janvier, dans le Guangxi et le Guizhou, tandis qu'une femme est morte dans le Jiangsu lors d'une bataille entre des gangsters à la solde du gouvernement local et des habitants refusant de déménager.

A Xiashuixi, la région de Loess au paysage mité par les mines de charbon, Li Shiming était connu pour accaparer des parcelles de forêt dont il faisait abattre les arbres sans autorisation. Il s'arrangeait ensuite pour requalifier les terrains, qui accueillaient ensuite des projets industriels.

Les villageois, qui ont un droit de propriété collective sur les terres et se les distribuent, n'étaient dédommagés que de façon symbolique. Les récalcitrants étaient agressés, comme Wang Waixin, cité par le South China Morning Post. Son terrain fut confisqué pour construire un ensemble de logements.

Les pétitionnaires allaient en prison : Wang Hou'e, la mère de Wang Xuping, que le chef du parti prend en grippe car elle est la plus active au sein d'un groupe de villageois en colère qui font le déplacement à Taiyuan, la capitale provinciale, pour dénoncer ses pratiques, fera un an de prison en 2002. Elle y subit des sévices.

" Mon frère avait 12 ans. Moi, je venais d'entrer au lycée. Mon frère a un certain sens de la justice et a très mal supporté cette période. On n'avait pas un sou ", raconte au Monde Wang Huping. " Xuping avait de mauvaises notes, il se bagarrait ", poursuit-il.

Quand sa mère sort de prison, l'adolescent est renvoyé de son école, sur instruction, affirme son frère, de Li Shiming. Il tombe dans la petite délinquance, fait de la prison et tente de se suicider.

La presse locale épingle pourtant certaines des dérives du chef du parti. En vain. C'est un habitant du nom de Zhang Huping (un homonyme du frère du meurtrier) qui commandite l'assassinat de Li Shiming alors que celui-ci est en réunion dans une école, le 23 septembre 2008. Il donne à Zhang Xuping des chaussures, des habits noirs, et 1000 yuans (100 euros).

Le jeune homme pénètre dans l'école et plante une lame dans le flanc de l'officiel, seul à ce moment. Celui-ci rejoint en titubant sa voiture de luxe et démarre. Mortellement blessé, il n'atteindra jamais l'hôpital. Zhang Xuping sera arrêté peu après.

Mais les villageois soutiennent la famille et rassemblent 10 000 yuans (1 000 euros). Zhang Huping, le frère, quitte son travail dans une aciérie : il a parcouru à ce jour, raconte-t-il au Monde, 48 villages de la région et rassemblé 28 000 signatures de soutien.

En août 2009, le procès de Zhang Xuping, dans la ville voisine de Luliang, est ajourné, car les villageois sont venus en masse. Il s'est tenu en novembre sous une imposante protection policière. La pétition, qui rappelle un conte de la Chine ancienne, où les villageois demandent clémence à l'empereur pour le meurtrier d'un officiel corrompu, a été rejetée par les magistrats.

Désormais, l'avocat Liu Xiaoyuan, qui n'assure pas encore officiellement la défense du jeune Xuping, compte sur le soutien de l'opinion publique. Il espère obtenir au moins un sursis à l'exécution ou une commutation de la peine.

Le cas est révélateur des tensions croissantes dans les zones rurales à mesure que les habitants prennent conscience de leurs droits : " Les conflits dus à l'expropriation des terres se sont multipliés et intensifiés, confie l'avocat. Il existe des lois pour protéger les citoyens, mais les autorités locales font ce qu'elles veulent. "

Brice Pedroletti

© 2010 SA Le Monde. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Échanges de tirs coréens en mer Jaune - Sébastien Falletti

Le Figaro, no. 20370 - Le Figaro, jeudi, 28 janvier 2010, p. 7

Pyongyang fait monter les enchères avant de négocier avec Séoul et Washington.

Rien ne vaut une pincée de provocation militaire pour arriver en position de force à la table des négociations. Fidèle à une stratégie éprouvée, la Corée du Nord a fait monter brusquement la tension, hier, face à sa rivale du Sud dans les eaux disputées de la mer Jaune. Le matin, l'Armée populaire a tiré une trentaine d'obus à la limite de ses eaux territoriales, déclenchant immédiatement une centaine de coups de semonce des canons sud-coréens postés sur les îles d'alentour. « Cela doit cesser immédiatement », s'est étranglé, à Séoul, le ministre de l'Unification, Hyun In-taek. Peine perdue, quelques heures plus tard, les Nord-Coréens tiraient une nouvelle salve, sous couvert d'exercice militaire destiné à parer à toute éventuelle invasion des « va-t-en-guerre » capitalistes. Avant de promettre de nouveaux tirs.

Depuis un accrochage naval le 13 novembre, qui avait laissé un navire communiste en flammes, la tension est à son comble sur les eaux boueuses de la mer Jaune. Plus que jamais, Pyongyang dénonce la frontière maritime tracée par un général américain à la fin de la guerre de Corée, en 1953. Soixante ans après le début des hostilités, la Corée du Nord exploite cet ancien contentieux, estiment les experts, pour affermir sa position de négociation alors qu'elle s'apprête à reprendre les discussions avec sa rivale du Sud et les États-Unis. « C'est du classique, ils font monter les enchères », décrypte à Séoul une source occidentale qui a ses entrées à Pyongyang.

Alors que les obus pleuvaient, la propagande réaffirmait dans un communiqué l'urgence d'établir un traité de paix avec Washington. Un objectif qui, selon la Maison-Blanche, ne pourra être envisagé qu'une fois obtenus de Kim Jong-il des concessions sur le nucléaire et son retour aux pourparlers à six (incluant également la Chine, la Corée du Sud, le Japon et la Russie) qu'il boycotte depuis avril dernier. Des conditions américaines jugées « insolentes » par le Minju Chosun, journal du régime, qui exige également la levée des sanctions imposées par l'ONU après le second essai atomique conduit par Pyongyang en mai.

Monnayer un rapprochement

Face à cette nouvelle provocation militaire calculée, la Corée du Sud joue la désescalade. Après avoir menacé le Nord de « frappes préventives », la semaine dernière, Séoul n'a pas répondu à la seconde salve d'artillerie communiste. Surtout, Séoul a confirmé la tenue d'une réunion de négociations avec le Nord prévue le 1

février et visant à relancer la coopération dans le parc industriel de Kaesong, où 110 entreprises du Sud emploient 42 000 ouvriers du Nord. Un geste qui témoigne de la volonté nouvelle du président Lee Myung-bak de tisser le dialogue avec son rival communiste.

Partisan d'une ligne dure à son arrivée au pouvoir en 2008, l'ancien PDG de Hyundai prépare en coulisse un rapprochement afin de laisser sa trace dans l'histoire. « Le président veut tenir un sommet intercoréen avec Kim avant la fin de son mandat », confie un haut fonctionnaire sud-coréen. Autre enjeu, la tenue du sommet du G20 à Séoul, prévu en novembre et érigé en priorité nationale par Lee Myung-bak qui exige une amélioration des relations bilatérales afin de s'assurer que le dictateur ne gâchera pas la fête. Une opportunité pour Pyongyang, étranglé par les sanctions, de monnayer un rapprochement et obtenir une aide économique.

© 2010 Le Figaro. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

EXPO 2010 - José Frèches contre Michel Pébereau

L'Express, no. 3056 - INDISCRETS médias, jeudi, 28 janvier 2010, p. 26

Colère chinoise

Fidèle du chef de l'Etat, pour lequel il avait créé "NSTV", l'outil de communication de Nicolas Sarkozy sur Internet durant la campagne présidentielle, et artisan en chef du Pavillon français érigé à Shanghai en vue de l'Exposition universelle, José Frèches ne décolère pas contre le président du conseil d'administration de BNP-Paribas, Michel Pébereau (PHOTO). La banque française rechigne à parrainer cette exposition, à l'inverse de la plupart des grandes entreprises françaises implantées, comme elle, en
Chine. "Un "ticket" d'un montant pourtant modeste", souligne Frèches : 500 000 euros.

© 2010 L'Express. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

La Grèce n'a pas appelé la Chine à la rescousse

Le Soir - 1E - ECONOMIE, jeudi, 28 janvier 2010, p. 23

Les autorités grecques ont démenti avoir sollicité la Chine pour vendre des obligations d'Etat pour faire face à ses graves difficultés financières, comme l'avait affirmé le Financial Times. « Nous opposons un démenti catégorique, nous n'avons contracté aucun accord et n'avons donné aucun ordre pour contacter la Chine », a affirmé une source officielle du ministère grec des Finances. Le ministre des Finances, Georges Papaconstantinou (PHOTO), se rendra effectivement en Chine en février, mais « pas pour négocier avec le gouvernement chinois et placer des obligations ». Le différentiel entre les obligations grecques et la Bund allemand a atteint mercredi un nouveau plus haut depuis l'entrée de la Grèce dans le zone euro.

RAPPEL :

Mandatée par Athènes, la banque américaine Goldman Sachs a sollicité le gouvernement chinois pour acheter des obligations de l'Etat grec, selon le Financial Times, mercredi 27 janvier. Aux prises avec de graves difficultés budgétaires, la Grèce souhaite que la Chine acquière des titres de sa dette pour une somme pouvant aller jusqu'à 25 milliards d'euros, affirme le quotidien financier britannique. Pékin n'a pas accepté d'acheter autant de bons d'Etat, mais un accord plus modeste, de 5 milliards à 10 milliards d'euros, semblerait " possible ", selon le FT. Le ministre des finances grec, George Papaconstantinou, a affirmé qu'il se rendrait en Chine en février, sans avoir de " but fixé " pour le montant d'obligations à placer. Lundi, la Grèce a réussi sa première émission obligataire sur cinq ans, attirant cinq fois plus de demandes que le montant proposé.

© 2010 © Rossel & Cie S.A. - LE SOIR Bruxelles, 2010




Bookmark and Share

mardi 26 janvier 2010

Bank of China à l'affût de capitaux - Yann Rousseau

Les Echos, no. 20601 - Finance, mardi, 26 janvier 2010, p. 29

Ayant largement contribué à l'envolée du crédit en Chine en 2009, Bank of China se prépare à lever plusieurs dizaines de milliards de yuans de capitaux pour consolider son ratio de fonds propres.

Après avoir largement contribué l'an dernier à l'envolée du crédit ordonnée par Pékin, Bank of China se prépare à lever plusieurs dizaines de milliards de yuans de capitaux pour renflouer ses caisses. Hier, Li Lihui, le président de la banque publique, a confirmé aux analystes que son établissement préparait plusieurs opérations pour maintenir son ratio de fonds propres, estimé à 11,63 % en septembre dernier, au nouveau niveau légal de 11 % imposé par le régulateur (la CBRC) aux plus grands groupes financiers du pays.

Si le gouvernement central est ravi d'avoir réussi à générer en 2009 une croissance de 8,7 % en encourageant notamment ses banques publiques à débloquer, sans trop de réticences, 9.600 milliards de nouveaux prêts (995 milliards d'euros), il redoute désormais, à moyen terme, une poussée des créances douteuses et veut contraindre les établissements à se montrer cette année un peu plus rigoureux dans leur gestion des crédits et à consolider progressivement leurs niveaux de fonds propres. Le 19 mars, Bank of China réunira donc ses actionnaires, essentiellement des entités d'Etat, pour leur faire valider l'émission de quelque 40 milliards de yuans (4,1 milliards d'euros) d'obligations convertibles. « Les fonds levés serviront à renforcer le capital de base et le fonds de roulement de la banque », a expliqué la société, dans un communiqué boursier durant le week-end.

Cette vente, présentée comme une formalité, pourrait être suivie par l'émission d'actions sur les places de Shanghai ou de Hong Kong, où Bank of China est déjà coté. Hier, Lu Lihui a indiqué qu'il privilégiait, pour le moment, une opération à Hong Kong, où les procédures sont réputées plus souples et rapides. « La vente de titres à Hong Kong donnera une plus grande souplesse de calendrier à la banque », analysait Ma Yan, un expert de Nomura International. Si Bank of China n'a pour l'instant évoqué aucun montant précis pour cette levée, il a indiqué que cette future vente devrait être inférieure à 20 % des actions en circulation sur les différentes places du pays. Selon les calculs des analystes, une vente à Hong Kong - la plus probable -pourrait dès lors rapporter au maximum 59,1 milliards de dollars hongkongais, soit 5,4 milliards d'euros.

Introductions en Bourse

L'annonce de Bank of China pourrait être suivie, dans les prochaines semaines, par des initiatives des autres grandes banques du pays. S'ils se sont montrés un peu moins généreux, les géants Industrial and Commercial Bank of China (ICBC) ou China Construction Bank (CCB) pourraient eux aussi être contraints d'organiser des levées de capitaux. Ces opérations viendront s'ajouter aux probables introductions en Bourse d'Everbright Bank et d'Agricultural Bank of China. Le dernier des 4 mastodontes publics encore absent des marchés boursiers locaux espère lever, en 2010, jusqu'à 200 milliards de yuans (20,3 milliards d'euros) mais doit encore définir le calendrier de son introduction et dévoiler le nom de ses investisseurs stratégiques. Les médias chinois assuraient, la semaine dernière, que le groupe, qui a discuté en 2009 avec des banques occidentales, et notamment avec le Crédit Agricole, pourrait finalement décider de ne s'associer à aucun étranger pour plutôt privilégier des investisseurs domestiques.

© 2010 Les Echos. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Avec la 408, le constructeur français commence à « siniser » sa gamme

Les Echos, no. 20601 - Industrie, mardi, 26 janvier 2010, p. 21

PSA a présenté hier à Pékin, en avant-première mondiale, une berline Peugeot qui doit lui permettre d'amorcer sa reconquête du marché chinois, désormais le plus important au monde.

Après des années difficiles, PSA Peugeot Citroën espère avoir enclenché la juste mutation stratégique pour mieux pénétrer le marché automobile chinois, devenu l'an dernier le plus important au monde et le plus courtisé par les constructeurs occidentaux. Hier, le groupe a indiqué que sa nouvelle approche fondée sur une plus grande « sinisation » de sa gamme devrait théoriquement lui permettre de bondir de 3,4 % de part de marché aujourd'hui à près de 8 % en 2015. « Les parts de marché de Peugeot et de Citroën doivent plus que doubler dans le pays », a résumé Jean-Marc Gales, directeur des marques du constructeur français.

Adaptée aux goûts locaux

De passage à Pékin, le responsable était venu présider, devant un millier de concessionnaires, d'investisseurs et de journalistes locaux, la cérémonie de lancement en première mondiale de la 408, la nouvelle berline de Peugeot destinée à la Chine puis à d'autres pays émergents. Contrairement au reste de sa gamme actuellement vendue dans le pays - la 207 et la 307 -, le nouveau modèle n'est pas une adaptation tardive de véhicules vendus depuis des années sur les marchés traditionnels européens.

Il s'agit d'une voiture conçue par des équipes associant des ingénieurs et des designers français et chinois. « Ce modèle répond parfaitement aux goûts locaux. Elle bénéficie d'une grande habitabilité, d'un large coffre et de formes très statutaires », détaille Timothy Zimmerman, le directeur général de Peugeot en Chine. Contrairement aux acheteurs européens, qui privilégient massivement les voitures bicorps, les consommateurs chinois préfèrent toujours à 70 % les modèles tricorps, rappelle-t-il.

Avec cette nouvelle berline disponible dans les concessions à partir du 8 avril, Peugeot, qui a vendu l'an dernier 110.000 voitures en Chine, espère voir ses ventes atteindre 150.000 unités en 2010. Soit un bond de 30 %, le double de la croissance attendue cette année pour le marché chinois. L'an dernier, celui-ci a grimpé de 45 %, grâce notamment aux généreuses baisses décrétées par Pékin sur les taxes d'achat de véhicules de moins de 1,6 litre de cylindrée. « La 408 va nous permettre d'étendre notre gamme sur le segment clef du M1, qui représente 48 % du marché global chinois et a enregistré une progression de plus de 70 % l'an dernier », explique Jean-Marie Rivière, le directeur marketing et communication de Peugeot dans le pays. Affirmant, comme la plupart de ses concurrents américains, européens et japonais, vouloir faire de la Chine l'un de ses marchés prioritaires, PSA Peugeot Citroën, promet désormais de multiplier les avant-premières mondiales dans le pays. Il compte aussi renforcer l'adaptation de sa future gamme à la demande locale, grâce à son centre de recherche et développement de Shanghaï. La recette testée sur Peugeot va être progressivement étendue à la marque Citroën qui, selon le plan de marche défini par l'état-major français, doit elle aussi voir ses ventes progresser de 30 % cette année en Chine, grâce notamment à la commercialisation de la C5.

YANN ROUSSEAU

© 2010 Les Echos. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

La Chine et l'Inde au plus haut

Le Monde - Economie, mardi, 26 janvier 2010, p. MDE6

OTIS ELEVATOR Company, leader mondial des ascenseurs, est une institution américaine créée par Elisha Graves Otis, il y a cent soixante ans. Une longévité qui lui permet d'avoir à son actif la construction des ascenseurs des monuments les plus célèbres au monde. La tour Eiffel, le Vatican, le gratte-ciel Chrysler à New York font partie de son palmarès, tout comme la tour Petronas en Malaisie, les 162 étages du Bury Khalifa à Dubaï, la Perle de l'Orient de Shanghaï ou les 1 400 ascenseurs et Escalator des Jeux olympiques de Pékin en
Chine...

La société, qui a réalisé près de 13 milliards de dollars (9,2 milliards d'euros) de chiffre d'affaires en 2008 est une mangeuse de capital. Le prix d'entrée dans cette industrie est corsé, ce qui réduit la concurrence à une poignée de solides compagnies : le finlandais Kone Corporation, le suisse Schindler Holding, l'allemand ThyssenKrupp Elevator, les japonais Hitachi, Mitsubishi, Toshiba...

La direction d'Otis a vu en 2009 son carnet de commandes s'alléger. Nicholas Heymann, l'analyste de la société de Bourse Sterne Agee, évoque un déclin de 25 % à 27 % des demandes en nouveaux équipements pour 2009. Et prévoit encore pour 2010 une baisse des mises en chantier.

Mais le groupe peut compter sur les rentrées stables et régulières des services après-vente : 55 % de son chiffre d'affaires. Et la diversification géographique est très poussée. Otis est présent dans 200 pays. Ce qui lui permet de compenser les faiblesses des Etats occidentaux par des commandes en Chine et en Inde. Le marché français, aujourd'hui, représente environ 14 000 ascenseurs par an; en Chine, 200 000 unités sont construites chaque année.

Otis, qui réalise 80 % de ses ventes à l'étranger, est devenu un acteur incontournable en Chine. Sa part de marché y est de 28 %. Et la croissance habituelle des nouveaux équipements Otis en Chine est de 10 % à 20 % par an. Pour mieux s'intégrer au paysage, le groupe américain travaille avec des fournisseurs locaux et a construit plusieurs usines à Tianjin, Guangzhou, Hangzhou, Suzhou, Dalian, Shanghaï. Et il vient d'annoncer un nouveau projet à Chongqing, qui ouvrira ses portes en janvier 2011.

Otis, filiale d'United Technologies, en est une des branches les plus rentables. M. Heymann souligne les juteuses marges opérationnelles qui tournent autour des 20 %. La société, estime-t-il, devrait ainsi, en 2009, réaliser un chiffre d'affaires de 11,627 milliards de dollars avec 2,410 milliards de dollars de bénéfices d'exploitation.

Pour rester numéro un, la direction du groupe parie sur l'innovation. Le poste recherche et développement représente 2 % du chiffre d'affaires. Et, crise ou pas, les fonds alloués demeurent. Quelque 1 500 spécialistes de l'ingénierie s'activent sur le site de Farmington (Connecticut). Et 3 500 autres poursuivent leurs études, dans les sites de fabrication, à Gien (France), Madrid et dans les usines chinoises... La chasse aux coûts et la poursuite de la qualité sont, aux dires du président Didier Michaud-Daniel, " obsessionnelles ".

PHOTO - India's Minister of Commerce and Industry Anand Sharma (L) and China's Commerce Minister Chen Deming attend a signing ceremony at the China-India trade and investment cooperation forum in Beijing January 19, 2010. India's gross domestic product growth is expected to accelerate in 2010 from 2009, Sharma said on Tuesday.

© 2010 SA Le Monde. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Après la Chine, l'Inde et le Brésil, à qui le tour ?

Le Monde - Economie, mardi, 26 janvier 2010, p. MDE1

Le cabinet d'audit PricewaterhouseCoopers (PwC) a publié, jeudi 21 janvier, une étude affirmant que l'addition du produit national brut (PNB) des sept plus grandes économies émergentes, baptisées " E7 ", dépasserait dès 2020 celle des PNB des pays du G7, aujourd'hui les plus riches du monde.

En 2030, toujours selon PwC, les principales économies mondiales seront, par ordre décroissant, la Chine, les Etats-Unis, l'Inde, le Japon, le Brésil, la Russie, l'Allemagne, le Mexique, la France et le Royaume-Uni... C'est donc avec un certain à-propos que le Centre de développement de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pense intituler " Switching Wealth " (" le basculement de la richesse ") son rapport sur les prospectives du développement économique mondial, qui doit être publié en juin.

En 2009, les deux G20 de Londres (avril) et Pittsburgh (septembre) ont symbolisé la nécessité d'une participation de trois nouvelles puissances au moins - la Chine, l'Inde et le Brésil - aux grandes décisions mondiales de politique économique (auxquelles la Russie participait déjà au sein du G8). Mais la liste des E7 de PwC ajoute aux BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) le Mexique, l'Indonésie et la Turquie. Car le basculement de la richesse ne concerne pas que les trois géants. " La dynamique de développement du Brésil, de la Chine et de l'Inde s'est manifestée de la même façon et au même moment dans bien d'autres pays, souligne Françoise Nicolas, de l'Institut français des relations internationales (IFRI). Mais, comme il s'agissait d'économies de plus petite taille, seule l'évolution des trois grands a été visible. "

En fait, la notion de " pays émergents " ne correspond à aucune définition économique précise; leur liste varie selon les auteurs qui se risquent à les désigner. Elle reflète seulement le fait qu'il était devenu difficile, à la fin des années 1990, de nommer indistinctement " pays en voie de développement " des Etats ainsi qualifiés par souci du politiquement correct et des pays qui l'étaient effectivement.

Dans les années 1980, le développement des quatre dragons asiatiques (Corée du Sud, Taïwan, Hongkong, Singapour) les avait fait accéder directement au rang de " nouveaux pays industrialisés ", car le revenu moyen par habitant y avait rejoint celui des pays riches.

Les cas chinois, indien et brésilien sont différents : la masse des populations pauvres rurales rend leur situation, même si elle s'améliore, incomparable à celle des pays riches. Elle est en revanche similaire à celle de la Turquie, de l'Egypte, de l'Indonésie, du Maroc, etc.

Hormis ce handicap, les trois géants et ces " autres émergents " partagent un certain nombre de caractéristiques structurelles " positives ", dont la présence et l'intensité varient à un tel point qu'il est impossible, explique Mme Nicolas, d'en dégager une " recette " du succès. Elle liste cependant parmi les atouts un appareil industriel diversifié; une classe moyenne susceptible d'offrir un marché aux produits de consommation; une insertion dans les circuits commerciaux internationaux.

La plupart des économistes s'accordent à dire que les pays bénéficiant d'un revenu élevé issu d'exportations de ressources naturelles (hydrocarbures, minerais) ne font partie de ce groupe que si ce revenu est utilisé pour diversifier leur appareil de production et s'affranchir de la dépendance à ces exportations " primaires ". Les pays du Golfe et la Russie ne figurent ainsi pas toujours dans les listes. Car l'" émergence " est un processus long, qui ne se vérifie que si ces caractéristiques structurelles créent un effet durable et continu, au-delà des soubresauts conjoncturels.

L'OCDE et le Centre d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii) préfèrent utiliser, pour définir l'émergence, des séries statistiques longues. Elles permettent de mesurer la persistance d'un niveau de croissance annuel supérieur à celui des pays riches - c'est pourquoi, Helmut Reisen, directeur de la recherche à l'OCDE, préfère parler de " convergence " plutôt que d'émergence - ou d'une croissance significative de la participation au commerce mondial de biens et services (comme le fait le Cepii).

Surtout, ces atouts ne peuvent produire des effets que s'ils sont articulés par une politique économique volontariste. " Ces Etats développeurs exercent une contrainte forte sur les acteurs économiques et institutionnels ", note M. Reisen. " Un pays comme l'Indonésie, dit Michel Fouquin, directeur adjoint du Cepii, a protégé son agriculture alors que ses exportations étaient essentiellement pétrolières. La chute du prix du baril, dans les années 1980, lui a fait adopter une politique de diversification industrielle. "

La crise financière de 2008 a été un bon test de la résilience des économies promises à l'émergence. " Plusieurs pays asiatiques et latino-américains ont tiré les leçons des crises des années 1990, observe M. Fouquin. Ils avaient accumulé des réserves, limité l'endettement en devises étrangères, ce qui leur a permis de laisser filer leur devise, à l'instar de la Corée du Sud, une fois la crise venue. " Le Brésil a pu dévaluer sa monnaie, le real, sans encourir les foudres des investisseurs, à l'inverse de l'Argentine des années 1990.

Les réserves ont été suffisantes pour lancer, à l'exemple des pays riches, des plans de relance : 71 milliards d'euros en Afrique du Sud, 1,6 % du PIB au Mexique, 3,2 % du PIB au Pérou, etc. Ils ont même amorti le choc pour les catégories les plus pauvres, observe Jeff Dayton, du Centre de développement de l'OCDE : " Malgré une récession de 11 % en 2009, le Mexique a financé un programme social de maintien de l'accès des plus démunis aux services d'éducation et de santé. Au Chili, une réforme des retraites a augmenté de 47 % les pensions des 10 % de ménages ayant les plus faibles revenus. "

Néanmoins, " l'impact de la crise économique a dégradé les finances publiques des pays émergents, observe Sylvain Laclias, économiste à la direction des études du Crédit agricole. Dans des pays comme l'Afrique du Sud, l'Ukraine ou la Turquie, cette détérioration va peser sur le redémarrage de l'économie autant que sur la capacité des pouvoirs publics à lutter contre la pauvreté et les inégalités. "

Celles-ci sont le principal handicap des pays émergents pour suivre leur chemin de croissance. La réduction de la pauvreté conditionne l'émergence d'une classe moyenne susceptible d'offrir un niveau de consommation intérieur qui affranchit l'économie de la dépendance aux marchés extérieurs.

" La suppression des communes populaires chinoises à la fin des années 1980, note M. Fouquin, a permis aux paysans d'accumuler un petit revenu qui, multiplié par leur nombre, a fourni la base du décollage du pays. " Aujourd'hui, en Chine comme dans la plupart des émergents, la croissance doit s'appuyer sur une réduction de la pauvreté dans les campagnes, via l'amélioration de la productivité agricole.

C'est donc la capacité des dirigeants et des institutions à tirer au mieux parti de leurs qualités qui permettra de bénéficier - ou non - d'un décollage économique. " Un grand nombre de pays pourraient devenir des moteurs de croissance à l'avenir, mais l'évolution actuelle dépend d'une série de facteurs, parmi lesquels l'organisation institutionnelle, les infrastructures, des politiques économiques appropriées et le cours des matières premières ", souligne David Atkinson, responsable des risques pays d'Euler Hermes.

" Les économies qui se sont montrées les plus résistantes à la crise sont celles dotées d'un gouvernement stable et efficace. C'est un bon point de départ pour mener des politiques d'ajustement - politiques fiscale et monétaire saines - et pour avoir une position forte de la balance des paiements et des taux d'endettement bas, poursuit-il. En général, une économie qui remplit ces critères devrait être capable de développer et de mener des politiques pour réduire la pauvreté. " Mais " la plupart des économies émergentes auront aussi besoin d'une croissance forte et soutenue dans les pays développés pour accélérer leurs propres progrès ", conclut M. Atkinson.

Le Mexique mais aussi les pays en transition d'Europe de l'Est ont payé d'une forte récession leur proximité des marchés occidentaux en crise. Il n'y a pas eu de " découplage ", comme l'a montré Eduardo Levy-Yeyati, professeur à l'université Torcuato Di Tella à Buenos Aires. Mais les travaux de cet économiste mettent en évidence un autre couplage, entre la croissance chinoise et celle des autres pays émergents.

" La vraie nouveauté de ces dernières années est la multiplication des échanges Sud-Sud, estime Mme Nicolas. Les entreprises chinoises et indiennes, en investissant dans les Etats les plus proches des zones développées, comme en Egypte, au Maroc ou au Mexique, concourent à la fois à la croissance de ces pays, et se ménagent des bases pour pénétrer les marchés européen et nord-américain. " Le rééquilibrage du monde ne fait que commencer.

Antoine Reverchon et Adrien de Tricornot

Grâce à des réserves financières solides, certains pays du Sud ont pu faire

le choix d'une relance de l'économie et d'une aide aux victimes de la crise Une prime aux Etats

les mieux gouvernés

PHOTO - Top officials take an oath in front of Chinese President Hu Jintao (R) and Macau's new Chief Executive Fernando Chui (2nd R) during a swearing-in ceremony in Macau December 20, 2009, the day marking the 10th anniversary of the former Portuguese enclave's handover to Chinese rule.

© 2010 SA Le Monde. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

lundi 18 janvier 2010

La Chine a investi 43,3 milliards à l'étranger en 2009 - Arnaud Rodier

Le Figaro, no. 20360 - Le Figaro Économie, samedi, 16 janvier 2010, p. 23

Les acquisitions chinoises font grincer des dents en Australie et en Europe.

« China Incorporated ». La Chine mérite plus que jamais le surnom que lui donnent les hommes d'affaires étrangers confrontés à sa boulimie internationale.

Sans se soucier le moins du monde de la crise, elle a investi l'an dernier, hors secteur financier, 43,3 milliards de dollars à l'étranger, soit 6,5 % de plus qu'en 2008, dont 20,5 milliards entre juillet et septembre derniers.

Les matières premières, dont elle a impérativement besoin pour alimenter son développement industriel, viennent naturellement en tête des acquisitions chinoises. En Australie, Pékin a piloté en 2009 pas moins de 58 opérations dans les mines, pour 10,7 milliards de dollars. Yangzhou Coal, Wuhan Iron and Steel, Chinalco, toutes des entreprises d'État, ont de grandes ambitions. Canberra doit actuellement trancher une quarantaine de dossiers concernant des rachats chinois d'actifs miniers.

Mais l'Australie n'est pas le seul continent visé. Les investissements se multiplient en Afrique, où CNOOC et Sinopec allongent 1,3 milliard de dollars dans le pétrole pour participer au développement d'un champ en Angola et au Zimbabwe où Pékin dépense 8 milliards dans les hydrocarbures et les métaux. Et ce n'est pas tout.

Les géants chinois veulent aussi rivaliser avec les multinationales dans l'industrie lourde, l'automobile en particulier. L'américain Hummer (General Motors) est désormais chinois, et Volvo va passer cette année sous la coupe de Geely Automobile Holdings.

Fonds souverains

« Internationalisez-vous, sortez des frontières », le mot d'ordre du gouvernement est suivi à la lettre par les hommes d'affaires. En 2007, Pékin avait créé un fonds souverain, la China Investment Corporation (CIC), destiné à prendre des participations dans le monde entier. Il a creusé un sillon qui ne fait que s'élargir.

La Chine peut se le permettre. Ses réserves de change, les premières au monde, dont une grande partie est constituée de bons du Trésor américain, ont explosé de 23,3 % le mois dernier, s'établissant à 2 399,2 milliards de dollars.

Les étrangers, parfois, résistent. En Grèce, le chinois Posco, qui a déboursé 3,4 milliards de dollars pour obtenir en 2008 une concession dans le port du Pirée, s'est attiré les foudres du gouvernement quand il a laissé entendre qu'il envisageait un deuxième investissement du même type dans le pays. En Afrique et en Australie, des voix s'élèvent pour protester contre la « mainmise chinoise sur les terres rares ».

© 2010 Le Figaro. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

DERNIER CHIFFRE - Haïti, les aides d'urgence

Le Figaro, no. 2035 - Le Figaro, vendredi, 15 janvier 2010, p. 6

Près de 360 millions de dollars d'aide...

États-Unis : 100 millions de dollars sous forme d'aide d'urgence

FMI : 100 millions $

Banque mondiale : 100 millions $ sous forme de prêt

ONU : 10 millions $

Royaume-Uni : 10 millions $

Australie : 9,3 millions $

Norvège : 5,3 millions $

Japon : 5 millions $

Canada : 4,8 millions $

UE : 4,5 millions $

Espagne : 4,5 millions $

Pays-Bas : 2,8 millions $

Allemagne : 2,2 millions $

Danemark : 1,9 million $

Finlande : 1,8 million $

Italie : 1,5 million $

Chine : 1 million $

Inde : 1 million $

Corée du sud : 1 million $

Suède : 850 000 $

Philippe Gelie

© 2010 Le Figaro. Tous droits réservés.


Bookmark and Share

Hyundai, le colosse aux pieds agiles - Philippe Doucet

Le Figaro, no. 20360 - Le Figaro et vous, samedi, 16 janvier 2010, p. 36

Le groupe coréen multiplie les lancements. L'objectif : réagir le plus vite et le plus précisément possible à la demande de chaque marché.

Derrière les baies vitrées de la tour abritant le siège social de Hyundai, à Séoul, la vue est impressionnante. Les larges artères de cette mégalopole, où l'on pourrait tourner un remake de Blade Runner, sont sillonnées aux trois quarts par des autos sorties des usines du groupe Hyundai-Kia. Les Daewoo, Samsung et Ssangyong forment tant bien que mal le reste du parc. Les voitures étrangères sont rares, car elles sont ici terriblement taxées.

Fort de sa position sur son marché national, Hyundai peut se déployer hardiment à l'international. Chine en 2008, République tchèque en 2009 et 2010, Russie en 2011, deux Hyundai sur trois sont désormais produites hors de Corée.

Mais si la firme a acquis, en moins de deux décennies, une réputation de sérieux, son image de fabricant de voitures économiques lui colle encore à la peau. Et il ne peut plus se contenter de produire des modèles mondiaux car l'automobile est devenue un subtil kaléidoscope sociologique. À Dallas ou à Chicago, un grand véhicule incarne la réussite individuelle. À Paris, Londres ou Berlin, il correspond plutôt à un besoin de reconnaissance sociale.

Hyundai ajuste donc en permanence son offre. Certes, la firme continuera à produire de petits véhicules au rapport qualité-prix très étudié. Elle avoue même qu'il lui manque un low-cost : « Pas un modèle genre Tata Nano, invendable en dehors des frontières indiennes », nous précise Steve Yang, le numéro trois du groupe.

Vitesse d'exécution sidérante

Hyundai veut d'abord relever son offre. Avec son amusant coupé Genesis, elle mise sur le plaisir de conduite. Son ix 35 confirme son engagement dans le véhicule à transmission intégrale. Et l'Elantra électrique GPL montre sa capacité à réagir face à Toyota et à Honda sur les petits hybrides.

Cette réactivité est sans doute sa meilleure arme. Au pays du Matin-Calme, la vitesse d'exécution dans le travail est sidérante, et on travaille là-bas 2 100 heures par an contre 1 400 à 1 500 en France. Conséquence, « le processus de fabrication des cigarettes ou des produits cosmétiques entre la conception et la mise sur le marché prend deux fois moins de temps en Corée du Sud que dans la plupart des pays européens », cite en exemple Philippe Li, le président de la chambre de commerce franco-coréenne. L'automobile peut donc raccourcir aussi les temps de gestation.

Simple fabricant sous licence de Ford Cortina à sa création, en 1967, assembleur faisant appel à Mitsubishi en 1974 pour sa Pony, il développe à grande vitesse sa propre technologie depuis 1988. Possédant aujourd'hui une expertise reconnue, Hyundai a franchi en quelques décennies toutes les étapes de la construction automobile. Et joue désormais sans aucun complexe dans la cour des grands.

© 2010 Le Figaro. Tous droits réservés.

Bookmark and Share

Construction navale : la Chine double la Corée du Sud - Sébastien Falletti

Le Figaro, no. 20359 - Le Figaro Économie, vendredi, 15 janvier 2010, p. 22

La crise du secteur a fait le jeu des chantiers les plus compétitifs.

La crise a provoqué un passage de témoin historique sur les rives de l'Asie Pacifique : la Chine a ravi la place de numéro un mondial de la construction navale à la Corée du Sud. Pour la première fois en 2009, les chantiers chinois ont décroché plus de commandes de navires que leurs rivaux coréens. L'empire du Milieu a raflé 44,4 % des commandes mondiales en volume, contre 40,1 % au pays du Matin-Calme, selon les derniers chiffres de l'agence londonienne Clarkson PLC. Il possède aujourd'hui un carnet de commandes fourni, qui affiche un total cumulé de 53,2 millions de CGT (compensated gross tons, l'unité de mesure du secteur) contre 52,8 à son rival.

En pleine rétractation du commerce mondial, les faibles coûts des constructeurs chinois ont fait la différence face à des concurrents coréens et japonais qui voyaient leurs carnets de commandes fondre à vue d'oeil sous le coup des annulations. Et la timide reprise en 2010 devrait encore affermir cette tendance, estiment les experts.

Une révolution puisque la Corée du Sud était le leader incontesté depuis les années 1980. Sans aucune expérience dans le secteur au début des années 1970, le volontarisme des gouvernements de Séoul et des grands chaebols avait réussi en moins de deux décennies à abattre la suprématie du Japon, relégué aujourd'hui au troisième rang. Un miracle érigé en fierté nationale, celle-ci étant aujourd'hui mise à mal.

Menace de surproduction

Mais, face aux assauts chinois, la quatrième économie d'Asie n'a pas dit son dernier mot. Regroupant toujours sept des dix plus gros chantiers de la planète, elle mise sur le haut de gamme et fait encore la course en tête, en valeur du carnet de commandes. Les géants comme Hyundai, Daewoo ou Samsung gardent une confortable marge d'avance sur les segments à forte valeur ajoutée qui sont les plus lucratifs : les méthaniers, les supertankers ou conteneurs ou les plates-formes de forage en haute mer, dont la demande augmente à mesure que le pétrole se raréfie. Les majors comme Shell ou Exxon concluent avec eux des contrats de longue durée qui leur assurent un avenir à long terme. Mais cette évolution est souvent hors de portée des chantiers de taille moyenne, qui subissent de plein fouet la concurrence chinoise et voient leur avenir en pointillé. « Ils vont souffrir », annonce Young Il-bae, chercheur au Samsung Economic Research Institute.

D'autant que si la demande mondiale de navires est repartie après une année noire, elle ne devrait pas retrouver en 2010 le niveau d'avant la crise, prédit l'expert. Signe de la reprise, les carnets de commandes se remplissent dès ce mois de janvier alors que l'année dernière ils étaient restés vierges jusqu'au printemps. Lundi, STX, le propriétaire des chantiers de l'Atlantique, a annoncé un contrat de 130 millions de dollars avec l'armateur turc Densa. Mais les années du boom de la construction sont révolues et l'industrie se prépare au contraire à une surproduction à l'horizon 2011. Une menace prise au sérieux même par le gouvernement chinois, qui a lancé une ambitieuse politique de concentration des chantiers pour résister à la tempête à venir.

© 2010 Le Figaro. Tous droits réservés.

Bookmark and Share